(Addis Abeba) Le gouvernement éthiopien a annoncé mardi qu’il allait mener une enquête conjointe avec l’Arabie saoudite, après la publication d’un rapport de Human Rights Watch accusant des gardes-frontières saoudiens d’avoir tué des « centaines » de migrants éthiopiens entre mars 2022 et juin 2023.

L’Union européenne, par la voix d’un porte-parole du chef de la diplomatie Josep Borrell, a salué cette annonce. La France a, elle, appelé les Saoudiens « à conduire une enquête transparente sur ces allégations ».

Riyad conteste les accusations. Une source gouvernementale a déclaré lundi à l’AFP que ces accusations « sont infondées et ne reposent pas sur des sources fiables ».

Se basant sur près d’une quarantaine de témoignages, Human Rights Watch (HRW) affirme que des gardes-frontières saoudiens ont tué des « centaines » de migrants éthiopiens qui tentaient de pénétrer dans la riche monarchie du Golfe via la frontière avec le Yémen, entre mars 2022 et juin 2023.

Au lendemain de la publication du rapport, le ministère éthiopien des Affaires étrangères a affirmé que le gouvernement d’Addis Abeba allait enquêter « rapidement sur l’incident en collaboration avec les autorités saoudiennes », dans un communiqué publié sur le réseau social X (ex-Twitter).

« Il est fortement recommandé de faire preuve de la plus grande retenue et de ne pas faire de déclarations inutiles jusqu’à ce que l’enquête soit terminée », ajoute le ministère, assurant que « les deux pays, malgré cette malheureuse tragédie, entretiennent d’excellentes relations de longue date ».

Lundi, les États-Unis, partenaires historiques de la monarchie du Golfe, ont appelé à une enquête.

Un porte-parole de l’ONU a qualifié de « très inquiétant » ce rapport qui porte des accusations « très graves », même s’il est difficile de « confirmer » ces allégations.

« Inquiétude »

Un porte-parole du chef de la diplomatie de l’UE Josep Borrell a salué mardi « l’annonce par le gouvernement éthiopien d’une enquête conjointement avec les autorités d’Arabie saoudite » après ces accusations qui suscitent l’« inquiétude ».

« Nous soulèverons cette question avec les autorités d’Arabie saoudite et aussi avec les autorités houthies de facto au Yémen », a ajouté ce porte-parole, Peter Stano, lors d’un point presse à Bruxelles.

Selon HRW, des migrants ont accusé les forces houthies de collaborer avec les passeurs et de leur extorquer de l’argent. Ces rebelles les auraient aussi transférés dans ce que les migrants décrivent comme des centres de détention.

Les houthis ont nié travailler avec les passeurs, les décrivant comme des « criminels ».

Le ministère français des Affaires étrangères a également affirmé qu’elle aborderait « ces questions avec les autorités saoudiennes, y compris au plus haut niveau », dans une déclaration à l’AFP.

Dans son rapport de 73 pages, HRW s’appuie sur des entretiens avec 38 migrants éthiopiens ayant tenté de pénétrer en Arabie saoudite depuis le Yémen, des images satellites, des vidéos et photos publiées sur les réseaux sociaux « ou recueillies auprès d’autres sources ».

Les personnes interrogées ont évoqué des « armes explosives » et des tirs à bout portant, les gardes-frontières saoudiens demandant aux Éthiopiens « sur quelle partie de leur corps ils préféreraient que l’on tire ».

Des centaines de milliers d’Éthiopiens travaillent en Arabie saoudite, empruntant parfois la « route de l’Est » reliant la Corne de l’Afrique au Golfe, en passant par le Yémen, pays pauvre et en guerre depuis plus de huit ans.