Le flou persiste quant à l’identité des responsables d’une frappe ayant touché un hôpital de Gaza mardi. Israël, soutenu par le président américain Joe Biden, a rejeté la faute, documents à l’appui, sur un groupe de résistance méconnu, le Djihad islamique palestinien. Le Hamas continue de son côté à rejeter la resonsabilité sur l’État hébreu. Que sait-on exactement de ce drame ?

Que s’est-il passé exactement ?

En fin de journée, mardi, une explosion s’est produite dans le stationnement de l’hôpital Ahli Arab, également connu sous le nom d’hôpital al-Ma’amadani, à Gaza. Dans une vidéo authentifiée par l’Agence France-Presse, on voit des flammes s’élever de ce qui semble être la cour d’un bâtiment, plongée dans le noir. Dans l’enceinte, des véhicules carbonisés, des débris jonchant le sol et une ambulance détruite portant le nom de l’hôpital ont été aperçus mercredi.

Selon le ministère de la Santé de Gaza, qui relève du Hamas, l’attaque aurait fait 471 morts. Sous le couvert de l’anonymat, un haut responsable européen du renseignement a toutefois affirmé à l’AFP que le bilan serait beaucoup moins élevé.

Quels sont ces documents présentés par Israël qui prouvent que l’attaque provient du Djihad islamique ?

Il s’agit notamment de photos aériennes montrant la scène, avant et après l’explosion qui serait due à un tir de roquette raté à partir d’un cimetière jouxtant l’hôpital. Les dommages, concentrés dans le stationnement de l’établissement, ne correspondent pas à ceux d’un tir de missile aérien, puisqu’aucun cratère d’impact ne peut être aperçu, affirme l’armée israélienne.

Celle-ci a aussi dévoilé un enregistrement audio entre deux responsables du Hamas qu’elle prétend avoir capté à leur insu. « Le Hamas a compris qu’il s’agissait d’une roquette du Djihad islamique qui avait mal explosé et a décidé de lancer une campagne médiatique d’envergure pour cacher ce qui s’était réellement passé, allant même jusqu’à gonfler le nombre de victimes », a-t-on affirmé par voie de communiqué.

Qu’est-ce que le Djihad islamique ?

Deuxième force en importance à Gaza après le Hamas, le Djihad islamique palestinien est comme ce dernier un groupe de résistance financé par l’Iran, explique Fabio Merone, fellow associé au Centre interdisciplinaire de recherche sur l’Afrique et le Moyen-Orient de l’Université Laval. « C’était un petit groupe au début qui a commencé à avoir de l’influence lorsqu’il s’est rapproché du Hezbollah et de l’Iran. Mais ce n’est pas ce qu’on appelle traditionnellement des djihadistes », explique-t-il. Tout comme le Hamas, le Djihad islamique palestinien dispose d’une branche armée, les Brigades al-Qods. S’il collabore avec le Hamas et le Hezbollah, il n’a pas pris part à l’attaque initiale du 7 octobre dernier contre Israël, mais tire depuis des roquettes sur Israël.

Que disent les Palestiniens ?

PHOTO ABED KHALED, ASSOCIATED PRESS

Palestiniennes blessées dans la frappe ayant touché un hôpital de Gaza, mardi

Selon la version palestinienne, les roquettes dont disposent le Hamas et le Djihad islamique ne sont pas assez puissantes pour provoquer des dégâts de l’ampleur de ceux qui ont été constatés, rapporte Fabio Merone, qui consulte régulièrement les médias arabes. Cet argument a d’ailleurs été utilisé par le Djihad islamique palestinien, selon qui « l’angle de l’impact et l’intensité du feu prouvent qu’il s’agissait d’une attaque aérienne ». L’organisation a par ailleurs déclaré qu’« Israël a précédemment abdiqué sa responsabilité pour les crimes qu’il a commis » en rappelant la mort de la journaliste palestino-américaine Shireen Abu Akleh, touchée mortellement par les tirs d’un soldat israélien l’an dernier.

Mais ont-ils des preuves ?

PHOTO MAHMUD HAMS, AGENCE FRANCE-PRESSE

L’explosion s’est produite dans le stationnement de l’hôpital Ahli Arab, à Gaza.

Pas à proprement parler. Mais le New York Times a publié mercredi le témoignage du chef de l’Église épiscopale de Jérusalem et du Moyen-Orient, qui gère l’hôpital, Hosam Naoum, selon qui l’établissement a été averti à plusieurs reprises par l’armée israélienne dans les jours précédents d’évacuer les lieux. Ces avertissements faisaient suite à une autre frappe de moindre ampleur ayant touché l’hôpital samedi dernier. Une vidéo des dommages de cette frappe authentifiée par le quotidien montre les débris d’une pièce d’artillerie normalement utilisée par l’armée israélienne, bien que celle-ci nie en être responsable.

Qu’a dit le président américain de l’attaque ?

PHOTO EVELYN HOCKSTEIN, REUTERS

Joe Biden, président des États-Unis, de passage à Tel-Aviv, mercredi

Arrivé en Israël mercredi, Joe Biden a attribué les dommages à « une roquette hors de contrôle tirée par un groupe terroriste à Gaza » tout en assurant avoir obtenu des éléments probants en ce sens venant du Pentagone. Mais « beaucoup de gens ne sont pas sûrs » de ce qui s’est réellement passé, a-t-il ajouté, lors d’un discours précédant sa rencontre avec le président israélien, Benyamin Nétayahou, mercredi, en référence aux manifestations qui se sont tenues dans plusieurs pays. « Donc, nous avons beaucoup de choses à surmonter et cela implique de garantir la vie aux Palestiniens innocents », a-t-il ajouté.