(Madrid) La justice espagnole a lancé un nouveau mandat d’arrêt international contre l’ancien président régional catalan Carles Puigdemont après la condamnation lundi de neuf autres indépendantistes catalans à des peines allant de neuf à treize ans de prison.

Dans un communiqué, la Cour suprême a annoncé que le juge Pablo Llarena, qui avait retiré « un mandat d’arrêt européen et international » pour rébellion contre M. Puigdemont devant l’impossibilité de le faire appliquer par des partenaires européens, en avait émis un nouveau « pour les délits de sédition et détournements de fonds publics ».

C’est en vertu de ces délits que la Cour a condamné lundi son ancien vice-président Oriol Junqueras et d’autres dirigeants indépendantistes à des peines allant jusqu’à 13 ans de prison.

Principal acteur de la tentative de sécession de 2017, M. Puigdemont avait fui en Belgique pour échapper aux poursuites.

En juillet 2018, le juge Llarena avait dû retirer son mandat d’arrêt international à l’encontre de M. Puigdemont et d’autres indépendantistes partis à l’étranger après une décision de la justice allemande favorable à l’ex-président catalan, arrêté quelques mois plus tôt en Allemagne.  

La justice allemande avait décidé de n’autoriser l’extradition de M. Puigdemont vers l’Espagne que pour le délit de détournement de fonds publics et non pour rébellion, qui le rendait passible de 25 ans de réclusion, dont il était alors accusé.  

Elle avait en effet estimé que cette accusation n’était pas recevable en droit allemand car M. Puigdemont « n’était pas le chef spirituel de violences » et parce que les violences ayant eu lieu en octobre 2017 au moment de la tentative de sécession « n’étaient pas d’une ampleur suffisante » pour justifier de telles poursuites.

Selon le juge Llarena, la condamnation pour sédition prononcée lundi contre d’autres indépendantistes est un « élément renforçant le pronostic de responsabilité du fugitif », explique la Cour suprême dans son communiqué.

La justice belge elle aussi avait refusé d’appliquer le mandat d’arrêt européen mais apparemment pour vice de forme.

 Jusqu’à 13 ans de prison pour les indépendantistes catalans

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Les neuf autres indépendantistes catalans condamnés à des peines de prison lundi : (en haut de gauche à droite) Raul Romeva, Joaquim Forn, Jordi Turull, Oriol Junqueras et Josep Rull (en bas de gauche à droite) Jordi Cuixart, Carme Forcadell, Dolors Bassa et Jordi Sanchez.

13 ans de prison pour l’ex-numéro 2

Dirigeant du parti Gauche républicaine de Catalogne (ERC), l’ancien vice-président du gouvernement régional, Oriol Junqueras, 50 ans, est condamné à 13 ans de prison et d’inégibilité, pour « sédition [et] détournement de fonds publics ».

Le parquet avait requis 25 ans de prison pour rébellion et détournement de fonds ; les avocats chargés de représenter l’État 12 ans de prison pour sédition et détournement de fonds.

Ministre régional de l’Économie, M. Junqueras avait notamment été chargé par le président catalan Carles Puigdemont de préparer le référendum interdit du 1er octobre 2017.  

Cinq autres ex-ministres condamnés à plus de 10 ans de prison

Trois anciens ministres régionaux — Jordi Turull, 53 ans, Raül Romeva, 48 ans, Dolors Bassa, 60 ans — sont condamnés à 12 ans de prison et d’inégibilité pour sédition et détournement de fonds publics.  

Deux autres ministres — Josep Rull, 51 ans, Joaquim Forn, 55 ans — sont condamnés à 10 ans et demi de prison et d’inégibilité pour sédition.  

Le parquet réclamait 16 ans de prison, les avocats de l’État 11,5.

11,5 ans de prison pour l’ex-présidente du parlement

La Cour a infligé 11 ans et six mois d’emprisonnement et d’inégibilité à Carme Forcadell, 64 ans, pour « sédition ».  

Le parquet réclamait 17 ans, les avocats de l’État 10.

Comme présidente du parlement régional, elle avait ignoré les avertissements de la justice pour faire voter les lois qui préparaient le référendum interdit et la sécession.

9 ans de prison pour deux dirigeants d’associations

Les dirigeants des deux associations indépendantistes ayant organisé des manifestations massives sont condamnés pour « sédition » à neuf ans de prison et d’inégibilité : le président au moment des faits de l’Assemblée nationale catalane (ANC), Jordi Sanchez, 55 ans, et le président d’Omnium Cultural, Jordi Cuixart, 44 ans.

Le parquet réclamait 17 ans, les avocats de l’État huit.

« Les deux Jordi » avaient été placés en détention provisoire dès le 16 octobre 2017 pour avoir appelé à une manifestation devant un bâtiment public perquisitionné, d’où des policiers n’avaient pu sortir.  Amende pour trois ex-ministres

Trois autres ministres — les seuls qui étaient en liberté conditionnelle — sont condamnés pour « désobéissance » à une amende de 60 000 euros et 20 mois d’inégibilité.  

Parquet et avocats de l’État avaient requis sept ans de prison contre Santi Vila, 46 ans, qui avait quitté le gouvernement catalan la veille de la déclaration d’indépendance, Carles Mundo, 43 ans et Meritxell Borras, 55 ans.