Forte de 16 ans de règne – et toujours très populaire en Allemagne –, la chancelière Angela Merkel a marqué l’histoire par sa longévité, sa gestion de nombreuses crises et sa façon de gouverner, calme et réfléchie. Notre journaliste, qui rentre d’un séjour de deux ans à Francfort, fait le point à la veille des élections fédérales allemandes.

Entrevue avec François Hollande : « C’est une femme de parole »

PHOTO DOMINIQUE FAGET, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

« Cette photo est non seulement belle, elle est surprenante, car elle est affectueuse. [...] Quand Angela a mis sa tête sur mon épaule, elle se comportait comme une sœur. Un geste de sororité », a confié l’ancien président français François Hollande.

François Hollande a côtoyé Angela Merkel pendant cinq ans, entre 2012 et 2017, lorsqu’il était président de la République française. Leurs rencontres ont été multiples et leur collaboration, étroite. Ensemble, ils ont traversé de nombreuses crises, celles de l’euro, de l’Ukraine, les attentats de 2015 en France, la crise des réfugiés. Alors que la chancelière allemande s’apprête à quitter le pouvoir, La Presse s’est entretenue par téléphone avec l’ancien président français François Hollande, qui décrit Angela Merkel comme une femme de parole, sensible et persuadée que tout problème trouve nécessairement une solution. Entrevue. 

Vous avez côtoyé Angela Merkel pendant cinq ans. Vous avez travaillé en étroite collaboration. Qu’est-ce que vous retenez de la chancelière ?

C’est une femme de parole, elle dit ce qu’elle pense et généralement, elle pense ce qu’elle dit, donc c’est plus simple dans les relations internationales, c’est sa qualité principale. Elle n’est pas dans la dissimulation, ou dans l’incantation, elle essaie de trouver chaque fois des solutions. En revanche, elle est lente à prendre des décisions, elle sait qu’elle aura à convaincre ses alliés politiques, le Parlement, l’opinion publique allemande. Avec les présidents français avec lesquels elle a travaillé – elle en a connu quatre –, elle a affronté des épreuves qui ont accéléré le cours de l’histoire. C’est la crise qui l’a fait le plus souvent évoluer. En temps ordinaire, elle considère qu’il n’y a pas à forcer l’allure.

Vous avez traversé de nombreuses crises, celle de l’Ukraine notamment. Avait-elle une approche plus scientifique dans sa façon de travailler ?

Dans une négociation, notamment à Minsk pour faire cesser la guerre en Ukraine avec le président ukrainien et le président russe, Angela Merkel entre dans les détails de la discussion. Elle travaille crayon à la main. Elle rédige elle-même les termes d’une éventuelle conclusion. Elle veille à ce qu’il y ait un progrès dans les échanges et pense toujours que tout problème trouve nécessairement une solution. Comme elle n’est pas pressée, elle n’est pas pressée non plus de dormir, et donc la négociation peut durer toute la nuit. Elle a raison. Moi-même, j’ai pu constater que les résistances, notamment dans les conseils européens, s’érodaient à mesure que la nuit avançait. Je l’ai vécu au moment du débat européen sur la Grèce, dont je voulais qu’elle reste dans la zone euro. Angela Merkel n’en était pas convaincue, je devais passer beaucoup de temps avec elle, lui donner des gages, et démontrer que du côté grec, il y avait de l’engagement, et du côté français, de la solidarité. Il nous a fallu une nuit et une matinée de discussions pour parvenir à un accord en juillet 2015. Ce qui est remarquable chez Angela Merkel, c’est qu’après un long processus, elle finit toujours par pencher du bon côté. Mais mieux vaut prendre du temps pour adopter une bonne décision qu’être pressé et en prendre une mauvaise.

  • François Hollande et Angela Merkel menant la « marche républicaine » à Paris, le 11 janvier 2015, après les attentats islamistes contre Charlie Hebdo, notamment.

    PHOTO PHILIPPE WOJAZER, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

    François Hollande et Angela Merkel menant la « marche républicaine » à Paris, le 11 janvier 2015, après les attentats islamistes contre Charlie Hebdo, notamment.

