(Vienne) Le choix de la continuité : les Autrichiens devraient reconduire dimanche le président écologiste Alexander Van der Bellen, qui a pour seuls opposants une extrême droite affaiblie et des candidats de la société civile.

Soutenu par un large spectre de la classe politique, il est crédité de plus de 50 % des voix dans les sondages et semble bien parti pour s’imposer dès le premier tour de scrutin face à six adversaires — tous des hommes.

« Le plus gros concurrent dimanche sera le canapé », a ironisé le chef d’État de 78 ans vendredi en clôture de campagne devant ses sympathisants. « Si la démocratie libérale vous tient à cœur, alors allez voter », a-t-il ajouté.  

Une extrême droite déchue

Le parti d’extrême droite FPÖ, qui avait failli l’emporter contre lui en 2016, voudrait bien rejouer le match.

Mais son candidat est peu connu : Walter Rosenkranz, 60 ans, recueillerait seulement 15 % des suffrages, à contre-courant des récentes élections en Suède et en Italie.  

Les affaires de corruption ont fait perdre du terrain à la célèbre extrême droite autrichienne. Il y a six ans, elle avait été la première en Europe à frôler la victoire à une élection présidentielle.

Fondé par d’anciens nazis, le FPÖ s’était finalement incliné avec plus de 46 % des voix, épilogue d’un scrutin à rebondissements qui avait tenu en haleine Bruxelles et les partenaires occidentaux de l’Autriche.

Si le parti avait ensuite accédé au gouvernement en formant une coalition avec les conservateurs du jeune Sebastian Kurz, il a dû quitter le pouvoir en 2019 après un rocambolesque scandale et n’a jamais retrouvé depuis sa gloire passée.

« Stabilité »

Devant ces remous et la succession de chanceliers, Alexander Van der Bellen, à la fonction traditionnellement incarnée pour assurer le protocole, a garanti la continuité de l’État.

Il peut ainsi se présenter aujourd’hui comme « le seul à pouvoir éviter le chaos », selon le politologue Thomas Hofer, interrogé par l’AFP.

Ce pro-européen passe aussi pour « intègre » selon Julia Partheymüller, de l’université de Vienne, ce qui est « très apprécié » en comparaison des « multiples crises auxquelles font face nombre de pays européens ».  

Il a mené une campagne sobre, sans débat avec ses rivaux, prônant « clarté » et « compétence » en vue de « traverser les turbulences le plus sereinement possible », en référence à l’inflation, à la guerre en Ukraine et à la crise énergétique.

Message semble-t-il reçu par les électeurs, lassés des soubresauts politiques des dernières années.  

« Je voterai pour lui parce qu’il a très bien résolu, avec calme, les problèmes qui se posaient à lui » lors du premier mandat, explique par exemple à l’AFP Alexandra Höfenstock, 38 ans, une employée de la ville de Vienne, qui aspire à la « stabilité ».

Dans le pays alpin de 9 millions d’habitants, 6,4 millions d’électeurs — dont l’Austro-Américain Arnold Schwarzenegger, soutien de poids du président — sont appelés aux urnes pour un mandat de six ans.

Les bureaux de vote ouvriront à 7 h (5 h GMT) et fermeront à 17 h, heure à laquelle les sondages de sortie des urnes sont attendus.  

Fils de réfugiés

Le profil atypique du président sortant, pourtant, ne lui garantissait en rien pareil destin politique.  

Austère, un peu raide même, agnostique marié deux fois en terre catholique, l’ancien patron des Verts et doyen de la faculté d’économie de Vienne a su faire oublier son fort ancrage à gauche pour rassembler.  

Pince-sans-rire, gros fumeur à l’éternelle barbe de trois jours, il se fait maintenant volontiers photographier en loden — une veste alpine traditionnelle — au pied des glaciers pour convaincre de son patriotisme.  

Car rarissime écologiste à la tête d’une démocratie, il est en plus fils de réfugiés et a hérité d’un exotique patronyme batave : sa famille protestante a émigré des Pays-Bas vers la Russie au XVIIIe siècle.

Son père, un aristocrate, et sa mère estonienne ont rejoint Vienne durant la Seconde Guerre mondiale avant de déménager dans le Tyrol, fuyant l’arrivée de l’armée rouge.