(Tel-Aviv) Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a promis jeudi que le Hamas serait « écrasé » comme le groupe djihadiste État islamique, après avoir reçu le soutien appuyé des États-Unis dans la guerre contre le mouvement islamiste palestinien qui a déjà fait des milliers de morts.

Ce qu’il faut savoir

  • Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, a promis lors d’une visite à Tel-Aviv que les États-Unis soutiendraient toujours Israël ;
  • Israël prépare une offensive terrestre dans la bande de Gaza contre le Hamas ;
  • L’Égypte a reçu une première cargaison d’aide humanitaire pour Gaza en provenance de Jordanie ;
  • Environ 1200 Israéliens et 1354 Palestiniens sont morts à ce jour ;
  • L’objectif est la « liquidation » du gouvernement du Hamas, selon un porte-parole de l’armée israélienne ;
  • Durant la nuit, Israël a de nouveau pilonné la bande de Gaza ;
  • Le Hamas a enlevé plusieurs dizaines d’otages qu’il menace d’exécuter ;
  • La bande de Gaza est désormais privée d’approvisionnements en eau, en électricité et en nourriture, coupés par Israël ;
  • À Gaza, plus de 338 000 personnes ont été déplacées par les frappes israéliennes ;
  • Le président iranien a appelé les pays musulmans et arabes à se coordonner pour stopper les « crimes » d’Israël contre Gaza.

« Nous serons toujours à vos côtés », a assuré le secrétaire d’État américain Antony Blinken, après un entretien avec le premier ministre, au sixième jour d’un conflit déclenché par une attaque massive du Hamas en Israël.

« Tout comme l’EI a été écrasé, le Hamas sera écrasé », a affirmé M. Nétanyahou, laissant présager une offensive terrestre à Gaza contre le Hamas, qui a lancé le 7 octobre cette attaque sans précédent et détient depuis 150 otages.

Environ 1200 Israéliens, en majorité des civils, ont été tués dans l’offensive du Hamas, et 1417 Palestiniens selon les autorités locales, dont de nombreux civils, sont morts dans la bande de Gaza, noyée depuis sous les frappes israéliennes lancées en riposte, qui ont transformé en ruines des immeubles entiers.

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L’armée israélienne a annoncé avoir bombardé depuis samedi avec 4000 tonnes d’explosifs l’enclave contrôlée par le Hamas, organisation classée « terroriste » par les États-Unis et l’Union européenne.

Blinken au Qatar

Dans la nuit de mercredi à jeudi, des correspondants de l’AFP ont vu des dizaines de frappes aériennes en direction du camp d’Al-Shati, le plus grand de la bande de Gaza, et dans le nord de l’enclave.

Le 7 octobre à l’aube, en plein shabbat, le repos juif hebdomadaire, et au dernier jour des fêtes de Souccot, des centaines de combattants du Hamas s’étaient infiltrés en Israël depuis la bande de Gaza à bord de véhicules, par les airs et la mer, semant la terreur sous un déluge de roquettes.

Dans les rues, dans les maisons, faisant même irruption dans un festival de musique, ils ont tué plus d’un millier de civils dans cette attaque d’une violence extrême et d’une ampleur inédite depuis la création d’Israël en 1948.

Après l’attaque, l’armée a affirmé avoir récupéré les corps de 1500 combattants palestiniens infiltrés.

Israël a riposté en déclarant une guerre pour détruire le Hamas, déployant des dizaines de milliers de soldats autour de la bande de Gaza, dans le sud du pays et à sa frontière nord avec le Liban.

M. Blinken doit rencontrer jeudi soir en Jordanie le roi Abdallah II et vendredi le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas qui a rejeté le « meurtre de civils des deux côtés » et exigé « la fin immédiate de l’agression » contre le peuple palestinien. Vendredi également, M. Blinken est attendu au Qatar pour des discussions sur le Hamas, avant d’aller en Arabie saoudite, en Égypte et aux Émirats arabes unis.  

Solidarité

Les présidentes de la Commission européenne Ursula von der Leyen et du Parlement européen Roberta Metsola sont à leur tour attendues vendredi en Israël pour « exprimer leur solidarité avec les victimes des attaques terroristes du Hamas et rencontrer les dirigeants israéliens », selon un communiqué conjoint des deux institutions.

Les cheffes de la diplomatie allemande et française, Annalena Baerbock et Catherine Colonna, doivent aussi se rendre en Israël, respectivement vendredi et dimanche.

