Environ 75% des détenus des pénitenciers canadiens sont des fumeurs. Ils ont appris une mauvaise nouvelle hier: ils perdront le droit de fumer à l'extérieur de leur pénitencier. Dans un jugement rendu hier, la Cour d'appel fédérale a invalidé une décision rendue l'automne dernier par la Cour fédérale.

Depuis janvier 2006, les détenus ne peuvent fumer à l'intérieur des pénitenciers fédéraux. La directive a été implantée par le Service correctionnel du Canada pour protéger les droits des non-fumeurs. En mai 2008, elle a été étendue à l'extérieur des pénitenciers. Selon le Service, la seule façon de contrôler l'utilisation du tabac à l'intérieur était de l'interdire en tout temps. Si les détenus possèdent du tabac pour le fumer dehors, il serait impossible de réussir à les empêcher de le fumer à l'intérieur, arguait-on.

 

En octobre 2009, le juge Luc Martineau de la Cour fédérale avait invalidé cette directive. Son jugement avait été rendu une semaine seulement après qu'il eut entendu la cause. Il soutenait que l'interdiction de fumer à l'extérieur était «injustifiable et déraisonnable». Selon lui, il n'existait pas de lien rationnel entre cette interdiction et l'objectif visé, soit la protection des droits des non-fumeurs. Il avait aussi remis en question l'autorité du Service correctionnel à implanter une telle mesure.

Dans leur plaidoirie, les avocats des détenus avaient également soutenu que l'interdiction de fumer était inefficace, car elle avait mené à la création d'un marché noir du tabac à l'intérieur des prisons.

Huit mois plus tard, la Cour d'appel fédérale renverse ce jugement. Les juges Nadon, Pelletier et Trudel donnent unanimement raison aux appelants. Selon eux, le Service correctionnel n'a pas outrepassé son mandat en étendant l'interdiction de fumer à l'extérieur des murs des pénitenciers. «Il ne fait aucun doute qu'en appliquant cette directive, le Service correctionnel essayait d'empêcher les détenus et les employés de fumer à l'intérieur des établissements carcéraux, dans le but de protéger les non-fumeurs», écrit le juge Nadon (notre traduction libre de l'anglais).

La Cour d'appel fédérale estime que le juge Martineau avait outrepassé son mandat en se permettant d'évaluer l'efficacité de l'interdiction de fumer pour atteindre son objectif. «En définitive, il appartient au Service correctionnel du Canada d'évaluer les mesures nécessaires pour assurer la santé et la sécurité de ceux qui vivent et travaillent dans les établissements carcéraux», conclut le juge Nadon.