C’est un moment historique qu’a vécu le tennis canadien, hier, avec la victoire de Bianca Andreescu aux Internationaux des États-Unis. Aucun joueur du pays n’avait encore réussi à s’imposer en Grand Chelem et la victoire de la joueuse de 19 ans est venue couronner les efforts de son équipe, mais aussi de tous ceux qui ont œuvré au développement du tennis au Canada.

L’entraîneur Sylvain Bruneau, le premier qu’a rejoint Andreescu après le match, était visiblement au bord des larmes. Celui qui travaille depuis plus de 30 ans avec les jeunes joueurs canadiens n’est pas de ceux qui recherchent les caméras et les projecteurs. En entrevue à la télé américaine après le match, il était un peu à court de mots.

« C’est une performance incroyable, héroïque, a-t-il souligné. Un grand moment pour le tennis au Canada. Je sais qu’elle a beaucoup de soutien chez nous, que tout le monde en parle, que tout le monde est avec elle. »

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Sylvain Bruneau, entraîneur de l’équipe canadienne

Je suis d’abord un amateur de tennis, et c’est vraiment un grand plaisir de vivre un tel moment.

Sylvain Bruneau, entraîneur de l’équipe canadienne

L’entraîneur a avoué avoir été plus tendu, en deuxième manche, quand Andreescu a vu sa rivale revenir à égalité, 5-5, après que celle-ci eut été menée 5-1.

« Ça a été vraiment difficile : 5-1, balle de match, et tout à coup, Serena retrouve son jeu, la foule se range derrière elle… Je savais qu’[Andreescu] n’allait pas s’écrouler, mais c’est redevenu un match très indécis. Bianca a toutefois tout un caractère, elle aussi, et elle a continué d’attaquer, d’y aller pour ses coups, comme elle devait le faire. Elle a obtenu sa chance et l’a saisie. »

D’autres jeunes joueuses ont aussi connu une gloire rapide, mais peu d’entre elles ont pu remporter plusieurs titres majeurs. Bruneau espère que ce ne sera pas le cas : « Ce sera notre mandat, toute l’équipe autour d’elle, de la maintenir sur la bonne voie, de la maintenir dans le moment, dans la routine des entraînements et des matchs. Elle n’a que 19 ans, toute une carrière devant elle. Nous allons essayer de réaliser bien d’autres grandes choses encore. »

« La meilleure joueuse actuellement »

Aussi dans la loge d’Andreescu au stade Arthur-Ashe, Louis Borfiga a réalisé le rêve de sa vie. Le créateur du Centre national d’entraînement (CNE) du stade IGA, en 2007, a longtemps travaillé en France – il est natif de Monaco –, y formant de nombreux joueurs qui ont brillé au cours des dernières années.

« Remporter un tournoi du Grand Chelem, c’est le but suprême, a-t-il rappelé en entrevue. Je pense être arrivé aujourd’hui au sommet de ma carrière. Quand je suis débarqué ici, il y a 12 ans, je n’y pensais pas vraiment, car il y avait beaucoup à faire. Mais nous avons réussi à former de bons joueurs, et là, nous avons la chance de miser sur une génération exceptionnelle.

« Après son titre à la Coupe Rogers, j’y croyais un peu, car Bianca est actuellement la meilleure joueuse du monde. »

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Louis Borfiga, vice-président du développement de l’élite chez Tennis Canada

Elle a très bien joué tout au long du tournoi et, aujourd’hui, je pense qu’on a un peu assisté à une passation des pouvoirs entre Serena et la jeune génération.

Louis Borfiga, vice-président du développement de l’élite chez Tennis Canada

« Je pense que pour Bianca, ce n’est que le premier d’une longue série de victoires en Grand Chelem. Maintenant qu’elle en a gagné un, elle sera encore plus forte mentalement. »

Et Borfiga ne doute pas que Félix Auger-Aliassime et Denis Shapovalov aient le potentiel pour rejoindre bientôt Andreescu aux palmarès des grands tournois.

À Montréal, Eugène Lapierre et de nombreux membres du personnel de Tennis Canada ont suivi la finale dans un bar de Villeray, comme tous les autres clients qui remplissaient l’établissement. Lui aussi a mesuré la dimension historique du moment.

« Ça fait plusieurs décennies qu’on travaille là-dessus, a-t-il rappelé. La progression s’est accélérée au cours des dernières années, grâce au CNE, notamment, mais je pense à Réjean Genois, à Richard Legendre et à tous ceux qui ont rêvé à ce jour. »

Le vice-président principal de Tennis Canada s’est évidemment réjoui de l’impact d’un tel triomphe pour le développement du sport au pays, rappelant qu’il faut déjà préparer la relève. Et celui qui est aussi directeur de la Coupe Rogers a bien pris soin de noter que les quatre finalistes en simple à New York étaient aussi ceux qui ont disputé les finales à Montréal et à Toronto il y a moins d’un mois.