L’offensive du Hamas a déclenché une vague condamnation à l’étranger ainsi qu’un immense élan de solidarité en Israël.

« Tout le monde est touché en Israël », confie Joanna Ouisman, une femme de 38 ans, cadre dans la finance, en déposant deux sacs remplis de livres pour enfants dans un centre commercial de Tel-Aviv. « Personne », dit-elle, « ne peut assister à cette barbarie et demeurer indifférent ».

À l’entrée du kibboutz (village agricole collectiviste) Beeri, à moins de cinq kilomètres de Gaza, une pile de cadavres témoigne de l’ampleur de l’attaque où plus d’une centaine d’habitants ont été tués, selon l’armée.

« En 75 ans, je n’ai jamais vu […] un tel carnage […] contre notre peuple à cette échelle », a indiqué mercredi un porte-parole de l’armée, Doron Spielman.

M. Nétanyahou a montré jeudi à M. Blinken les « photos abominables des bébés tués et brûlés par les monstres du Hamas », selon son bureau.

Dans un communiqué, le Hamas a nié avoir commis des atrocités, accusant Israël de « désinformation ».

Le mouvement islamiste a par ailleurs enlevé plusieurs dizaines d’Israéliens, étrangers et binationaux, de tous âges, qu’il menace d’exécuter. Israël recense 150 otages, alors que des centaines de personnes sont encore portées disparues et des corps en cours d’identification.

S’exprimant dans la ville israélienne de Gannot Hadar, Leeor Katz-Natanzon, un dentiste de 37 ans, explique avoir plusieurs membres de sa famille kidnappés dans le kibboutz de Nir Oz.

« Que vont-ils leur faire ? Où sont-ils ? Comment ils les traitent ? », dit-il en parlant notamment de deux enfants âgés de deux et quatre ans.

Parmi les otages figurent des jeunes capturés pendant un festival de musique où des combattants palestiniens ont fait irruption samedi, tuant 270 personnes d’après les autorités.

Le ministre israélien de l’Énergie, Israël Katz, a affirmé jeudi que son pays n’autoriserait pas l’entrée de produits de première nécessité ou d’aide humanitaire à Gaza tant que le Hamas n’aura pas libéré les otages.

« Échec impardonnable »

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a indiqué être en contact avec le Hamas pour œuvrer à leur libération.

Sur le plan politique, alors qu’un gouvernement d’urgence et un cabinet de guerre ont été entérinés jeudi soir par le Parlement, le chef de l’opposition israélienne Yaïr Lapid a accusé le cabinet de M. Nétanyahou d’un « échec impardonnable » pour ne pas être parvenu à empêcher l’attaque.

Alors qu’Israël a décrété un « siège complet » de la bande de Gaza, déjà sous blocus terrestre, aérien et maritime depuis 2007, M. Blinken a dit jeudi avoir parlé à Israël des « besoins humanitaires » dans ce territoire.

Dans la bande de Gaza, les 2,4 millions de Palestiniens sont désormais privés d’approvisionnements en eau, en électricité et en nourriture, coupés par Israël.

Le porte-parole du secrétaire général de l’ONU Stéphane Dujarric a fait état d’une situation humanitaire « désastreuse qui devient chaque jour plus grave », soulignant la nécessité de livrer le plus vite possible de l’aide pour les Gazaouis.

Alors que les appels se multiplient pour que l’Égypte voisine autorise un passage sécurisé pour les civils en provenance de la bande de Gaza, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a affirmé que les habitants de Gaza devaient se montrer « inébranlables » et « rester sur leur terre ».

« Pourquoi ? »

À Gaza, où plus de 423 000 personnes ont été déplacées par les frappes selon l’ONU, le fracas des explosions, des drones et autres déflagrations est incessant, de jour comme de nuit.

PHOTO SAID KHATIB, AGENCE FRANCE-PRESSE

Gaza, 12 octobre 2023

« Pourquoi ? On n’a rien fait ! », hurle un homme en regardant des brancardiers emmener le corps sans vie d’un proche, tout juste sorti des décombres dans un quartier bombardé.

Les concentrations de troupes à la frontière font craindre une offensive terrestre sur le territoire, gouverné par le Hamas depuis 2007. Une perspective terrifiante de combats au cœur d’une ville à l’extrême densité de population, dans des souterrains et en présence d’otages.

Le président iranien Ebrahim Raïssi a appelé les « pays musulmans et arabes » à « se coordonner » pour « stopper les crimes » d’Israël contre Gaza. L’Iran soutient financièrement et militairement le Hamas, mais affirme ne pas être impliqué dans l’attaque de samedi.

