À la conquête de la mairie de Paris en mars, une ex-ministre de droite à la soif de pouvoir affichée et une militante de gauche longtemps restée dans l'ombre s'affrontent en un duel inédit pour une fonction convoitée pour son poids dans la vie politique française et pour son rayonnement à l'étranger.

Ancienne ministre de l'Écologie de Nicolas Sarkozy, la rousse Nathalie Kosciusko-Morizet, 40 ans, se décrit comme «une tueuse». Aujourd'hui députée, elle se bat sous les couleurs du parti UMP sur fond de querelles intestines marquées par des dissidences de colistiers.

Sans expérience ministérielle et après douze ans passés dans l'ombre du maire socialiste sortant Bertrand Delanoë, comme première adjointe, la brune Anne Hidalgo, 54 ans, bat le pavé en essayant de se démarquer de la politique du gouvernement de gauche, très impopulaire.

Les deux femmes devaient participer mercredi soir pour la première fois à un débat radio-télévisé.

Jusqu'à présent, le duel entre la candidate de droite, surnommée «NKM», diplômée de la prestigieuse École polytechnique formant l'élite française, et Mme Hidalgo, issue d'une famille d'exilés espagnols et ancienne inspectrice du travail, s'est davantage manifesté par de petites phrases assassines sur l'image de chacune que sur l'avenir d'une métropole de 2,2 millions d'habitants.

La presse rapportait ce mois-ci des propos de l'équipe de Mme Kosciusko-Morizet qualifiant le duel de «bataille entre la star et la concierge». Anne Hidalgo, qui a obtenu la nationalité française à 14 ans et évoque souvent son «parcours d'intégration républicaine», a dénoncé la vindicte d'une «caste».

«La plus belle ville du monde»

En juillet, «NKM», dont les aïeux sont polonais, avait affirmé sans ambages être «une tueuse». «Il n'y a que des tueurs en politique. Certains savent tirer, d'autres pas», avait-elle déclaré à la chaîne américaine NBC.

Mme Kosciusko-Morizet ne cache pas ses ambitions pour se présenter aux primaires de 2016 en vue de la présidentielle l'année suivante. Mais lorsque ses adversaires l'accusent de ne considérer la mairie de Paris que comme un marchepied, elle affirme que «sa seule obsession est la bataille pour Paris».

La mairie de Paris, qui permit à un ancien maire, Jacques Chirac, de se hisser au sommet de l'État en 1995, est depuis cette époque perçue comme un puissant tremplin politique.

«NKM» a récemment fait l'objet de railleries après avoir décrit le métro comme un «lieu de charme» où l'on peut connaître «des moments de grâce». Les caricaturistes l'ont par la suite représentée sur une «chaise à porteurs», utilisée par l'aristocratie au 18e siècle, cherchant à «faire peuple».

Ancienne conseillère dans le gouvernement de Lionel Jospin, entre 1997 et 2002, Anne Hidalgo mise sur le terrain pour convaincre les électeurs.

Enquête après enquête, la socialiste est donnée gagnante du scrutin, mais un sondage réalisé début janvier a pour la première fois placé «NKM» en tête du premier tour des municipales attendu le 23 mars.

Côté programme, les deux candidates se livrent à une bataille de chiffres pour que Paris reste fidèle à son image de «plus belle ville du monde».

Anne Hidalgo a présenté un programme d'investissements de 8,5 milliards d'euros (près de 13 milliards de dollars). Elle cite au rang de ses priorités un meilleur accès à un logement, des transports plus confortables, l'importance de la nature dans la ville.

«NKM» a de son côté annoncé sa volonté de réduire les effectifs de fonctionnaires à Paris pour atteindre une économie de 225 millions d'euros (environ 343 millions de dollars) d'ici à 2020. Elle voudrait aussi «piétonniser» le centre-ville et renforcer la politique de sécurité.

Quatre autres candidats sont en lice : un élu écologiste, la secrétaire nationale du Parti de gauche, un avocat du Front national (extrême droite) et un dissident de l'équipe de «NKM», menacé d'exclusion par son parti.