(Paris) Les Français votaient dimanche un peu plus nombreux qu’il y a une semaine pour le second tour des élections législatives dont l’issue déterminera la marge de manœuvre du président Emmanuel Macron pour les cinq prochaines années face à une gauche en ordre de bataille.

L’abstention s’annonçait massive mais avec une participation en légère hausse au second tour, à 18,99 % à midi, (10 h GMT) par rapport au premier tour du 12 juin, quand plus de la moitié des 48 millions d’électeurs avaient boudé les urnes.

Les bureaux de vote fermeront à 16 h GMT à l’exception des grandes villes où le délai court jusqu’à 18 h GMT, heure de publication des premières estimations. Si le scrutin est très serré, la répartition précise des 577 sièges à l’Assemblée nationale pourrait n’être connue que tard dans la nuit.

Les derniers sondages autorisés vendredi suggèrent que la coalition du président centriste libéral, réélu le 24 avril, devrait obtenir une majorité relative, mais pas nécessairement la majorité absolue de 289 députés indispensable pour conduire les réformes annoncées.

Une majorité relative l’obligerait à rechercher en permanence le soutien d’autres groupes politiques pour approuver les projets de loi.

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Emmanuel Macron lors du premier tour des législatives

Au premier tour, la majorité sortante est arrivée au coude-à-coude autour de 26 % des voix avec l’alliance de gauche du tribun Jean-Luc Mélenchon qui a réussi à rassembler socialistes, écologistes, communistes et son propre mouvement de gauche radicale.

Pour la gauche unie-une première depuis des décennies-, l’enjeu est d’imposer une cohabitation au chef de l’État mais l’hypothèse semble peu probable, faute de réserve de voix. Elle est toutefois d’ores et déjà quasi assurée de constituer le principal bloc d’opposition à l’Assemblée, rôle jusque-là endossé par la droite.

Recomposition politique en trois blocs

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Jean-Luc Mélenchon, leader du parti d’opposition d’extrême gauche français La France Insoumise, député et leader de la coalition de gauche Nouvelle Union Populaire Ecologique et Sociale (NUPES), vote au premier tour des élections législatives françaises, dans un bureau de vote à Marseille.

Dans la dernière ligne droite, Emmanuel Macron, qui s’est rendu pour la première fois à Kyiv jeudi, a dramatisé l’enjeu, disant que la guerre en Ukraine touchait le quotidien des Français et insistant sur le « besoin d’une France vraiment européenne qui puisse parler d’une voix claire et nette ».

Il a aussi brandi l’épouvantail des « extrêmes », dont la victoire viendrait selon lui semer le « désordre » en France, les accusant de vouloir sortir de l’Union européenne (UE).

Ce scrutin parachève un long cycle électoral qui aura confirmé une vaste recomposition politique de la France autour de trois blocs au détriment des partis traditionnels de droite et de gauche, entamée avec l’élection de M. Macron en 2017.

Dans un bureau de vote de Lyon (centre) Wagner Théaud, développeur Web de 39 ans accompagné de son fils, a « oublié de voter » au premier tour car il n’a « pas suivi la campagne ».

En banlieue parisienne, Nassim Djilali, un consultant âgé de 32 ans, confie n’avoir pas voté à une élection nationale depuis 2012. « Je ne vote qu’aux municipales, parce que le maire fait des choses concrètes sur la ville », explique-t-il.

Les Français se seront rendus au total aux urnes pas moins de quatre fois en deux ans, dans un contexte de crises successives, de la pandémie de COVID-19 à la guerre en Ukraine à la hausse de l’inflation et des menaces sur l’économie.

L’autre enjeu du scrutin est la progression de l’extrême droite derrière Marine Le Pen, finaliste à la présidentielle face à M. Macron en 2017 et en 2022.

Son parti, le Rassemblement national (RN), espère atteindre la barre des 15 députés pour former un groupe à l’Assemblée nationale, pour la deuxième fois dans l’histoire du parti, après les élections législatives de 1986.

Quant à la droite classique, qui table sur une soixantaine de députés, elle pourrait paradoxalement se retrouver en position d’arbitre dans la future Assemblée.

Parmi les premiers résultats provenant d’outre-mer, où le second tour a débuté samedi, la nouvelle secrétaire d’État chargée de la Mer Justine Benin a été battue en Guadeloupe par le candidat de gauche.

Conformément à une règle non écrite mais déjà appliquée en 2017 par Emmanuel Macron, Mme Benin devra, à peine nommée, quitter le gouvernement.

Cela pourrait aussi être le cas de plusieurs autres ministres, dont Clément Beaune (Europe) Amélie de Montchalin (Transition écologique) ou Stanislas Guerini (Fonction publique), chef du parti présidentiel, engagés dans des duels serrés face à la gauche en région parisienne.