  • En mai 2016 à l'Ossuaire de Douaumont, dans le nord-est de la France, lors d'une cérémonie de commémoration du centenaire de la bataille de Verdun

    PHOTO MATHIEU CUGNOT, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    En mai 2016 à l'Ossuaire de Douaumont, dans le nord-est de la France, lors d'une cérémonie de commémoration du centenaire de la bataille de Verdun

  • En janvier 2017, solidarité franco-allemande après l'attentat dans un marché de Noël à Berlin

    PHOTO KAY NIETFELD, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    En janvier 2017, solidarité franco-allemande après l'attentat dans un marché de Noël à Berlin

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Il y a de très belles photos de vous avec Angela Merkel. Celle qui a marqué est celle du 11 janvier 2015, après les attentats de Charlie Hebdo, lorsque la chancelière pose la tête sur votre épaule.

Cette photo est non seulement belle, elle est surprenante, car elle est affectueuse. Nous avons, elle et moi, longtemps cherché à faire un acte qui soit comparable à celui d’Helmut Kohl et François Mitterrand se tenant la main à Verdun. Ce mouvement est venu naturellement au lendemain des attentats de janvier 2015. Les plus beaux gestes, contrairement à ce que pensent les gens, ne sont pas imaginés ou organisés par des conseillers en communication, ce sont des réactions spontanées de femmes et d’hommes. Quand Angela a mis sa tête sur mon épaule, elle se comportait comme une sœur. Un geste de sororité.

PHOTO ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Une image forte : François Mitterrand et Helmut Kohl, le 22 septembre 1984, lors d'une cérémonie de réconciliation franco-allemande près de Verdun, site de la plus sanglante bataille de la Première Guerre mondiale.

Derrière une certaine froideur, Angela Merkel est une femme sensible.

Oui. C’est une femme qui n’est pas exhibitionniste au sens où elle n’est pas dans le pathos, dans l’émotion, la mise en scène. Elle est pudique, mais a des sentiments élevés. Je l’ai mesuré notamment sur la question des réfugiés. L’Allemagne, qu’on regarde souvent comme condescendante, exigeante, voire égoïste, eh bien là, d’un seul coup, elle montrait que l’Allemagne pouvait être généreuse, ouverte, accueillante.

Il y a eu aussi des moments plus joyeux et personnels, comme lors de votre dîner d’adieu à Berlin en 2017. Angela Merkel vous a offert un livre de photos ?

Oui. Elle m’a offert un livre de photos de toutes les réunions auxquelles nous avions participé, de nos rencontres dans des lieux multiples. Ce dîner était dans un restaurant pas très loin de la chancellerie. Elle avait souhaité quitter les lieux officiels pour adopter un cadre plus intime pour parler de nos vies respectives. Elle allait continuer à diriger son pays, moi, je quittais l’Élysée. Elle savait que son temps aussi était limité et elle se préparait à cette autre vie. Elle ne s’est jamais accrochée au pouvoir. Les circonstances ont fait qu’elle a dirigé longtemps l’Allemagne, mais elle a une vie à côté, elle prend beaucoup de plaisir à écouter de la musique, à aller avec son mari à des concerts ou à l’opéra. Elle travaille beaucoup, mais préserve sa vie personnelle.

PHOTO ODD ANDERSEN, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

En avril 2016, à Hanovre

Qu’est-ce que vous lui souhaitez pour la suite ?

Je pense qu’elle voudra témoigner de ce qu’elle a fait, elle aura enfin du temps pour elle. Peut-être écrira-t-elle un livre parce qu’elle ne s’est jamais confiée sur ses années au pouvoir. Elle est encore jeune, elle se retire de la politique, la voix d’Angela Merkel se fera entendre dans de nombreuses conférences, dans des universités ou dans des colloques. Elle aime voyager, elle est curieuse. Elle disait souvent qu’elle aurait dû être physicienne ! Elle aurait donc pu être une grande universitaire, chercheuse. Elle n’a pas pu avoir à ce titre le prix Nobel, mais avoir gouverné 16 ans l’Allemagne vaut toutes les récompenses.

