(Paris) Plusieurs centaines de milliers de personnes ont défilé lundi dans toute la France lors d’un 1er-Mai marqué par une intersyndicale toujours unie contre la réforme des retraites, et des violences faisant une centaine de blessés parmi les forces de l’ordre.

La secrétaire générale du syndicat CGT, Sophie Binet, s’est réjouie d’une « journée très forte qui montre la détermination à obtenir le retrait de la réforme des retraites », et son homologue de la CFDT, Laurent Berger, a vanté « un gros 1er-Mai », une « grosse mobilisation » qui « n’est pas un baroud d’honneur ».

Si elle était loin des niveaux record de la fin janvier, lorsque près de 1,3 million de personnes avaient défilé selon le ministère de l’Intérieur, la mobilisation lors de cette fête du Travail est restée forte après 12 journées de défilés et bien au-delà d’un 1er-Mai classique.

La CGT a assuré que quelque 550 000 personnes participaient à la manifestation parisienne et 2,3 millions dans toute la France. Le ministère de l’Intérieur a lui dénombré 782 000 manifestants dans toute la France, dont 112 000 à Paris. Ils étaient 94 000 dans la capitale selon un comptage du cabinet indépendant Occurrence pour un collectif de médias, dont l’AFP.

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Manifestation à Paris

À Paris, où 5000 policiers étaient mobilisés, le cortège s’est élancé à 14 h (8 h heure de l’Est), avec la présence annoncée de syndicalistes du monde entier.  

Selon la police, on comptait 8700 manifestants à Strasbourg (est, 15 000 selon les syndicats), 7300 à Lille (nord, 15 000), 11 000 à Marseille (sud, 130 000), 13 500 à Toulouse (sud-ouest, 100 000) et 14 000 à Clermont-Ferrand (centre, 25 000).

291 interpellations

Des affrontements violents ont éclaté dans plusieurs villes, notamment Paris, Nantes et Lyon.

Au total, 108 membres de forces de l’ordre ont été blessés, dont un « grièvement » à Paris, brûlé au visage et aux bras à la suite d’un jet de cocktail Molotov, selon M. Darmanin, qui a précisé que 291 personnes avaient été interpellées dans le pays, dont 90 dans la capitale.

Peu avant, la première ministre Élisabeth Borne avait jugé sur Twitter « inacceptables » les « scènes de violences en marge des cortèges ».

À Paris, les violences se sont intensifiées à l’arrivée du pré-cortège au point final du défilé. Des centaines de « black blocs », dont nombre d’étrangers, ont notamment fait usage de feux d’artifice en tir tendu sur les forces de l’ordre, qui ont répliqué à grand renfort de lacrymogènes et de grenades défensives.

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Un policier a été blessé lors de la manifestation à Paris.

À Nantes (ouest), les affrontements ont duré une bonne partie de l’après-midi, et ont fait 28 blessés (4 manifestants et 24 membres des forces de l’ordre). Les autorités ont également fait état de 40 interpellations à Lyon, théâtre d’importantes dégradations sur le parcours de la manifestation. Des incidents ont également émaillé le cortège à Bordeaux (sud-ouest).

À Marseille, quelque 200 personnes ont brièvement occupé l’hôtel Intercontinental, y causant des dégradations, une « action symbolique contre la répartition inégale des richesses ».

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Une voiture a été incendiée à Nantes.

Ce 1er-Mai, qui fait figure de 13e journée de mobilisation intersyndicale contre la réforme des retraites et était le premier défilé unitaire avec les huit principaux syndicats depuis 2009 (face à la crise financière), intervenait après la validation de l’essentiel du texte par le Conseil constitutionnel et sa promulgation dans la foulée.  

Si dans la rue comme dans les sondages la colère reste vive, avec des concerts de casseroles qui accompagnent les déplacements de l’exécutif, au sein du gouvernement français certains veulent croire « qu’on a passé le plus gros en terme de contestation » et que ce 1er-Mai « peut être le baroud d’honneur de l’interprofessionnel ».

Défilés à Athènes, Berlin, Madrid

Le président Emmanuel Macron s’est donné le 17 avril « cent jours d’apaisement » et « d’action » pour relancer son quinquennat. Et des divergences entre les syndicats commencent à pointer sur la suite à donner au mouvement.

À Athènes, une délégation d’une dizaine de personnes de la CGT française, invitée par le syndicat communiste grec Pame, a participé au cortège.

Ailleurs en Europe, des manifestations reprenant les mêmes slogans exigeant un meilleur partage des richesses et des augmentations de salaires pour faire face à l’inflation ont été organisées à l’occasion du 1er-Mai.  

À Berlin, une trentaine de défilés étaient prévus et à Lisbonne les deux principales centrales syndicales ont défilé en commun. En Espagne, plus de 70 cortèges se sont élancés dans les principales villes du pays.