(Kiev) Dans une zone boisée aux abords de Kiev, la capitale de l’Ukraine, l’entraînement bat son plein. Le but : repousser une embuscade tendue par des soldats russes.

Ces hommes et ces femmes qui se retrouvent le samedi pour s’entraîner, dans la neige ou la boue suivant la saison, sont des réservistes de l’armée ukrainienne.

Dans l’un des scénarios du jour, ils répliquent à une attaque-surprise de l’ennemi russe, kalachnikovs factices à la main, tandis que des grenades fumigènes explosent autour d’eux.

Pour ces civils, qui en temps normal sont étudiants, architectes ou chercheurs, se préparer à la guerre avec Moscou est un devoir.

« Chaque habitant de ce pays doit savoir ce qu’il aura à faire […] si l’ennemi envahit » l’Ukraine, proclame Daniil Larine, un étudiant de 19 ans, lors d’une pause entre deux simulations.

Ce jeune homme fait partie d’un groupe d’une cinquantaine de réservistes qui participent à cet entraînement mené dans une ancienne fabrique soviétique de goudron.

Pour ces volontaires de la réserve, ces manœuvres sont d’autant plus nécessaires que, d’après Kiev et ses alliés occidentaux, la Russie a massé des dizaines de milliers de militaires et des armes lourdes aux frontières de l’Ukraine en prévision d’une éventuelle invasion.

L’armée ukrainienne, qui compte quelque 215 000 membres, se bat déjà depuis 2014 contre des séparatistes prorusses dans l’est de l’Ukraine, un conflit qui a fait plus de 13 000 morts.

« Défendre nos terres »

Moscou, qui a annexé la péninsule ukrainienne de Crimée en 2014, dément tout projet d’agression et se présente au contraire comme la victime de manœuvres politiques, militaires et diplomatiques toujours plus menaçantes de l’OTAN.

Le président russe Vladimir Poutine a d’ailleurs évoqué des mesures de représailles « militaires et techniques » si les pays de l’Alliance atlantique ne cédaient pas à ses exigences, en particulier l’interdiction de tout élargissement futur de cette coalition, notamment à l’Ukraine.

PHOTO SERGEI SUPINSKY, AGENCE FRANCE-PRESSE

Dans l’un des scénarios du jour, les réservistes répliquent à une attaque-surprise de l’ennemi russe, kalachnikovs factices à la main, tandis que des grenades fumigènes explosent autour d’eux.

Des pourparlers entre Moscou et Washington pour tenter de négocier une désescalade sont prévus le 10 janvier, selon la Maison-Blanche.  

Une réunion entre la Russie et l’OTAN pourrait ensuite avoir lieu le 12 janvier, suivie le 13 d’une rencontre entre la Russie et l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).  

Mais dans le contexte actuel de tension, les 100 000 réservistes ukrainiens sont formés à « manier des armes, savoir comment réagir pendant des affrontements, comment défendre des villes », explique M. Larine.

Parmi eux, Marta Youzkiv, une médecin de 51 ans, estime que l’armée russe est « largement supérieure » à celle de l’Ukraine. Et si elle a rejoint les rangs de la réserve au printemps, c’est que le risque d’une invasion est « suffisamment élevé ».

« Nous n’aurons une chance [de repousser une invasion] que si chacun est prêt à défendre nos terres », dit-elle.

Depuis le printemps, Mme Youzkiv a été formée à la médecine de guerre, au maniement des fusils d’assaut et à la mise en place de check-points.

L’armée lui a fourni un uniforme, mais elle a puisé dans ses propres deniers pour se procurer un casque, un gilet pare-balles et un masque balistique.

« Coup dans la figure »

Son groupe fait partie d’un bataillon dont la mission serait de protéger Kiev en cas d’attaque.

L’un de ses commandants, Vadim Ozirni, explique que ces réservistes auraient alors pour rôle de sécuriser des bâtiments administratifs, des infrastructures vitales et d’aider à l’évacuation de civils.

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Pour ces volontaires de la réserve, ces manœuvres sont d’autant plus nécessaires que, d’après Kiev et ses alliés occidentaux, la Russie a massé des dizaines de milliers de militaires et des armes lourdes aux frontières de l’Ukraine en prévision d’une éventuelle invasion.

Ces hommes et femmes doivent être prêts à tout moment à « recevoir leurs armes et remplir les missions qui leur seront confiées, défendre leur foyer », dit-il.

Denis Semirog-Orlik, l’un des réservistes les plus expérimentés du groupe, se sent prêt à aller au feu.

« Cela va maintenant faire huit ans que je vis avec la conviction que tant qu’on n’aura pas mis un bon coup dans la figure de la Russie, ils ne nous laisseront pas tranquilles », lâche cet architecte âgé de 46 ans.

« Je comprends parfaitement que je suis un soldat », poursuit-il. « On fera peut-être appel à moi, et il faudra alors que je me comporte en militaire ».