« C’est juste incroyable »

(Québec) « Tabernacle ! », s’est épanché Maxim Van Gils après avoir embrassé son coéquipier Arnaud De Lie, étendu en plein milieu de la Grande Allée, encore sous le choc d’avoir remporté le Grand Prix cycliste de Québec, vendredi après-midi.

Mains accrochées aux cocottes de frein, le Belge de Lotto Dstny a fait parler sa puissance exceptionnelle pour reprendre in extremis le Néo-Zélandais Corbin Strong, coéquipier des Québécois Hugo Houle et Guillaume Boivin chez Israel-Premier Tech, au sprint final.

Les deux jeunes vingtenaires ont réussi à mater l’Australien Michael Matthews, double lauréat à Québec, qui a cette fois dû se contenter de la troisième place, son sixième podium à ses sept derniers départs ici.

À 21 ans et à sa deuxième saison professionnelle seulement, De Lie est déjà une machine à gagner.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

Arnaud De Lie célèbre sa victoire aux côtés de Corbin Strong et de Michael Matthews.

Avant de débarquer dans la capitale nationale, où il a commencé à se familiariser avec le vernaculaire, il avait inscrit 16 victoires à son palmarès. Mais il n’avait jamais levé les bras dans une course de l’envergure du GP de Québec, labellisé WorldTour.

« Ouais, c’est juste incroyable, a commenté De Lie en conférence de presse. N’avoir que 21 ans et gagner ici au Québec… On sait que c’est une classique phare du calendrier WorldTour. Il y a un niveau de fou. C’est juste incroyable. »

Inspiré par Philippe Gilbert

Élevé dans une ferme bovine, ce qui lui a valu le surnom de Taureau de Lescheret, son village d’origine, De Lie est un ancien vététiste qui s’est mis à la route quand il a commencé à prendre de la masse à l’adolescence. L’une de ses inspirations est son compatriote wallon Philippe Gilbert, gagnant du deuxième GP de Québec en 2011.

De Lie se souvient même d’avoir suivi à la télévision la victoire inaugurale de Thomas Voeckler l’année précédente. Il avait alors 8 ans…

En début de saison, le sprinteur belge a donc manifesté son désir de participer aux classiques canadiennes. Reléguée en deuxième division comme Israel-Premier Tech, Lotto Dstny devait assumer les coûts du voyage à titre de formation invitée.

« L’équipe a dû investir pour venir ici, a-t-il souligné. C’est moi qui ai dit au début de l’année que j’avais envie de venir. Pouvoir lever les bras ici, c’est dire merci aussi à la direction qui m’a fait confiance, parce que c’est un voyage qui coûte quand même cher. »

Un classique

Disputée dans la touffeur de cette fin d’été, l’épreuve de 201,6 km s’est déroulée presque entièrement au sec, un « scénario de rêve » pour De Lie, qui craignait que l’accélération du peloton survienne plus tôt en cas d’averse.

La trame de ce 12e GP de Québec a été classique, avec une échappée au long cours à quatre coureurs, maintenue à distance raisonnable par des formations intéressées par un sprint, en particulier les Jayco AlUla de Matthews.

Le Belge Mauri Vansevenant (Quick-Step), l’Italien Gianmarco Garofoli (Astana), l’Espagnol David Lozano Riba (Novo Nordisk) et le champion tchèque Mathias Vacek (Lidl-Trek) n’ont jamais été en mesure de faire monter l’écart jusqu’à quatre minutes. Le quatuor de tête, auquel le jeune Québécois Félix Hamel (équipe nationale) a tenté de se joindre en vain, a été repris avec 43 kilomètres à faire.

À part Ben Healy, le champion irlandais d’EF, peu d’attaques ont été tentées jusqu’au dernier tour. Le vent de face qui soufflait sur le boulevard Champlain, en bordure du fleuve, en a découragé beaucoup, a souligné Matthews.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

Le peloton passe la porte Saint-Jean, dans le Vieux-Québec.

Sacré l’an dernier après un démarrage surprise dans la côte des Glacis, Benoît Cosnefroy (AG2R Citroën) a refait le coup, mais un peu plus tôt cette fois, dans la côte de la Montagne.

Le Français a creusé un beau trou, avant d’être repris deux kilomètres plus loin, juste après être passé devant Le Diamant de Robert Lepage.

« J’ai su prendre beaucoup de vitesse »

À partir de là, le Canadien Michael Woods, très en jambes, a abattu un travail colossal pour positionner son coéquipier Strong à l’avant du peloton en vue du sprint alors prévisible. Le Néo-Zélandais semblait en mesure de cueillir la victoire, mais il s’est fait avaler par De Lie dans les derniers mètres.

« À plus ou moins 500-600 mètres, ça devient plus plat et j’avais encore Florian Vermeesch et Maxim Van Gils avec moi, a relaté De Lie. On a su prendre de la vitesse. J’étais un peu loin, mais c’était aussi bien : j’étais au cœur du peloton et j’ai su garder de la force pour le vrai final. Je lance d’assez loin, mais avec l’aspiration des autres, j’ai su prendre beaucoup de vitesse. »

« Ce sont des arrivées qui ne mentent pas. C’est souvent le plus fort qui gagne. Aujourd’hui, c’était moi. »

À son premier séjour à l’extérieur de l’Europe, Arnaud De Lie a promis de revenir dans « ce beau pays » avec le souhait de parfaire son accent québécois. Assis à ses côtés à titre de meilleur Canadien (41e), Guillaume Boivin lui a cependant déconseillé de réutiliser le mot en « tab… ».

Classement du GP de Québec

  • 1. Arnaud De Lie (BEL/LTD) les 201,6 km en 4 h 47 min 35 s (moyenne : 42,1 km/h)
  •  2. Corbin Strong (NZL/IPT)       tous m. t.
  •  3. Michael Matthews (AUS/JAY) 
  •  4. Alex Aranburu (ESP/MOV)
  •  5. Matej Mohorič (SLO/TBV)
  •  6. Christophe Laporte (FRA/TJV) 
  •  7. Alexander Kamp (DEN/TUD).
  •  8. Marc Hirschi (SUI/UAD) 
  •  9. Julian Alaphilippe (FRA/SOQ)
  • 10. Mattias Skjelmose (DEN/LTK)