Audrey McManiman est devenue en 2012 la première médaillée d’or de l’épreuve de slopestyle dans l’histoire des Jeux olympiques de la jeunesse (JOJ).

Après avoir changé de discipline en 2016, elle s’apprête enfin à vivre son rêve olympique, à l’âge de 27 ans, en snowboard cross. S’il y a une athlète qui profitera au maximum de son expérience, c’est bien elle.

« C’est le plus grand rêve de ma vie, c’est exceptionnel ! C’est vraiment une victoire pour moi », a-t-elle dit d’entrée de jeu de sa chambre d’hôtel en Autriche.

Depuis le début de sa carrière, McManiman a été obligée de s’adapter. Même si elle est de nature assez calme et positive, la planchiste a dû surmonter une série d’épreuves, mais c’est ce qui la rend fière.

À 16 ans, elle s’est illustrée aux Jeux olympiques de la jeunesse à Innsbruck, en Autriche. En 2014, deux ans plus tard, elle pensait bien pouvoir aller aux Jeux olympiques à Sotchi, mais elle a raté de peu sa qualification. L’équipe canadienne envoyait une délégation de quatre planchistes et McManiman était cinquième selon le classement national. Lors de la saison 2016, elle a arrêté le slopestyle en raison d’une grave commotion cérébrale. Elle s’est donc réorientée vers le snowboard cross.

Encore une fois, le Canada n’envoyait que quatre athlètes à PyeongChang pour les Jeux de 2018 et la Québécoise était cinquième au classement. C’est là qu’elle a eu envie d’arrêter. Elle a toutefois continué et elle connaît cette année la meilleure saison de sa carrière sur le circuit de la Coupe du monde, en route, enfin, vers les Jeux olympiques de Pékin.

Des valeurs profondes

McManiman a grandi dans une ferme laitière, à Saint-Ambroise-de-Kildare, dans Lanaudière. C’est vers l’âge de 10 ans qu’elle a commencé à faire de la planche, avec le vieil équipement de son cousin. Elle a rapidement attrapé le virus. Si bien qu’elle s’est construit son propre parcours, derrière le garage de la maison familiale. À l’aide d’une pelle, elle a bâti son propre univers. Des rampes, des sauts et une piste. Elle y passait toutes ses soirées. Même que ses parents ont dû faire installer de gros éclairages pour qu’elle puisse s’exercer de la fin des classes jusqu’à l’heure du coucher. Lorsqu’elle a changé de discipline et qu’elle a commencé le snowboard cross à 21 ans, rien n’indiquait qu’elle allait atteindre les plus hauts sommets. Pourtant, elle coursera bientôt avec les anneaux olympiques sur son dossard. Tout ça n’est pas le fruit du hasard. Elle le doit notamment à ses parents.

« J’ai été chanceuse de grandir sur une ferme. Mes parents m’ont appris de bonnes valeurs comme le travail et l’importance de vivre de sa passion. S’il y a des gens qui sont passionnés et travaillants, ce sont mes parents. »

PHOTO PATRICE LAROCHE, ARCHIVES LE SOLEIL

Audrey McManiman

La job de producteurs laitiers, c’est 24/7. Ça prend des sacrifices. J’ai pris ça et je l’ai adapté à la vie d’athlète, parce que c’est la même chose.

Audrey McManiman

Lorsqu’elle a été nommée dans l’équipe olympique, il lui a fallu deux jours pour remercier tout le monde. Elle a répondu à tous les messages. C’était important pour elle de prendre le temps nécessaire pour répondre à tous ceux qui l’avaient soutenue et encouragée depuis plus de dix ans. Ça aussi, ça vient des valeurs que sa famille lui a inculquées. C’est comme ça chez les McManiman.

Une passion développée à travers les blessures

En repensant à son parcours, l’un des éléments dont elle est le plus fière est de ne jamais avoir abandonné, même quand il n’y avait plus rien à faire.

Sept mois avant de gagner sa médaille d’or aux JOJ, la planchiste était sur une table d’opération. Elle s’était déchiré les deux ligaments croisés antérieurs et les ménisques. Les médecins ont dû opérer ses deux genoux. La durée de réadaptation habituelle pour ce genre d’intervention est de neuf mois, pour un seul genou. Elle a défié les pronostics. Après sa victoire en Autriche, elle se sentait imbattable.

C’est pendant cette réadaptation qu’elle a commencé à développer de l’intérêt pour son autre passion, la kinésiologie. Si elle termine actuellement son baccalauréat à l’Université Laval et qu’elle souhaite poursuivre avec une maîtrise en thérapie du sport, c’est parce qu’elle a vu des professionnels prendre soin d’elle.

J’ai appris ce que c’était et ça a rendu ma réhabilitation plus facile. J’aimais ça, y aller, parce que je les regardais faire, j’apprenais, et c’est ça qui m’a donné le goût. À 16 ans, je me disais que j’allais apprendre à me réparer pour pouvoir durer plus longtemps.

Audrey McManiman

Les blessures n’ont pas été étrangères à McManiman dans les années qui ont suivi. Après avoir subi de nombreuses commotions cérébrales depuis ses débuts en surf des neiges, celle qu’elle a eue en janvier 2016 à Whistler a été grave et décisive. « J’ai su sur le coup que c’était fini, le slopestyle. » Quelques mois plus tard, elle a décidé d’essayer le snowboard cross, un sport qui lui avait été souvent suggéré en raison de son physique et de sa manière de s’exercer. Sa première compétition à vie n’était rien de moins que les championnats canadiens, où elle a terminé en quatrième place, avec son équipement de demi-lune. C’était inespéré. Cette journée-là, Maëlle Ricker, grande championne des Jeux de 2010, lui a fortement suggéré de se diriger vers le snowboard cross…

En septembre dernier, la planchiste a encore dû se faire opérer au genou gauche. Au mois d’août, une IRM avait révélé que son ligament croisé antérieur était endommagé, de même que son ménisque et son artère fémorale. Son équipe et elle ont longuement hésité à faire l’opération. Malgré tout, McManiman connaît les meilleurs moments de sa carrière avec trois top 10 en six courses depuis le début de la saison. Maintenant, direction Pékin pour réécrire sa propre histoire.