« Les Allemands aiment sa prudence, sa constance »

PHOTO FRANÇOIS LENOIR, ARCHIVES REUTERS

Angela Merkel en 2015

Angela Merkel tirera sa révérence dans quelques semaines, après la formation d’un nouveau gouvernement. Que retiendra-t-on de ses 16 années passées à la chancellerie ?

Andreas Rinke, correspondant en chef de l’agence de presse Reuters à Berlin, évoque d’emblée le fait qu’elle a été la première femme chancelière – ce qui a été important dans l’évolution de la société allemande, mais aussi pour le monde entier – et la première qui venait de l’Allemagne de l’Est. « C’était une véritable outsider, par son parcours atypique [fille de pasteur, elle est une brillante physicienne], mais aussi par sa façon de faire de la politique, toujours très rationnelle, calme, réfléchie », dit-il.

« Les Allemands aiment sa prudence, sa constance. Elle a su prendre de bonnes décisions, pendant la crise du nucléaire, la crise financière, le Brexit et la pandémie. Elle a stabilisé l’Allemagne au sein de l’Europe et a toujours fait passer l’intérêt des Allemands en premier », estime Andreas Rinke, auteur de Das Merkel-Lexikon (Le dictionnaire Merkel), paru en 2016.

  • Avec son mentor Helmut Kohl, en 1991, alors qu'elle est ministre de la Jeunesse et de la Condition féminine

    PHOTO FRITZ REISS, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

    Avec son mentor Helmut Kohl, en 1991, alors qu'elle est ministre de la Jeunesse et de la Condition féminine

  • En 2002 avec Edmund Stoiber à l'Oktoberfest, à Munich. Stoiber avait alors été désigné candidat à la chancellerie de la coalition CDU/CSU devant Merkel, mais il mordra la poussière face à Gerhard Schröder.

    PHOTO ERIC FEFERBERG, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    En 2002 avec Edmund Stoiber à l'Oktoberfest, à Munich. Stoiber avait alors été désigné candidat à la chancellerie de la coalition CDU/CSU devant Merkel, mais il mordra la poussière face à Gerhard Schröder.

  • En campagne pour la chancellerie dans le nord de l'Allemagne, en septembre 2005

    PHOTO ERIC FEFERBERG, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    En campagne pour la chancellerie dans le nord de l'Allemagne, en septembre 2005

  • En 2007 avec son prédécesseur, l'ex-chancelier Gerhard Schröder

    PHOTO MARKUS SCHREIBER, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

    En 2007 avec son prédécesseur, l'ex-chancelier Gerhard Schröder

  • En 2007, entourée par les présidents Poutine et Bush lors d'un sommet du G8

    PHOTO ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    En 2007, entourée par les présidents Poutine et Bush lors d'un sommet du G8

  • Rencontre avec des soldats allemands à Kunduz, en Afghanistan, en 2013

    PHOTO KAY NIETFELD, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    Rencontre avec des soldats allemands à Kunduz, en Afghanistan, en 2013

  • Avec le président Obama en marge d'un sommet du G7 en juin 2015 près de Garmisch-Partenkirchen, dans le sud de l'Allemagne

    PHOTO MICHAEL KAPPELER, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    Avec le président Obama en marge d'un sommet du G7 en juin 2015 près de Garmisch-Partenkirchen, dans le sud de l'Allemagne

  • Autre moment émouvant avec un président français, cette fois Emmanuel Macron en 2018, à l'occasion du 100e anniversaire de l'armistice de la Première Guerre mondiale

    PHOTO PHILIPPE WOJAZER, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    Autre moment émouvant avec un président français, cette fois Emmanuel Macron en 2018, à l'occasion du 100e anniversaire de l'armistice de la Première Guerre mondiale

  • Face au président Trump au sommet du G7 à La Malbaie, au Québec, en juin 2018

    PHOTO JESCO DENZEL, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    Face au président Trump au sommet du G7 à La Malbaie, au Québec, en juin 2018

  • En point de presse après les inondations meurtrières survenues dans le nord et l'ouest de l'Allemagne l'été dernier

    PHOTO CHRISTOF STACHE, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    En point de presse après les inondations meurtrières survenues dans le nord et l'ouest de l'Allemagne l'été dernier

  • Accueil du coude au Royaume-Uni, pandémie oblige, par le premier ministre Boris Johnson, en juillet dernier

