Après la défection surprise de Boris Johnson et la candidature inattendue de son ex-allié Michael Gove, la ministre de l'Intérieur Theresa May faisait figure vendredi de favorite pour devenir le premier ministre qui négociera la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne.

Au total cinq candidats sont entrés dans la course à la succession de David Cameron. Mais pas le plus attendu, Boris Johnson, fer de lance de la campagne pour la sortie qui, à la surprise générale, a annoncé jeudi qu'il ne s'alignait pas.

Theresa May, 59 ans, ralliée à David Cameron pour défendre un maintien dans l'UE, s'est présentée jeudi comme une candidate capable de ressouder le parti si elle s'installait au 10, Downing Street en septembre.

«Brexit signifie Brexit», a-t-elle martelé. «La campagne a été menée, le vote a eu lieu, le taux de participation a été élevé et le peuple a rendu son verdict», a-t-elle ajouté pour dire aux «Brexiters» qu'elle comptait respecter leur choix.

Un possible revirement ?

Si elle est élue, elle ne compte pas activer l'article 50, qui régit le divorce avec l'UE, «avant la fin de l'année».

Dans le chaos politique ambiant, certains observateurs se sont demandé si ce délai n'ouvrait pas la voie à un revirement et à un abandon du processus de divorce. «Tout est possible après la semaine qui vient de se passer mais, en étant réaliste, non», a répondu à l'AFP Simon Usherwood, du cercle de réflexion universitaire Changing Europe.

Pour lui, la seule façon de revenir en arrière sur le Brexit «passerait par de nouvelles élections législatives». Une option qui n'a actuellement les faveurs d'aucun responsable politique britannique car «cela ne ferait que prolonger l'incertitude».

Mme May a reçu le soutien du tabloïd Daily Mail qui titrait vendredi à la une: «Il y a le feu dans la maison, et seule Theresa peut l'éteindre».

Selon le quotidien conservateur Daily Telegraph, qui la présente également comme «la favorite», Mme May est pour l'heure soutenue par plus de 60 députés conservateurs parmi lesquels neuf ministres.

«Theresa est la mieux placée pour mener notre sortie de l'UE», a déclaré le ministre de la Défense Michael Fallon, saluant «son bilan, son tempérament et son engagement à unir le parti et le pays».

Elle aurait également été choisie par nombre des soutiens de Boris Johnson, croit savoir le Daily Telegraph.

La candidature surprise du ministre de la Justice Michael Gove, 48 ans, a été perçue comme un coup de poignard dans le dos de Johnson, qui a fait allusion dans son discours de jeudi à l'assassinat de Jules César par Brutus.

Personne n'avait vu venir Michael Gove, qui avait déjà rompu avec un autre grand ami, David Cameron, en se prononçant en faveur d'un Brexit au printemps.

M. Gove, qui devait révéler vendredi ses intentions dans un discours très attendu, incarne le camp victorieux du Brexit mais doit assumer les conséquences de cette double trahison qui lui vaut nombre d'inimitiés au sein des députés conservateurs, dont 60% ont en outre voté pour un maintien dans l'UE.

«Il y a une fosse profonde réservée en enfer pour les gens comme lui», a écrit sur Twitter le député conservateur Jack Berry.

Le soutien à Corbyn en baisse

Le ministre du Travail Stephen Crabb, l'ancien secrétaire d'État à la Défense Liam Fox et la secrétaire d'État à l'Énergie Andrea Leadsom ont également déposé leur candidature pour succéder à David Cameron.

Les députés conservateurs doivent désormais se mettre d'accord pendant l'été pour désigner deux finalistes et les 150 000 membres du parti choisiront l'élu, qui sera intronisé le 9 septembre.

L'ancien premier ministre travailliste Tony Blair a quant à lui affirmé que les négociations avec l'UE devaient être menées par «un homme d'État sérieux» pour avoir une chance de réussir.

Choisir un ministre ayant fait campagne pour le Brexit serait une erreur, écrit-il dans le Daily Telegraph, selon lequel ces déclarations sont une manière de se positionner pour jouer un rôle dans ces négociations.

Toujours du côté du Parti travailliste, John McDonnell, le bras droit du leader contesté Jeremy Corbyn, devait présenter vendredi la réponse économique du parti au Brexit dans une tentative de montrer que le Labour peut continuer à fonctionner malgré la fronde de 80% des députés contre leur chef.

Un sondage YouGov pour le Times suggère que si Jeremy Corbyn est toujours en position de remporter une nouvelle élection pour la direction du parti, le soutien des militants diminue. Ainsi, 50% des membres du Labour interrogés entre lundi et jeudi voterait pour Corbyn mais 47% ne le ferait pas. Un précédent sondage en mai plaçait ce soutien à 64% contre 33%.