(Kharkiv) Dans une percée éclair, Kyiv reprend le contrôle d’une trentaine de villes dans le nord-est. Pris par surprise, Moscou recule.

Ce qu’il faut savoir

  • Une contre-offensive de Kyiv a permis de libérer une trentaine de localités et plus de 2000 kilomètres de territoire dans le nord-est, affirme le président de l’Ukraine, Volodymyr Zelensky.
  • Pris par surprise, Moscou a annoncé le retrait de ses forces armées autour de Balakleïa et d’Izyum, près de Kharkiv.
  • Au sud, les troupes ukrainiennes progressent aussi sur les lignes de front

Un drapeau ukrainien flottait haut dans le ciel de Koupiansk, samedi.

La ville-clé de la région de Kharkiv, occupée depuis des mois, a été reprise aux forces russes, dans une contre-offensive surprise qui a permis de libérer une trentaine de localités et plus de 2000 kilomètres de territoire, en l’espace de quelques jours.

C’est ce qu’a annoncé, samedi soir, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky. « Il n’y a pas de place en Ukraine pour les occupants, et il n’y en aura jamais », a-t-il lancé dans une vidéo.

PHOTO JUAN BARRETO, AGENCE FRANCE-PRESSE

Drapeau ukrainien placé sur une statue à Balakleïa, dans la région de Kharkiv, samedi

Début septembre, Kyiv annonçait une contre-attaque dans le sud du pays. Or, dans un revirement inattendu, les troupes ukrainiennes ont accompli des percées majeures dans le nord-est.

« Personne ne l’avait vu venir, et encore moins les Russes », croit Dominique Arel, professeur à l’Université d’Ottawa et titulaire de la Chaire en études ukrainiennes.

Pris par surprise, Moscou a annoncé samedi le retrait de ses forces autour de la ville reconquise de Balakleïa et d’Izyum, dont la reprise serait imminente.

Selon le ministère de la Défense russe, les troupes seront redéployées vers la région séparatiste prorusse du Donetsk, où la situation est « difficile », a reconnu son dirigeant prorusse.

PHOTO FORCES ARMÉES UKRAINIENNES, VIA REUTERS

Des militaires prennent la pose devant un drapeau ukrainien dans le village de Vasylenkove, récemment libéré par les forces armées ukrainiennes.

Les troupes russes « ont probablement été prises par surprise », a déclaré samedi l’armée britannique. « Le secteur n’était que faiblement tenu », a-t-elle ajouté.

D’après l’Institute for the Study of War, l’armée ukrainienne, qui mène une « avancée rapide » dans le nord-est, fait face à des « poches de forces russes désorganisées ».

« Ces derniers jours, l’armée russe nous montre ce qu’elle a de mieux : son dos. Après tout, c’est un bon choix pour elle que de fuir », a lancé Volodymyr Zelensky. À l’heure actuelle, la négociation avec Vladimir Poutine est impossible, estime son gouvernement. « Le meilleur terrain de discussion avec Poutine, c’est le champ de bataille », a lâché le chef de la diplomatie ukrainien, Dmytro Kuleba, au Journal du dimanche.

Une victoire « spectaculaire »

Quelles seront les répercussions de cette contre-offensive sur le conflit ? Personne ne peut le prédire, répond Dominique Arel.

Mais cette victoire « spectaculaire » de l’Ukraine marque certainement un tournant dans cette guerre qui fait rage depuis six mois, croit-il.

C’est une chose de faire une contre-offensive, mais là, le front s’est complètement effondré.

Dominique Arel, professeur à l’Université d’Ottawa et titulaire de la Chaire en études ukrainiennes

D’un point de vue stratégique, la progression de Kyiv dans le nord-est lui permettrait de couper le ravitaillement de l’armée russe vers le Donbass, dont la prise constitue la priorité de Moscou.

Cette avancée majeure, en plus de galvaniser le moral des troupes, pourrait aussi donner à l’Ukraine un levier supplémentaire pour réclamer de l’aide militaire, ajoute le professeur.

Samedi, la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, de passage à Kyiv, a réitéré l’engagement de l’Europe à soutenir l’Ukraine.

Car la guerre risque de s’éterniser pendant des mois, ont prévenu, vendredi, le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, et le chef de l’OTAN, Jens Stoltenberg, malgré les progrès récents de l’Ukraine.

Le conflit entre dans une période critique, ont-ils déclaré, exhortant les alliés occidentaux à maintenir leur soutien pendant ce qui pourrait être un hiver difficile.

Progrès au sud

Dans le sud de l’Ukraine aussi, l’armée ukrainienne progresse.

Les soldats auraient avancé sur les lignes de front « dans plusieurs zones, et entre deux à plusieurs dizaines de kilomètres », a déclaré Natalia Houmeniouk, porte-parole du commandement militaire sud, à des médias locaux.

D’après l’Institute for the Study of War, les troupes ukrainiennes « continuent de cibler quotidiennement les passages de pontons et de ferries russes ».

Premier scrutin en Russie depuis la guerre

Par ailleurs, des élections locales et régionales — le premier scrutin depuis le début de l’invasion — ont débuté vendredi, en Russie. Près de 45 millions d’électeurs seront appelés aux urnes dans 82 régions pour élire leurs gouverneurs ou leurs députés régionaux.

En août, la cheffe de la Commission électorale, Ella Pamfilova, avait justifié le maintien de ces scrutins prolongés, adoptés pendant la COVID-19, comme un « format très pratique ».

Mais de nombreux militants russes ont accusé Moscou de se servir de ce mode de fonctionnement pour truquer plus facilement les votes.

Avec l’Agence France-Presse, l’Associated Press et Le Monde