    PHOTO DAVID ROSE, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    Accueil du coude au Royaume-Uni, pandémie oblige, par le premier ministre Boris Johnson, en juillet dernier

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Un nouveau verbe : « merkeliser »

La stabilité d’Angela Merkel, c’est ce que soulignent tous les spécialistes de la politique allemande. « Angela Merkel a réussi à gouverner pendant 16 ans avec des coalitions au centre, dans une période où les Allemands avaient besoin de cette stabilité, après la réunification et les réformes qui avaient secoué le pays », estime Hélène Miard-Delacroix, professeure d’histoire à Sorbonne Université et spécialiste de l’Allemagne contemporaine.

Son style dans sa façon de gouverner, discret, modeste, avec peu de phrases, peu de grands gestes, une efficacité par la recherche du compromis, c’est ce qui va rester et que l’on va regretter.

Hélène Miard-Delacroix, professeure d’histoire à Sorbonne Université

Paul Maurice, chercheur à l’Institut français des relations internationales, parle du côté très prudent de la chancelière. « Elle reste très populaire, car elle représente une façon modérée et rassurante de gouverner dans un monde agité, observe-t-il. Il y a un terme qui a été inventé en Allemagne : on dit qu’on “merkelise”, ce qui signifie qu’on attend que les évènements surviennent plutôt que de les anticiper, ce qui va avoir des conséquences pour son successeur qui devra gérer des dossiers un peu laissés de côté. »

PHOTOMONTAGE REUTERS

Un style vestimentaire à l'image du style politique ? Montage photographique de la garde-robe sobre et plutôt constante de la chancelière, entre 2004 et 2021.

Un avis que partage Hélène Miard-Delacroix. « Lorsque Angela Merkel décide de manière assez radicale de sortir du nucléaire en 2011, juste après l’accident de Fukushima, elle n’a pas organisé la suite des évènements. La décision a été abrupte et le développement des énergies renouvelables n’arrive pas à se faire aussi vite que l’on voudrait. Le pays a dû revenir au charbon [on prévoit aujourd'hui sortir de la filière du charbon en 2038]. »

« L’Allemagne a l’un des taux d’émission de CO2 les plus élevés d’Europe, ce qui est contradictoire avec les écologistes, dit Hélène Miard-Delacroix. L’Allemagne se retrouve à beaucoup polluer et à importer du gaz avec le Nord Stream 2, ce qui fait dépendre son approvisionnement du bon vouloir des Russes. Décarboner l’économie, c’est un projet qui demande du temps, et les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes, alors qu’il y a la volonté d’un vrai virage écologique », explique la professeure.

Plus d’un million de migrants

Angela Merkel a traversé de nombreuses crises, mais ce qui restera historique, c’est sa décision d’accueillir plus d’un million de migrants, en 2015. « Wir schaffen das » (Nous y arriverons) est la phrase devenue célèbre prononcée lors d’un discours par la chancelière, qui dit avoir agi avec humanité. « On va se rappeler cette décision de ne pas fermer la porte aux migrants, estime Hélène Miard-Delacroix. Elle a d’ailleurs été en adéquation avec les valeurs chrétiennes de solidarité, car n’oublions pas que la famille politique d’Angela Merkel, ce sont les chrétiens-démocrates (CDU). »

Elle a sauvé l’honneur des Européens. L’Allemagne a réussi à intégrer plus d’un million de réfugiés, cela va rester dans l’histoire.

Hélène Miard-Delacroix, professeure d’histoire à Sorbonne Université

« À partir de ce moment-là, il y a eu un tournant, elle est devenue l’icône du libéralisme en Europe. Elle a su se positionner comme celle qui défend le monde libre. Celle qui s’était montrée intransigeante envers la Grèce se révèle très humaniste ; la perception du monde va changer à son égard et même à l’égard de l’Allemagne, observe Paul Maurice. Le paradoxe, c’est que c’est ce qui a conduit au Parlement allemand l’AfD, le parti d’extrême droite raciste et xénophobe, qui a utilisé la crise des migrants comme tremplin électoral. »

  • Égoportraits avec des migrants syriens et irakiens en 2015, à Berlin

    PHOTO FABRIZIO BENSCH, ARCHIVES REUTERS

    Égoportraits avec des migrants syriens et irakiens en 2015, à Berlin

  • Manifestation du mouvement d'extrême droite PEGIDA à Dresde, en 2015, alors que le pays est déchiré par l'arrivée de centaines de milliers de réfugiés de la guerre en Syrie, notamment.

