L’armée israélienne a annoncé dimanche avoir découvert le « plus grand tunnel » du Hamas sous la bande de Gaza assiégée, où Israël poursuit ses frappes meurtrières malgré des appels pressants à un cessez-le-feu.

« Ce réseau massif de tunnels, qui se divise en plusieurs branches, s’étend sur plus de quatre kilomètres et n’arrive qu’à 400 mètres du point de passage d’Erez », entre Israël et le nord de la bande de Gaza, ont indiqué les forces armées israéliennes.

Ce tunnel a été dévoilé à la presse au 72e jour de la guerre déclenchée le 7 octobre par une attaque sanglante du mouvement islamiste palestinien sur le sol israélien à partir de la bande de Gaza, qui a fait quelque 1140 morts, en majorité des civils.

PHOTO JACK GUEZ, AGENCE FRANCE-PRESSE

« Ce réseau massif de tunnels, qui se divise en plusieurs branches, s’étend sur plus de quatre kilomètres et n’arrive qu’à 400 mètres du point de passage d’Erez » entre Israël et le nord de la bande de Gaza.

En représailles, l’armée israélienne a juré d’« anéantir » le Hamas, bombardant depuis sans relâche l’étroite bande de terre, soumise à un blocus israélien depuis plus de quinze ans et un siège total depuis le 9 octobre.

Les frappes israéliennes ont fait plus de 18 800 morts dans la bande de Gaza, en majorité des femmes, enfants et adolescents, selon le dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas.

L’armée a également lancé une opération terrestre le 27 octobre, d’abord cantonnée au nord du petit territoire, avant de s’étendre au sud où se sont massés des centaines de milliers de civils déplacés par la guerre.

Le tunnel mis au jour par l’armée est équipé d’un système de canalisation, d’électricité, de ventilations, d’égouts, de réseaux de communication et de rails, a constaté un journaliste de l’AFP autorisé à s’y rendre.

L’armée affirme y avoir découvert un grand nombre d’armes prêtes à servir en cas d’attaque par le Hamas, classé organisation terroriste par les États-Unis, l’Union européenne et Israël.

« Trêve immédiate et durable »

La neutralisation des tunnels est l’une des priorités de l’opération israélienne, alors que la bande Gaza serait creusée de 1300 galeries sur 500 kilomètres, selon les estimations de l’Institut de la guerre moderne de l’académie militaire américaine West Point.

En visite dimanche en Israël, la cheffe de la diplomatie française Catherine Colonna a exprimé les inquiétudes de Paris face à l’ampleur des victimes civiles, et appelé à une trêve « immédiate et durable ».

PHOTO ALBERTO PIZZOLI, AGENCE FRANCE-PRESSE

La ministre française des Affaires étrangères Catherine Colonna (à gauche) s’entretient avec le porte-parole de l’armée israélienne, le colonel Olivier Rafowitcz sur une base militaire près de Ramle, le 17 décembre.

« Trop de civils sont tués », a-t-elle déclaré à l’issue d’une rencontre avec son homologue Eli Cohen, qui a estimé que « tout appel au cessez-le-feu » était « un cadeau pour le Hamas ».

Le chef de la diplomatie britannique David Cameron et son homologue allemande Annalena Baerbock ont appelé de leur côté à « un cessez-le-feu durable », aussi rapidement que possible, dans une tribune commune publiée par le Sunday Times. Mais ils s’opposent à un « cessez-le-feu général et immédiat », estimant que le Hamas « doit déposer les armes ».

Principaux alliés d’Israël, les États-Unis seront représentés dans les prochains jours par le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin, qui doit rencontrer des dirigeants en Israël, mais aussi à Bahreïn et au Qatar.

Il devrait notamment évoquer les tensions provoquées par les attaques en mer Rouge des rebelles houthis du Yémen, présentées comme des ripostes à la guerre entre Israël et le Hamas. Plusieurs géants du transport maritime mondial ont annoncé interrompre le passage de leurs navires par cette route maritime stratégique pour le commerce international.

PHOTO IBRAHEEM ABU MUSTAFA, REUTERS

Des Palestiniens inspectent le site d’une frappe israélienne à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 17 décembre.

« Bain de sang »

Le ministère de la Santé du Hamas a déploré dimanche la mort 24 Palestiniens tués dans le camp de Jabaliya (nord) lors d’un bombardement israélien.

D’autres frappes ont tué au moins douze personnes dans la ville de Deir al-Balah dimanche, dans le centre, toujours selon le gouvernement du Hamas.

