Pour la première fois, un ministre du pape a encouragé mardi la reconnaissance de droits pour les couples non mariés, homosexuels ou non, tout en réaffirmant l'opposition absolue et sans ambiguïté de l'Église au mariage gay.

Le monde politique doit trouver des «solutions de droit privé» et aménager des «perspectives patrimoniales» pour les couples non mariés qui sont toujours plus nombreux et divers au point de former une véritable «archipel», a déclaré le «ministre» de la Famille du Saint-Siège, Mgr Vincenzo Paglia, dont les propos ont été rapportés mardi par le journal catholique Avvenire.

«Dans le cadre de l'actuel code civil et patrimonial, des solutions peuvent être trouvées dont il faut tenir compte, soit au plan patrimonial, soit pour faciliter les conditions de vie afin d'empêcher que des injustices frappent les plus faibles», a dit Mgr Paglia.

«Qu'il y ait des droits individuels à garantir est évident», a-t-il ajouté.

Il répondait à des journalistes sur la position de l'Église face aux différentes formes de foyers - couples non mariés, gays ou non, divorcés remariés, mères célibataires notamment - devenues très courantes et que vivent de nombreux catholiques.

Une question brûlante pour le Vatican, alors que le parlement français est en train d'approuver la légalisation du mariage et de l'adoption par les couples gays, malgré l'opposition des chefs des principales religions de France.

Le sujet préoccupe d'autant plus le Saint-Siège que des réformes sont discutées ou votées non seulement en Europe et aux États-Unis, mais aussi en Amérique Latine. Le sujet monte aussi en Asie. Le pape lui-même a exprimé sa désapprobation, pour des raisons religieuses et «anthropologiques» au nom de la «loi naturelle».

Mgr Paglia, de la communauté de Sant'Egidio, dirige depuis l'an dernier l'important ministère de la Famille, et aborde cette problématique complexe avec un esprit et un vocabulaire plus ouverts et modernes que ses prédécesseurs.

Mgr Paglia a rappelé l'opposition totale à l'adoption par les couples gays: «l'Église, a-t-il expliqué, connaît le prix des fragilités familiales qui est surtout acquitté par les enfants (nés ou non), les personnes âgées, les malades. Des transformations, importantes même, de l'institution familiale ont eu lieu à différentes époques, mais jamais on n'avait abandonné son "génome", c'est-à-dire une institution formée par un homme, une femme et des enfants», a-t-il dénoncé.

Lundi, un autre prélat, Mgr Rino Fisichella, «ministre» de la Nouvelle évangélisation, avait souligné la nécessité de trouver des réponses à ces réalités sociétales : «Le législateur doit apporter des réponses à certaines exigences qui auparavant ne se posaient pas». «Autre chose est d'imposer une loi comme en Espagne, en France au Portugal sans un minimum de débat», a-t-il distingué.

Mgr Paglia s'est aussi opposé à toute forme de discrimination contre les homosexuels, notamment du Moyen-Orient et d'Afrique, où leur relation est parfois passible de la peine de mort: si «dans certains pays», l'homosexualité est considérée comme un «délit», «je voudrais que cela soit combattu».

Les associations homosexuelles italiennes se sont montrées partagées.

Le président de Gaynet, Franco Grillini, a relevé que «pour la première fois un haut prélat reconnaît qu'il y a aussi des droits des couples homosexuels et que, dans de nombreux pays, l'homosexualité est un délit».

Malgré le ton bienveillant de Mgr Paglia, Flavio Romani, président d'Arcigay, relève le nouveau «non» de l'«Église au mariage entre personnes de même sexe, alors même que cette réforme «engrange des voix favorables dans l'opinion publique».

L'affirmation par ce prélat de Curie que des solutions civiles hors mariage doivent être trouvées pour ces formes d'union n'est pas révolutionnaire, et ne concerne pas seulement les couples gays, observe-t-on.

Le Vatican exprime sa reconnaissance d'une nécessaire protection de ces situations multiples, tout en maintenant que le mariage chrétien homme/femme, indissoluble et pour la vie, est la seule solution catholiquement conforme. Il continue d'appeler les catholiques à s'y engager.