« Nos ennemis doivent savoir que nous sommes prêts sur tous les fronts », a déclaré pour sa part le porte-parole en chef de l’armée israélienne, Daniel Hagari.

Signe des tensions autour d’Israël, les échanges de tirs sont fréquents depuis samedi de part et d’autre de la frontière libanaise avec le Hezbollah pro-iranien, allié du Hamas et de la Syrie.

Ce que l’on sait

Israël, qui a accueilli jeudi le secrétaire d’État américain, poursuit son pilonnage de la bande de Gaza, avec pour objectif « la liquidation » de la direction du Hamas, au sixième jour de la guerre déclenchée par l’offensive sanglante du mouvement islamiste palestinien.

Le conflit a déjà fait des milliers de morts.

Voici ce que l’on sait du conflit :

Déroulement de l’attaque

Le Hamas, au pouvoir depuis 2007 dans la bande de Gaza et qui souhaite la destruction de l’État d’Israël, a lancé son attaque samedi à l’aube, en plein Shabbat, le repos hebdomadaire juif, 50 ans et un jour après le début de la guerre israélo-arabe de 1973.

Les Brigades Al-Qassam, la branche militaire du Hamas, ont déclenché l’opération « déluge d’Al-Aqsa » pour « mettre fin aux crimes de l’occupation », en référence à l’occupation depuis 1967 par Israël de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est, où se trouve l’esplanade des Mosquées, troisième lieu saint de l’islam qui abrite la mosquée Al-Aqsa.

Le mouvement islamiste palestinien a tiré des milliers de roquettes sur Israël, se frayant un passage à coup d’explosifs et bulldozers à travers la barrière séparant Gaza du territoire israélien, pour attaquer positions militaires et civils.

Les combattants du Hamas, passés aussi par la mer et les airs, se sont emparés d’équipements militaires, s’infiltrant dans des zones urbaines d’Israël et des kibboutz (villages agricoles collectivistes) dans le sud, jusqu’à une vingtaine de kilomètres de la bande de Gaza, une enclave pauvre peuplée de 2,4 millions d’habitants et soumise à un blocus israélien depuis plus de 15 ans.

Réponse d’Israël

Engagé dans l’opération « Sabre de fer », Israël riposte depuis samedi en multipliant les bombardements sur la bande de Gaza.

Le pays a mobilisé 300 000 réservistes et déployé des dizaines de milliers de soldats autour de l’enclave. Il dit avoir frappé Gaza avec 4000 tonnes d’explosifs depuis le début de la guerre.

L’objectif est la « liquidation » des hauts dirigeants militaires et gouvernementaux du Hamas, selon l’armée, qui dit se préparer à une possible offensive terrestre, sur laquelle toutefois rien « n’a encore été décidé ».

Le Parlement israélien a entériné jeudi la formation d’un gouvernement d’urgence et d’un cabinet de guerre.

À la tête de ce gouvernement d’urgence, composé de Benny Gantz, un leader de l’opposition, le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a promis que le Hamas serait « écrasé ».

Il avait imputé au Hamas, mouvement qualifié d’organisation terroriste par les États-Unis et l’Union européenne, une « sauvagerie jamais vue depuis la Shoah ».

Le chef de l’opposition israélienne, Yaïr Lapid, a pour sa part accusé le gouvernement d’un « échec impardonnable » pour ne pas être parvenu à empêcher l’attaque du Hamas.

Morts, disparus et rapatriements

En Israël, plus de 1200 personnes ont été tuées, parmi lesquelles environ 900 civils, dont plus d’une centaine dans un seul kibboutz et au moins 270 lors d’une rave-party, et 245 soldats ont été identifiés, selon les autorités.

Côté palestinien, le bilan des bombardements s’est alourdi jeudi à 1,417 morts, d’après les autorités de Gaza. Le Hamas a indiqué que deux de ses responsables avaient été tués par des frappes.

L’armée israélienne a affirmé avoir récupéré les corps de 1500 combattants du Hamas autour de Gaza.

L’ONU a aussi annoncé que onze de ses employés avaient été tués dans la bande de Gaza depuis samedi.

De nombreux ressortissants étrangers ont également péri dans les affrontements et beaucoup d’autres sont portés disparus.

Selon l’armée israélienne, environ 150 personnes, Israéliens, étrangers et binationaux, ont été enlevées par des combattants du Hamas.

Des membres des familles d’otages français ont appelé le président français, Emmanuel Macron, à « intervenir » en vue de leur libération.