D’après l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le service des urgences de l’hôpital al-Chifa, le plus grand de Gaza-ville, est devenu « un bain de sang », avec des centaines de patients blessés et de nouveaux arrivants « chaque minute ».

L’OMS s’est également dite « consternée par la destruction » de l’hôpital Kamal Adwan dans le nord de la bande de Gaza, faisant état de la mort de huit patients. Israël a assuré que le Hamas y était implanté.

PHOTO MOHAMMED DAHMAN, ASSOCIATED PRESS

Un jeune Palestinien blessé lors de frappes aériennes israéliennes sur une école gérée par l’ONU est soigné à l’hôpital Nasser de Khan Younès, au sud de la bande de Gaza, le 17 décembre.

Les bombardements ont laissé une grande partie du territoire en ruines et l’ONU estime que 1,9 million des 2,4 millions de Gazaouis ont été déplacés par la guerre.  

« Je ne serais pas surpris si des gens commençaient à mourir de faim, ou d’une combinaison de faim, maladie et faible immunité », a dénoncé Philippe Lazzarini, dirigeant de l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA).

Pour alléger les pénuries en alimentation, eau, médicaments, carburants, Israël a commencé à laisser entrer de l’aide humanitaire depuis le terminal de Kerem Shalom, à la frontière avec l’Égypte, à la suite d’un accord avec les États-Unis.  

Objectif : soulager le terminal de Rafah, qui était le seul par lequel l’aide humanitaire entrait au compte-gouttes.  

Une source du Croissant rouge égyptien, équivalent de la Croix-Rouge, a affirmé à l’AFP que 79 camions étaient ainsi passés dimanche par ce terminal.

Par ailleurs, les télécommunications, coupées jeudi, ont été rétablies dimanche soir.

« Pression militaire »

PHOTO MAHMUD HAMS, AGENCE FRANCE-PRESSE

De la fumer s’élève dans le ciel au-dessus de Khan Younès, au sud de la bande de Gaza, le 17 décembre.

Hors de Gaza, l’Autorité palestinienne a déploré la mort dimanche de cinq nouveaux Palestiniens en Cisjordanie occupée, où les violences ont flambé depuis le début de la guerre.

Israël échange par ailleurs régulièrement des tirs à travers sa frontière nord avec le Liban, principalement avec le puissant mouvement libanais Hezbollah, allié du Hamas et soutenu par l’Iran.

Catherine Colonna doit se rendre lundi au Liban pour appeler toutes les parties à la « désescalade » sur ce front, avec en toile de fond la crainte d’un embrasement régional.

En Israël, les pressions sur le gouvernement sont montées en puissance depuis l’annonce vendredi de la mort de trois otages tués par des soldats qui les ont pris par erreur pour des combattants palestiniens.

Dimanche, lors des funérailles d’Alon Shamriz, un des trois otages israéliens tués « par erreur » par l’armée israélienne, ses proches s’en sont pris à l’armée, l’accusant d’avoir « abandonné » et « assassiné » le jeune homme de 26 ans.  

Cette dernière a publié dimanche soir des photos qu’elle dit avoir prises sur les lieux du drame. On y voit des messages en hébreu tracés sur des pièces de tissu blanc où on peut lire : « S. O. S », « À l’aide » ou « 3 otages ».

L’armée israélienne a déclaré que les soldats avaient violé les règles d’engagement.

M. Nétanyahou a déclaré que la mort des trois otages « brisait le cœur de toute la nation », mais que la pression militaire était nécessaire pour libérer les autres captifs.

Une otage déjà libérée, l’Israélo-Allemande Raz Ben-Ami, 57 ans, a parlé de « l’humiliation quotidienne, mentale et physique » qu’elle a subie, notamment un seul repas par jour et l’absence de toilettes correctes.

Tous trois faisaient partie des quelque 250 personnes capturées lors de l’attaque du 7 octobre, dont 129 sont encore aux mains du Hamas et d’autres groupes armés.

Après une première trêve d’une semaine fin novembre, M. Nétanyahou a jugé que la « pression militaire » restait nécessaire pour ramener les otages et « anéantir » le Hamas.

PHOTO MENAHEM KAHANA, REUTERS

Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a participé à une réunion avec son cabinet, le 17 décembre à Tel-Aviv.

Le Qatar, un médiateur clé qui a œuvré à la libération d’otages en échange de prisonniers palestiniens fin novembre, a confirmé samedi des « efforts diplomatiques en cours ».

Le Hamas s’est cependant déclaré « contre toute négociation sur l’échange de prisonniers jusqu’à ce que l’agression contre notre peuple cesse complètement ».