    PHOTO JENS SCHLUTER, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    Manifestation du mouvement d'extrême droite PEGIDA à Dresde, en 2015, alors que le pays est déchiré par l'arrivée de centaines de milliers de réfugiés de la guerre en Syrie, notamment.

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Valérie Dubslaff, maître de conférences en études germaniques à l’Université de Rennes 2, évoque le talent de négociatrice de Merkel. « C’est une de ses forces, elle pouvait discuter jusqu’aux petites heures du matin pour trouver un compromis. Dans un système fédéral allemand composé de 16 länder, c’est très important, il y a toujours une concertation, en plus de celle avec les 27 pays de l’Union européenne. »

Féministe

À quelques semaines de son départ, Angela Merkel a même avoué qu’elle était féministe. « Un aveu incroyable, alors que la question lui avait souvent été posée, mais c’était inavouable puisqu’elle fait partie d’une famille politique conservatrice qui défend des valeurs traditionnelles. C’était inenvisageable pour des conservateurs d’avoir à leur tête une féministe. Maintenant qu’elle s’en va, elle fait cet aveu, je pense que c’est important pour beaucoup d’Allemandes », conclut Valérie Dubslaff.

Un parcours remarquable

PHOTO SHAWN THEW, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Angela Merkel en 2001

  • 17 juillet 1954 : Angela Kasner naît à Hambourg. Sa famille part s’installer en Allemagne de l’Est quelques semaines plus tard.
  • 1977 : Elle épouse un étudiant en physique, Ulrich Merkel. Elle garde son nom après leur divorce en 1982.
  • 1986 : Elle obtient son doctorat en physique quantique.
  • 1991-1998 : Ministre dans le gouvernement d’Helmut Kohl
  • Depuis 2000 : Présidente de la CDU/CSU (conservateurs)

En tant que chancelière

PHOTO JOHN MACDOUGALL, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

En 2005, au côté de Gerhard Schröder

  • 2005 : Plus jeune et première femme élue chancelière. Réélue en 2009 et 2013.
  • 2014 : Elle devient la plus ancienne des chefs de gouvernement en exercice de l'Union européenne.
  • Mars 2018 : La chambre des députés l'élit pour un 4mandat après six mois d'impasse.
  • Décembre 2018 : Merkel quitte la présidence de la CDU/CSU. Elle s'apprête à quitter ses fonctions à l'issue des élections législatives du 26 septembre 2021.

Agence France-Presse

Les deux favoris à la succession de Merkel veulent une Europe plus forte

PHOTO FABIAN BIMMER, REUTERS

Pancartes électorales des deux favoris à la succession d'Angela Merkel : Armin Laschet, chef de la CDU, et Olaf Scholz, actuel vice-chancelier et chef des sociaux-démocrates (SPD)

Les deux favoris à la succession d’Angela Merkel, au coude-à-coude dans les sondages, ont appelé jeudi à un renforcement de l’Union européenne face à la Chine et aux États-Unis, lors de l’ultime débat d’une campagne électorale totalement indécise.

L’écart s’est encore resserré entre les sociaux-démocrates d’Olaf Scholz, légèrement en tête avec 25 %, et les chrétiens-démocrates d’Armin Laschet, crédités, avec 23 %, d’un score historiquement bas, selon un sondage pour la chaîne publique ZDF publié jeudi soir.

Le vote est suivi de près, en Europe et dans le monde, par des partenaires inquiets d’une paralysie de l’Allemagne pendant des mois de tractations pour former une coalition et le premier gouvernement de l’après-Merkel.

Un dernier débat jeudi soir entre les dirigeants des sept grands partis n’a pas permis d’y voir plus clair, notamment sur la formation du futur attelage de deux, voire trois partis, qui prendra dans les prochains mois les commandes de l’Allemagne.