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a indiqué être en contact avec le Hamas pour œuvrer à la remise en liberté des otages.

Certains pays ont entamé des opérations de rapatriement de milliers d’étrangers bloqués en Israël et dans les territoires palestiniens.

Ce que dit le Hamas

Le Hamas a appelé « les combattants de la résistance en Cisjordanie » occupée ainsi que « les nations arabe et musulmane » à rejoindre son combat.

Le mouvement islamiste a annoncé jeudi matin avoir riposté par des tirs de roquettes sur Tel-Aviv, après des frappes israéliennes ayant selon lui ciblé « des civils » dans deux camps de réfugiés de Gaza.

Le Hamas avait menacé lundi d’exécuter des otages israéliens « chaque fois que notre peuple sera pris pour cible sans avertissement » par des frappes israéliennes.

Le Hamas et le Djihad islamique avaient fait état mercredi de « tirs de roquettes nourris » visant le centre et le sud d’Israël, où un hôpital, à Ashkelon, a été touché.

Frappes sur le Liban et la Syrie

À sa frontière nord, l’armée israélienne a bombardé mercredi des villages frontaliers dans le sud du Liban, en riposte à de nouveaux tirs de roquettes du Hezbollah pour venger la mort lundi dans un bombardement israélien de trois de ses militants.

Les États-Unis ont averti le Hezbollah de ne pas ouvrir un deuxième front.

En outre, des frappes israéliennes ont mis hors service jeudi les aéroports de Damas et Alep en Syrie, selon la télévision d’État syrienne.

Mardi, l’armée israélienne avait annoncé avoir tiré des obus sur la Syrie à partir du plateau du Golan en riposte à des « tirs » de projectiles sur ce territoire occupé par Israël depuis 1967.

Réactions

Le président palestinien, Mahmoud Abbas, qui a rejeté le « meurtre de civils des deux côtés », a exigé jeudi « la fin immédiate de l’agression » contre le peuple palestinien, dans une première déclaration publique depuis samedi.

Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, a promis jeudi à Tel-Aviv que les États-Unis soutiendraient « toujours » Israël, Washington ayant déjà envoyé de l’aide militaire.

Il doit rencontrer jeudi soir le roi Abdallah II de Jordanie à Amman et vendredi, Mahmoud Abbas. Il se rendra également au Qatar vendredi pour des discussions avec les dirigeants qataris au sujet du Hamas et a aussi prévu de se rendre en Arabie saoudite, en Égypte et aux Émirats arabes unis.

La Maison-Blanche a indiqué travailler avec Israël et l’Égypte pour permettre la sortie de civils de Gaza.

Le gouvernement britannique a, lui, annoncé le déploiement dans l’est de la Méditerranée de capacités militaires maritimes et aériennes de surveillance.

Le Brésil, à la tête du Conseil de sécurité de l’ONU, a convoqué pour vendredi une nouvelle réunion de cet organisme.

L’Iran s’est placé en première ligne du soutien à l’attaque du Hamas, tout en rejetant les accusations sur son implication. Le ministre iranien des Affaires étrangères a indiqué que l’ouverture d’un « nouveau front » contre Israël au Moyen-Orient serait conditionnée aux « actions » de l’État israélien dans la bande de Gaza.

Situation dans la bande de Gaza

À Gaza, plus de 338 000 Palestiniens ont dû fuir leur domicile à cause des frappes, selon l’ONU.

Israël a exclu d’autoriser l’entrée de produits de première nécessité ou d’aide humanitaire à Gaza tant que le Hamas n’aura pas libéré les otages enlevés samedi.

Des ONG ont alerté sur la situation sanitaire dans l’enclave, réclamant un couloir humanitaire pour appuyer la réponse médicale, l’ONU rappelant que le siège total de la bande de Gaza par Israël est « interdit » par le droit international humanitaire.

Le porte-parole du secrétaire général de l’ONU Stéphane Dujarric a fait état d’une situation humanitaire « désastreuse qui devient chaque jour plus grave », soulignant la nécessité de livrer le plus vite possible de l’aide pour les Gazaouis.

Antony Blinken a déclaré jeudi avoir évoqué avec Israël les « besoins humanitaires » du territoire, toujours bombardée par l’armée israélienne, tout en défendant le droit de riposter à l’attaque meurtrière du Hamas.

Et des frappes aériennes israéliennes ont mis jeudi hors service les deux principaux aéroports de Syrie, celui de Damas et celui d’Alep (nord).