Un proche de Chérif Chekatt, l'auteur de l'attentat de Strasbourg abattu jeudi dernier au terme d'une traque de deux jours, a été inculpé lundi par un juge antiterroriste et placé en détention provisoire, a-t-on appris de source judiciaire.

Arrêté jeudi, cet homme de 37 ans est soupçonné d'avoir joué un rôle dans la fourniture du revolver utilisé par le tueur. Il a été inculpé pour «association de malfaiteurs terroriste criminelle» et «acquisition, détention et cession d'armes de catégorie B par au moins deux personnes en relation avec une entreprise terroriste». Il a été écroué conformément aux réquisitions du parquet de Paris.

Depuis l'attentat du 11 décembre à Strasbourg-le troisième perpétré cette année en France-, les enquêteurs s'attachent à déterminer si l'assaillant a bénéficié d'éventuelles complicités dans la préparation de son passage à l'acte et d'aide logistique pendant sa fuite.

Selon une source proche du dossier, l'homme arrêté jeudi est soupçonné d'avoir joué un rôle dans la fourniture du revolver de la fin du XIXe siècle dont s'est servi Chérif Chekatt au moment de l'attentat qui a fait cinq morts et 11 blessés.

Deux autres suspects, également soupçonnés d'être liés à la fourniture de l'arme, ont quant à eux été placés en garde à vue lundi, a ajouté la même source.

Mardi soir, Chérif Chekatt, un délinquant multirécidiviste de 29 ans, fiché S (Sûreté de l'État) pour radicalisation islamiste, a pénétré dans le centre historique de Strasbourg, armé d'une arme à feu et d'un couteau avant d'attaquer des passants à plusieurs endroits et de parvenir à s'enfuir. Des témoins l'ont entendu crier «Allah Akbar !».

Il a été retrouvé et tué par des policiers jeudi soir dans une rue d'un quartier de Strasbourg où les forces de l'ordre avaient perdu sa trace.

Quelques minutes après l'annonce de sa mort, l'organe de propagande du groupe djihadiste État islamique (EI) l'a présenté comme étant un de ses «soldats», une revendication qualifiée d'«opportuniste» par le ministre français de l'Intérieur Christophe Castaner et plusieurs analystes.

Les six autres personnes qui avaient été placées en garde à vue après l'attentat ont été libérées au cours du week-end «en l'absence d'éléments incriminants». Parmi elles figuraient les parents du tueur et deux de ses frères.

«Lavage de cerveau»

Lundi, la radio RTL a rapporté le témoignage d'un de ses frères, confiant avoir pris ses distances avec le jeune homme. Dans ses propos, il a décrit un «lavage de cerveau» et une «dérive personnelle».

Samedi soir, la chaîne de télévision France 2 avait pour sa part diffusé le témoignage du père de l'assaillant, Abdelkrim Chekatt, à sa sortie de détention. Selon lui, son fils adhérait aux idées de l'EI et estimait que le combat du groupe djihadiste était «une juste cause». «Moi, je lui ai toujours dit que c'est des criminels», a dit Abdelkrim Chekatt.

«S'il m'avait parlé de ce projet-là, je l'aurais dénoncé à la police, comme ça il ne tuait personne et il ne se faisait pas tuer», a affirmé le père de l'assaillant. Il dit n'avoir eu aucun contact avec son fils pendant sa cavale : «J'ai essayé, il était sur messagerie».

À Bruxelles, les journalistes européens ont respecté lundi au cours du point presse quotidien de la Commission européenne une minute de silence à la mémoire de leur confrère Antonio Megalizzi et de son ami Barto Pedro Orent-Niedzielski, décédés dans l'attentat. «Nous déplorons ces décès horribles, insensés», a déclaré le porte-parole de l'exécutif européen, Margaritis Schinas.

Dimanche matin, plus de mille personnes s'étaient réunies à Strasbourg en hommage aux victimes.

Une cérémonie, organisée par plusieurs associations de défense des droits de l'Homme, a alterné musique et lectures, avant de se clore sur «une minute de bruit». Applaudissements et cris ont remplacé la traditionnelle minute de silence, pour «montrer notre détermination», a expliqué une organisatrice.  

Le président français Emmanuel Macron s'était rendu vendredi à Strasbourg et s'était recueilli devant un mémorial improvisé pour les victimes.  

La France vit sous une menace terroriste élevée depuis la vague d'attentats djihadistes sans précédent de 2015.