Le nouveau passeport que les Britanniques utiliseront après le Brexit devrait être fabriqué par une entreprise française, rapportait jeudi la presse britannique, un choix vécu comme une «humiliation nationale» par les partisans de la sortie de l'UE.

Selon le quotidien conservateur The Telegraph, le spécialiste français de la sécurité numérique Gemalto serait sur le point de remporter l'appel d'offres lancé par le gouvernement britannique, devançant l'entreprise britannique De La Rue, qui assurait jusqu'à présent la fabrication des passeports.

«C'est une décision surprenante et décevante», a réagi sur la BBC Martin Sutherland, patron de De La Rue.

«Quand je pense que nous avons entendu ces dernières semaines des ministres venir joyeusement dans les médias pour parler des passeports bleus et du fait que ce passeport bleu était une icône de l'identité britannique», a-t-il ajouté, en référence au fait que les futurs passeports abandonneraient la couleur bordeaux en vigueur au sein de l'Union européenne pour revenir à leur bleu «emblématique» d'antan.

«Maintenant, cette icône de l'identité britannique va être fabriquée en France», a-t-il regretté, invitant la première ministre Theresa May «à venir dans (son) usine pour expliquer à (ses) employés dévoués pourquoi elle pense que c'est une décision sensée de délocaliser la fabrication d'une icône britannique».

Un porte-parole du ministère britannique de l'Intérieur a souligné que l'entreprise sélectionnée l'avait été à l'issue d'une compétition «rigoureuse, juste et ouverte», qui permettait d'obtenir «le meilleur rapport qualité/prix pour les contribuables».

Il a précisé que la proposition de l'entreprise sélectionnée, qu'il n'a pas  voulu nommer, permettait d'économiser 120 millions de livres (137 millions d'euros) d'argent public et que les passeports britanniques ne sont plus forcément tous fabriqués au Royaume-Uni depuis 2009. 

«Humiliation nationale» 

Gemalto a de son côté déclaré ne pas pouvoir faire de commentaire «à ce stade, (...) la procédure étant toujours en cours et les termes du contrat étant confidentiels», dans un courrier électronique à l'AFP.

L'affaire a rapidement tourné à la polémique et provoqué la colère des pro-Brexit, dont beaucoup ont voté lors du référendum de juin 2016 pour «reprendre le contrôle» de leur économie, y compris de ce type de marchés publics.

«Ce devait être un moment de célébration, le retour de notre emblématique passeport bleu, le rétablissement de l'identité britannique», a déclaré l'ancienne ministre conservatrice Priti Patel dans le tabloïd The Sun.

«Confier cette tâche aux Français est tout simplement stupéfiant. C'est une humiliation nationale», a-t-elle ajouté.

L'affaire suscitait également moult réactions sur les réseaux sociaux via le mot clef passportgate.

«Une définition de l'ironie : nous quittons l'UE et le gouvernement attribue la fabrication du nouveau passeport britannique à un pays (de l'UE)», a notamment tweeté Nick Druce.