« Irritation »

« Quand tout le monde parle, personne ne dit rien », a résumé l’hebdomadaire Der Spiegel au terme des 90 minutes d’échanges.

PHOTO TOBIAS SCHWARZ, ASSOCIATED PRESS

Le dernier débat des chefs s'est déroulé jeudi dernier à Berlin.

Cet ultime rendez-vous télévisé a toutefois livré des enseignements sur les futures orientations diplomatiques de la première puissance économique européenne, un sujet jusqu’ici peu présent dans la campagne électorale.

Un consensus semble ainsi se former sur la nécessité de renforcer la « souveraineté européenne », des termes utilisés par les deux favoris.

Dans un « monde qui comptera bientôt 10 milliards » d’habitants, il est important de façonner une « Union européenne forte » ; « car sinon, nous ne jouerons pas de rôle », a prévenu M. Scholz, actuel vice-chancelier et possible futur chef du gouvernement.

Le grand argentier du gouvernement Merkel a notamment dit « comprendre l’irritation » de la France après l’annulation par l’Australie d’un important contrat de sous-marins. M. Scholz a aussi réitéré son attachement à l’OTAN, que rejette la gauche radicale Die Linke, partenaire potentiel de coalition.

PHOTO MARTIN MEISSNER, AGENCE FRANCE-PRESSE

Olaf Scholz, actuel ministre des Finances et chef des sociaux-démocrates

« Nous avons besoin de plus d’Europe, nous devons parler d’une seule voix, nous devons lancer des projets communs et des projets d’armement afin d’être en mesure d’agir une fois que les États-Unis se seront retirés, et c’est une tâche que le prochain gouvernement devra accomplir », a renchéri son adversaire Armin Laschet, qui tente de rattraper son retard dans les sondages.

Ces élections pourraient en effet porter un coup dur aux conservateurs de Mme Merkel qui, jusqu’à présent, avaient toujours récolté plus de 30 % des suffrages lors des législatives.

Leur chef de file a les plus grandes difficultés à marcher dans les pas d’une chancelière à la popularité inentamée.

Dirigeant de la plus peuplée des régions allemandes, la Rhénanie-du-Nord-Westphalie (ouest), cet homme affable mais gaffeur de 60 ans peine à convaincre jusque dans son propre camp.

PHOTO OLIVER DIETZE, ASSOCIATED PRESS

Armin Laschet, candidat de la CDU

Il risque de faire subir à son camp une défaite historique, le privant de la chancellerie et, pire, l’éjectant du futur gouvernement.

En face, les sociaux-démocrates ont le vent en poupe : après avoir enchaîné plusieurs revers électoraux au cours des dernières années, le SPD a su inverser la tendance depuis le début de l’année et l’investiture de son candidat de 63 ans, Olaf Scholz, actuel vice-chancelier et ministre des Finances.

Peu charismatique, ce tenant de l’aile centriste des sociaux-démocrates a jusqu’ici mené une campagne sans faute, allant jusqu’à se présenter lui-même comme le vrai successeur de Mme Merkel.

Les écologistes menés par Annalena Baerbock, 40 ans, devraient jouer un rôle clé dans le futur gouvernement, même si leur troisième place dans les intentions de vote est une déception pour les militants.

PHOTO ODD ANDERSEN, AGENCE FRANCE-PRESSE

Annalena Baerbock, cheffe des écologistes

La codirigeante du parti n’a pas caché sa préférence pour une coalition avec les sociaux-démocrates, mais son parti n’exclut pas de travailler avec les conservateurs, comme il le fait déjà dans certains Länder allemands.

Des mois de négociations ?

Tous les partis ont jusqu’ici exclu de s’associer avec la formation d’extrême droite AfD, mais une autre formation, les libéraux du FDP, crédités de 12 % des intentions de vote, se profile en faiseur de rois.

Elle pourrait être le pivot d’une alliance à trois avec écologistes et conservateurs ou sociaux-démocrates.

Les options de coalition pourraient être nombreuses et les négociations pourraient durer des mois, pendant lesquels Angela Merkel et ses ministres traiteront les affaires courantes.

En 2017, il avait fallu pas moins de cinq mois pour que l’Allemagne se dote d’une coalition et que le nouvel exécutif puisse se mettre au travail.