(Paris) « Ils disent tout et n’importe quoi » : Emmanuel Macron est passé à l’offensive jeudi contre le « tandem » d’extrême droite et notamment sa principale rivale Marine Le Pen, en pleine dynamique dans les sondages grâce à une campagne axée sur le pouvoir d’achat.

À dix jours seulement du premier tour de la présidentielle, le président-candidat est retourné sur le terrain pour un très long bain de foule lors d’un déplacement en Charente-Maritime consacré à l’écologie.

Dans le camp Macron, la mobilisation générale est décrétée alors qu’un nouveau duel avec Marine Le Pen se précise, selon les sondages, pour le second tour, comme en 2017 mais peut-être beaucoup plus incertain cette fois.

« Moi, je vois un tandem qui arrive clopin-clopant, qui dit tout et son contraire, qui reste en tout cas convaincu par les mêmes idées, diviser le pays », a lancé le candidat Macron à Fouras, faisant référence sans les nommer à Marine Le Pen et Eric Zemmour.

« Ils disent tout et n’importe quoi, disent déjà qu’ils vont faire des meetings ensemble, qu’ils sont main dans la main », a-t-il poursuivi, dénonçant une banalisation de l’extrême droite et appelant le parti de Mme Le Pen de son ancien nom du « Front National », comme pour mieux le renvoyer à son passé, et montrer qu’il n’avait pas changé.

« Quelle fébrilité ! », a réagi Marine Le Pen dans un tweet. « Il fuit le débat et tient des propos sans queue ni tête faute d’arguments sur mon projet d’unité et d’intérêt national ».

Le candidat de Reconquête a lui répliqué, également sur Twitter, qu’il n’y a « ni tandem, ni extrême droite » mais « un président qui ne fait rien, ne dit rien, ne pense rien, et qui mise toute sa réélection sur une finale avec Marine Le Pen ».

Se « battre »

Entré tardivement dans la course et très mobilisé par la guerre en Ukraine, Emmanuel Macron a promis de se « battre pour continuer de convaincre ».  

Malgré une campagne a minima, il est toujours donné en tête dans les intentions de vote au premier tour, autour de 28 %, mais Marine Le Pen dépasse ces derniers jours la barre des 20 % et l’écart se réduit toujours un peu plus au second tour.

Un sondage en particulier, celui d’Elabe publié mercredi qui donne Emmanuel Macron à 52,5 % et la candidate du RN à 47,5 %, donne des sueurs froides à la Macronie qui concentre désormais ses attaques sur la candidate d’extrême droite, signe du danger qu’elle représente.

« Bien sûr, Marine Le Pen peut gagner », a averti jeudi dans le Parisien l’ancien premier ministre Edouard Philippe, soutien d’Emmanuel Macron.

Contrairement à 2017 où elle avait été sèchement battue au second tour (66/34 %), la candidate RN pourrait trouver une précieuse réserve de voix dans l’électorat de l’ancien polémiste et même de la partie la plus radicale des soutiens de Valérie Pécresse, qui stagne autour de 10 %, voire à gauche dans l’électorat de Jean-Luc Mélenchon.

« On récolte ce qu’on a semé », se réjouit de son côté le directeur de cabinet de Marine Le Pen, Renaud Labaye. « Les planètes s’alignent, on a fait une bonne campagne, très solide ».

Son directeur adjoint de campagne Jean-Philippe Tanguy se targue d’avoir « depuis très tôt identifié l’enjeu du pouvoir d’achat ».

Front républicain

Comme en 2017, Emmanuel Macron se présente comme le candidat « des valeurs de la République » face à l’extrême droite. Mais un nouveau front républicain pour faire barrage à l’extrême droite n’est pas gagné d’avance.

Donné en troisième position dans les sondages autour de 15 %, Jean-Luc Mélenchon a annoncé qu’il consulterait les quelque 310 000 personnes qui l’ont soutenu en ligne en cas de nouveau duel Macron-Le Pen au second tour de la présidentielle, avant de donner une quelconque consigne.

Une position pleine d’« ambiguïtés », selon le candidat écologiste Yannick Jadot pour qui « les écologistes n’ont jamais hésité à construire des fronts républicains contre l’extrême droite ».  

Emmanuel Macron a, par ailleurs, de nouveau évoqué jeudi la polémique née du recours par l’exécutif aux cabinets de conseil, en particulier l’Américain McKinsey, disant qu’elle était « liée beaucoup à des gens qui ont fait des contrevérités ».

Il a jugé « légitime de prendre quelqu’un pour la mission, soit un contractuel, soit un prestataire, les collectivités locales le font beaucoup, les entreprises le font, il est normal que l’État le fasse ».

L’affaire pointe une supposée connivence avec les milieux d’affaires, lui qui a vu son début de quinquennat pollué par l’accusation d’être le « président des riches ».

Dans une interview à 20 Minutes, Marine Le Pen a dénoncé « un vrai scandale ». « Mais c’est la vision d’Emmanuel Macron qui, avec la suppression de l’ENA, la suppression du statut de préfet, est en réalité une vision de déconstruction de l’État ».