Alors que l’armée russe semblait en voie de prendre la ville portuaire de Marioupol, vendredi, le président de l’Ukraine, Volodymyr Zelensky, a appelé Moscou ce samedi à discuter sérieusement afin d’éviter de faire rejaillir les conséquences du conflit sur des générations de Russes.

À Marioupol, port stratégique dans le sud-est de l’Ukraine, les combats se sont déplacés dans le centre de la ville où l’armée russe et ses alliés séparatistes « resserrent leur étau d’encerclement », a annoncé vendredi le ministère de la Défense de Russie.

Une information confirmée par le maire de Marioupol, Vadim Boïtchenko, qui a déclaré à la BBC : « Oui, ils étaient très actifs aujourd’hui. Il y a des tanks et des coups de feu. Tout le monde se cache dans des bunkers. » Selon le maire, au moins 80 % des édifices de la ville ont été détruits ou endommagés.

Il ne reste plus de centre-ville. Il n’y a pas un seul endroit dans la ville où la guerre n’a pas laissé de traces.

Vadim Boïtchenko, maire de Marioupol

Très tôt, ce samedi, le président Zelensky a déclaré qu’il était « temps de discuter de paix et de sécurité », sans quoi « les conséquences pour la Russie se feront ressentir sur plusieurs générations ». « Des négociations portant sur la paix et la sécurité de l’Ukraine sont la seule chance pour la Russie de minimiser les dégâts causés par ses propres erreurs », a affirmé M. Zelensky dans une vidéo publiée sur Facebook, filmée de nuit dans une rue déserte.

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Le président de l’Ukraine, Volodymyr Zelensky

Déjà, après un peu plus de trois semaines de conflit, 3,2 millions de personnes ont quitté l'Ukraine pour se réfugier dans des pays limitrophes, a indiqué l’Organisation des Nations unies, vendredi. De plus, 6,5 millions de personnes se sont déplacées à l’intérieur des frontières de l’Ukraine, qui compte près de 45 millions d’habitants.

Biden met en garde la Chine

Au cours d’un entretien virtuel attendu, le président des États-Unis, Joe Biden, a mis en garde son homologue chinois, Xi Jinping, contre les « conséquences » pour la Chine d’une aide à la Russie. Le dirigeant américain n’a pas précisé la nature d’éventuelles représailles, mais a « détaillé » les sanctions déjà prises contre la Russie.

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Le président Joe Biden s’est entretenu vendredi avec le président Xi Jinping depuis la Maison-Blanche, à Washington.

De son côté, le président chinois s’est contenté de rappeler que les conflits militaires n’étaient « dans l’intérêt de personne », sans jamais parler de « guerre ».

Sur le terrain, en Ukraine, « des missiles » russes ont frappé vendredi matin le quartier de l’aéroport de Lviv, ville située à 75 km de la frontière avec la Pologne. Signe que les combats semblent se rapprocher de jour en jour, des recrues et des vétérans ukrainiens se préparent à affronter l’ennemi russe dans l’ouest du pays.

Sur la place du marché de Lviv, des civils avaient également disposé 109 landaus, poussettes et paniers pour bébés. Le geste avait pour but de rappeler que 109 enfants ont été tués depuis que la Russie a lancé les hostilités.

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À Lviv, 109 landaus, poussettes et paniers pour bébés ont été disposés sur la place du marché.

« Je ressens beaucoup de douleur, a affirmé Katerina Bandjanova, 28 ans, à l’Agence France-Presse. De la douleur pour l’avenir du pays, car ces enfants étaient l'avenir de l’Ukraine. » Sa petite fille de moins de 1 an, Solomia, était d’ailleurs la seule dans une poussette sur la place du marché.

Depuis le début de l’« opération militaire spéciale » russe, il y a trois semaines, il y a eu plusieurs frappes contre des cibles civiles abritant des enfants. Les autorités ukrainiennes chiffrent à 439 le nombre d’établissements d’enseignement endommagés depuis le début de la guerre, dont 63 complètement détruits.

La Russie plus unie que jamais, selon Poutine

À Moscou, Vladimir Poutine a tenu un grand rassemblement dans le stade qui avait accueilli la finale de la Coupe du monde de soccer en 2018. La police de la capitale a affirmé que 200 000 personnes étaient dans le stade et ses alentours pour l’allocution du président russe. Selon l’agence Reuters, des employés de l’État et des étudiants avaient reçu l’ordre d’assister à l’évènement.

« Le pays n’a jamais été aussi uni depuis longtemps », a déclaré Vladimir Poutine devant des affiches où l'on pouvait lire des slogans tels que « Pour un monde sans nazisme » et « Appuyons notre président ».

Par ailleurs, les conséquences du conflit pourraient bien provoquer d’autres crises à l’échelle mondiale. Selon le Center for Global Development, l’invasion de l’Ukraine par la Russie plongera plus de 40 millions de personnes dans l’extrême pauvreté en raison de la flambée des prix des aliments et de l’énergie.

Selon le groupe de réflexion établi à Washington, les prix des denrées alimentaires depuis le début du conflit ont dépassé les niveaux enregistrés lors des flambées de prix en 2007 et 2010.

De son côté, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a dévoilé vendredi un plan en 10 points afin de réduire la consommation de pétrole de 2,7 millions de barils par jour en quatre mois, soit l’équivalent de la consommation de toutes les voitures en Chine.

Selon l’AIE, des mesures sont nécessaires pour pallier la pénurie de pétrole de Russie, frappée par diverses sanctions économiques. Au menu : réduction de la vitesse sur les routes, télétravail, réduction des tarifs de transport public, entre autres mesures afin d’éviter un éventuel choc pétrolier.

Autre signe des nombreuses conséquences de la guerre en Ukraine, la Belgique a annoncé qu’elle repoussait de 10 ans sa sortie du nucléaire, initialement prévue pour 2025. « Cette prolongation doit permettre de renforcer l’indépendance de notre pays vis-à-vis des énergies fossiles dans un contexte géopolitique chahuté », a signalé le premier ministre belge, Alexander De Croo.

La Belgique a aussi annoncé un « coup d’accélérateur » dans les énergies renouvelables avec des investissements supplémentaires dans l’éolien, l’hydrogène et l’énergie solaire.

Avec la BBC, The Guardian, Reuters et l’Agence France-Presse