Après avoir été reportés d’un an à cause de la pandémie de COVID-19, les Jeux olympiques de Tokyo seraient finalement en voie d’être annulés, selon le quotidien britannique The Times, qui cite une source dans le gouvernement japonais, alors que les officiels continuent d’affirmer que les Jeux auront bien lieu cette année.

Plutôt que de tenir les compétitions sportives dans des conditions difficiles, la Ville de Tokyo essaierait d’obtenir l’organisation des Jeux à la prochaine date disponible, soit 2032, selon la source citée par le journal britannique.

La source gouvernementale du Times affirme qu’il y aurait une entente au sein de la coalition au pouvoir voulant que les Jeux ne puissent pas avoir lieu cette année. La difficulté serait maintenant de trouver une manière d’annoncer l’annulation sans perdre la face et sans nuire aux chances de Tokyo pour 2032.

« Personne ne veut être le premier à le dire, mais le consensus est que c’est trop difficile, affirme la source. Personnellement, je ne pense pas que ça aura lieu. » Au moment d’écrire ces lignes, aucun autre organe de presse n’a confirmé la nouvelle.

Les réactions n’ont pas tardé à pleuvoir à la suite de ces allégations, alors que Yoshihide Suga, le premier ministre du Japon, a pris la parole au parlement vendredi matin, heure locale, pour démentir en bloc, selon Reuters. Différents comités olympiques nationaux ont également réagi sur les réseaux sociaux pour réaffirmer leur conviction que les Jeux se tiendront cette année.

« Le [Comité olympique canadien (COC)] a confiance que les Jeux peuvent être organisés avec succès et en toute sécurité compte tenu de tout ce que nous avons appris dans le monde du sport au cours des derniers mois et de l’accent mis par le CIO et par Tokyo 2020 sur les mesures pour combattre la COVID-19 », a déclaré David Shoemaker, chef de la direction et secrétaire général du COC, dans une enfilade sur Twitter jeudi soir.

Il affirme continuer les préparations en attendant une décision officielle du Comité international olympique (CIO) et du comité organisateur des Jeux de Tokyo.

Le coup d’envoi des Jeux olympiques de Tokyo est toujours prévu le 23 juillet prochain, mais avec l’actuelle recrudescence mondiale du coronavirus, y compris au Japon, la tenue des Jeux est loin d’être acquise.

Officiellement, les organisateurs continuent d’affirmer haut et fort qu’ils pourront se tenir l'été prochain, même si le virus n’est pas maîtrisé d’ici là.

« Selon toutes les indications et sur la base des informations disponibles hier, tout laisse croire que [la tenue des jeux] devrait être possible. On se prépare tous en fonction de ça, mais comme le veut l’expression, l’éléphant dans la pièce est la COVID », a déclaré Dick Pound, haut responsable du CIO, en entrevue avec La Presse la semaine dernière.

« Il y aura peut-être des pays où la pandémie est si sévère que ce sera dangereux pour eux de voyager et d’être avec les autres. On pourrait avoir à faire le tri des pays où c’est trop sérieux pour voyager », a-t-il ajouté.

Jeudi dernier, Thomas Bach, le président du CIO a cependant laissé entendre que le nombre de spectateurs pourrait être réduit, affirmant que le CIO devait être « flexible » et prêt à faire des « sacrifices » pour protéger la vie des gens.

Il n’y a pas de plan B, nous sommes totalement engagés à faire de ces Jeux [des Jeux] sûrs et réussis.

Thomas Bach, président du CIO

« La tenue des Jeux est notre cap inflexible et, à ce stade, nous ne discutons de rien d’autre », avait déclaré cette semaine le directeur général du comité d’organisation Toshiro Muto.

« Tout peut arriver », avait toutefois glissé la semaine dernière Taro Kono, un ministre clé du Japon, ajoutant que les organisateurs devaient « réfléchir à des plans de secours ».

Le CIO a annoncé jeudi qu’il y aura une rencontre de sa commission exécutive le 27 janvier prochain pour discuter, entre autres choses, du calendrier olympique. La rencontre sera suivie d’une conférence de presse de son président, Thomas Bach.

Report en 2024 ?

Le cœur des Japonais n’y est plus : un récent sondage a montré que 80 % étaient opposés à la tenue des Jeux cette année, 35 % étant favorables à leur annulation et 45 % à un nouveau report.

L’état d’urgence a été réinstauré à Tokyo et dans 10 autres départements japonais et le comité d’organisation des Jeux a mis en place des mesures censées empêcher une propagation du coronavirus durant les Jeux, même sans vaccin, comme des tests réguliers pour les athlètes, des déplacements limités aux sites olympiques et des spectateurs réduits au silence pour éviter les postillons.

Si des questions cruciales n’ont pas encore été tranchées, comme la présence ou non de spectateurs venus de l’étranger, une certitude déjà : les Jeux de Tokyo seront les Jeux d’été les plus chers de l’histoire.

Le surcoût causé par le report et la mise en place d’un protocole sanitaire face au coronavirus a été chiffré à près de 300 milliards de yens (3,7 milliards de dollars canadiens), portant le total du budget officiel des Jeux de Tokyo à 1644 milliards de yens (20 milliards de dollars canadiens).

Et cette somme n’inclut pas d’autres lourds investissements de l’État japonais liés à l’évènement entre 2013 et 2018.

L’espoir des vaccins

Une annulation serait un coup dur pour le mouvement olympique comme pour la fierté nationale du Japon. Tokyo avait déjà été privé des Jeux de 1940, réattribués à Helsinki puis rapidement annulés en raison du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale.

Les responsables nippons espèrent que le soutien populaire pour les Jeux s’améliorera dans les mois à venir, notamment grâce à l’arrivée des vaccins contre le coronavirus.

Un premier vaccin devrait être autorisé d’ici à la fin février au Japon, en vue d'immuniser d’abord les personnes à risque.

La vaccination ne devrait pas être obligatoire pour les athlètes et le public à Tokyo.

Mais le sujet est potentiellement polémique : faut-il considérer les athlètes comme prioritaires pour la vaccination ? Cela pourrait être nécessaire pour garantir la sûreté des JO de Tokyo, a récemment estimé Dick Pound.

— Avec Simon Drouin, La Presse, et l’Agence France-Presse