(Londres) Plus de 16 millions de Londoniens et d’habitants du sud-est de l’Angleterre se sont réveillés dimanche sous un nouveau confinement qui s’annonce potentiellement long, contraints de faire une croix sur Noël pour juguler une version mutante « hors de contrôle » du nouveau coronavirus.

Malgré le déploiement d’une campagne de vaccination, le gouvernement de Boris Johnson s’est résigné samedi à drastiquement serrer la vis après une envolée des contaminations et des hospitalisations attribuée à une nouvelle souche beaucoup plus contagieuse du virus.

« Malheureusement la nouvelle souche était hors de contrôle. Nous devions reprendre le contrôle », a justifié le ministre de la Santé, Matt Hancock, sur la chaîne Sky News.  

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Le ministre de la Santé britannique, Matt Hancock

« Ce sera très difficile de la garder sous contrôle jusqu’à ce qu’un vaccin soit déployé », a-t-il ajouté, laissant entendre que les restrictions, qui seront évaluées fin décembre, pourraient s’inscrire dans la durée, au moins « deux mois ».  

Le Royaume-Uni, un des pays les plus durement touchés en Europe avec plus de 67 000 morts, a informé l’Organisation mondiale de la santé (OMS) de la contagiosité accrue de cette souche, « jusqu’à 70 % de plus » selon le premier ministre Boris Johnson.

Pour se prémunir, plusieurs pays européens, dont le voisin irlandais, ont décidé de suspendre leurs liaisons aériennes ou ferroviaires avec le Royaume-Uni.

Le premier ministre britannique Boris Johnson va présider lundi une réunion de crise consacrée aux approvisionnements du Royaume-Uni après la décision de plusieurs pays dont la France de suspendre leurs liaisons en raison de la nouvelle souche de nouveau coronavirus.

« Le premier ministre va diriger demain une réunion COBR (pour les situations de crise, NDLR) pour discuter de la situation concernant les déplacements internationaux et en particulier les flux réguliers du fret vers et à partir du Royaume-Uni », a déclaré un porte-parole, tandis que le port de Douvres, desservant notamment la France, a annoncé fermer pour le trafic sortant.

Noël en février

Déjà soumis à de contraignantes restrictions, les habitants de Londres, du sud-est et d’une partie de l’est de l’Angleterre ont désormais pour consigne de rester chez eux.  

Ils ne pourront plus se retrouver pour Noël, tandis que dans le reste du pays, les familles pourront se voir le 25 décembre uniquement.  

Les commerces non essentiels ont fermé, un coup dur en cette période habituellement faste pour leur activité. Les pubs et musées étaient déjà fermés depuis quelques jours.  

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Vue sur une partie d’Oxford Street dimanche matin

Dimanche, Oxford Street, artère la plus commerçante du centre de Londres d’habitude bouillonnante activité, était à nouveau désertée, près de trois semaines après la sortie d’un deuxième confinement en Angleterre.

« Si c’est nécessaire, qu’il en soit ainsi », confie, résignée, Liz Field, une retraitée de 73 ans, à l’AFP. « On peut fêter [Noël] en janvier, février, n’importe ».  

David, 59 ans, qui travaille dans l’assurance, déplore lui que « de nouveau, nous sommes pris par un manque de préparation au niveau gouvernemental ».

Les déplacements en dehors des zones placées sous le niveau d’alerte le plus élevé sont interdits. Des policiers supplémentaires ont été déployés dans les transports.  

Ces annonces ont immédiatement poussé de nombreux Londoniens à quitter la capitale dans l’urgence, des images relayées par les médias britanniques montrant des gares prises d’assaut et des embouteillages sur les routes.  

Qualifiant ce comportement de « totalement irresponsable », Matt Hancock a appelé les gens à agir « comme s’ils avaient le virus » pour tenter de freiner sa propagation.

« Négligence grave »

Tout en soutenant ces restrictions, le chef de l’opposition travailliste, Keir Starmer a accusé Boris Johnson de « négligence grave » pour avoir agi tardivement et ignoré les signaux d’alarme « pendant des semaines ». Mercredi, le dirigeant conservateur clamait encore qu’il serait « inhumain » d’annuler Noël.  

De précédentes mutations du SARS-CoV-2 ont déjà été observées et signalées dans le monde.

Le conseiller scientifique du gouvernement, Patrick Vallance, avait indiqué samedi que cette nouvelle variante, en plus de se propager rapidement, devenait aussi la forme « dominante ». Elle serait apparue mi-septembre à Londres ou dans le Kent (sud-est).  

Selon Susan Hopkins, de l’agence de santé publique Public Health England, des cas liés à la nouvelle souche ont aussi été décelés « dans beaucoup d’autres régions » du Royaume-Uni, en faible quantité toutefois. Cette variante a aussi été détectée « en petits nombres » aux Pays-Bas, au Danemark et en Australie, a indiqué dimanche l’OMS.  

L’organisation a précisé que des études complémentaires étaient en cours pour déterminer son degré de transmissibilité et sa résistance éventuelle aux vaccins. Rien n’indique pour le moment que la nouvelle souche engendre une forme plus sévère de la maladie, d’après elle, mais elle pourrait affecter certains outils de dépistage comme les tests rapides.  

Très critiqué depuis le début de la pandémie pour sa gestion de la crise, le gouvernement mise gros sur la vaccination pour en sortir, avec l’objectif d’administrer une première dose du vaccin Pfizer/BioNTech à 500 000 personnes d’ici la fin du week-end.  

Le Pays de Galles a également décidé de reconfiner dès dimanche, tandis que l’Écosse et l’Irlande du Nord le feront juste après Noël, chaque nation du Royaume-Uni définissant sa propre stratégie sanitaire.