La BBC, déjà ébranlée par la retentissante «affaire Savile» - du nom d'un ex-animateur accusé de centaines d'abus sexuels - traversait samedi une «crise de confiance», après la diffusion d'une enquête accusant à tort de pédophilie un ex-mandarin conservateur de l'ère Thatcher.

Samedi matin, George Entwistle, le directeur général de la chaîne publique britannique reconnaissait sur BBC radio 4 que ce nouveau scandale était à l'origine d'«une grave crise de confiance» pour le groupe.

«Cela concerne Newsnight. Bien sûr que cela a des implications énormes sur la BBC, sur la confiance envers la BBC, mais ce serait une erreur de salir le travail remarquable accompli par le reste de la BBC. 99 % de ce que la BBC diffuse obéit aux critères d'excellence, à la grande satisfaction des téléspectateurs», s'est-il cependant défendu.

La BBC a présenté des excuses «sans réserve» pour avoir diffusé une enquête de Newsnight, son émission-phare d'investigation, dans laquelle un témoin affirmait avoir été victime d'abus sexuels de la part d'un ancien membre important du parti conservateur dans un foyer de jeunes dans les années 1970.

Bien que la chaîne n'eut pas nommément identifié ce responsable politique dans son émission de la semaine dernière, le nom de l'ancien trésorier conservateur Alistair McAlpine avait ensuite largement circulé sur internet.

Le quotidien The Guardian a été le premier vendredi à nommer le politicien, tout en exprimant des doutes sur la validité du témoignage unique l'incriminant.

McAlpine a ensuite catégoriquement démenti dans un communiqué les allégations «totalement fausses et sérieusement diffamatoires». Le membre de la Chambre des Lords a dénoncé la «folie des médias» tandis que ses avocats annonçaient qu'ils porteraient plainte contre tous ceux qui avaient diffusé ces informations, la BBC en tête, même si elle n'avait pas révélé son nom.

Le coup de tonnerre est survenu en soirée quand l'auteur des accusations, Steve Messham a affirmé, dans un communiqué lu par la BBC, que M. McAlpine n'était pas l'auteur des sévices qu'il avait subis et qu'il s'était trompé sur son identité, en présentant «ses excuses sincères et humbles».

«Nous présentons nous aussi des excuses sans réserve pour avoir diffusé cette information», a indiqué la BBC en fin de soirée.

Le communiqué ajoutait que le directeur général de la BBC George Entwistle avait ordonné «une pause immédiate dans toutes les enquêtes de Newsnight afin d'assurer la solidité et la supervision éditoriales».

Excluant pour l'heure de démissionner ou de supprimer l'émission Newsnight, George Entwistle a annoncé samedi attendre pour dimanche la remise d'un rapport sur ce qui s'est passé avant de prendre toute autre décision et «de possibles sanctions disciplinaires, si nécessaire».

La chaîne publique avait déjà essuyé de nombreuses critiques au cours des dernières semaines après les révélations concernant l'un de ses animateurs-vedettes, Jimmy Savile, décédé en 2011 à l'âge de 84 ans. Il est aujourd'hui soupçonné d'avoir abusé sexuellement de quelque 300 enfants et adolescentes sur une période de 40 ans. Trois enquêtes ont été lancées à ce sujet, dont deux internes à la BBC.

Le groupe est notamment accusé d'avoir tenté d'étouffer le scandale en renonçant à diffuser fin 2011, déjà dans Newsnight, un documentaire qui portait sur ces accusations.