(Cergy-Pontoise) La justice française a interdit une marche prévue samedi en région parisienne en mémoire d’un homme décédé lors d’une arrestation en 2016, invoquant les émeutes ayant suivi la mort du jeune Nahel, et alors que d’autres rassemblements citoyens sont annoncés en France.

Saisi en urgence, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, près de Paris, a invoqué « le contexte des émeutes qui ont suivi le décès de Nahel » le 27 juin à Nanterre, pour fonder sa décision, rendue vendredi soir.  

La mort de Nahel, 17 ans, tué à bout portant lors d’un contrôle routier à Nanterre, à l’ouest de Paris, a embrasé le pays, provoquant plusieurs nuits consécutives de violences, d’incendies de voitures ou de poubelles, de saccages de bâtiments publics et de pillages dans de nombreuses villes de France.

« Bien que les violences aient diminué ces derniers jours, leur caractère extrêmement récent ne permet de présumer que tout risque de trouble à l’ordre public ait disparu », a indiqué le tribunal dans un communiqué.

Dans un message vidéo diffusé sur Twitter, Assa Traoré, sœur aînée d’Adama et militante, a confirmé qu’« il n’y aura pas de marche demain (samedi) à Beaumont-sur-Oise », là où elle était prévue.

« Le gouvernement a décidé de mettre de l’huile sur le feu » et « de ne pas respecter la mort de mon petit frère », a-t-elle affirmé.

Cette figure du combat contre les violences policières a ajouté qu’elle serait présente « samedi à 15 h place de la République » à Paris pour crier « au monde entier que nos morts ont le droit d’exister, même dans la mort ».

À cet endroit est prévue samedi après-midi une « marche pour la justice », parmi une trentaine d’autres manifestations contre les violences policières répertoriées en France sur une carte en ligne.

Le préfet de Val-d’Oise avait annoncé jeudi soir l’interdiction de cette manifestation annuelle, en mémoire d’Adama Traoré, décédé lors d’une arrestation en 2016 et érigé en emblème des violences policières.  

Dans la foulée, le comité Adama, emmené par Assa Traoré, a déposé un référé-liberté, une procédure d’urgence pour faire annuler la décision.

Il s’agit d’« une marche familiale, avec des enfants dans un cadre champêtre », avait déclaré à l’audience Me Arié Alimi, l’un des trois avocats du comité Adama, estimant que l’arrêté était « une instrumentalisation politique du droit fondamental de manifester ».

Venu en personne défendre sa mesure devant la justice, le préfet du Val-d’Oise a affirmé ne pas disposer de suffisamment d’effectifs pour assurer la sécurité de l’évènement. « Les forces de l’ordre sont épuisées », a-t-il dit à la barre.

Le 19 juillet 2016, Adama Traoré, jeune homme noir de 24 ans est mort dans la cour de la caserne de Persan, à une trentaine de kilomètres au nord de Paris, peu après son arrestation par des gendarmes au terme d’une course-poursuite.

Le collectif « Vérité pour Adama » rassemble chaque année des centaines de personnes à l’occasion d’une marche pour réclamer la mise en examen des gendarmes en cause et dénoncer plus largement les violences policières.