Les recherches ont repris vendredi en début de soirée sur l'épave du Concordia, qui se déplace de plusieurs millimètres toutes les heures, tandis qu'une poignante cérémonie a réuni sur l'île du Giglio des proches des personnes mortes dans le naufrage.

«Le navire s'est stabilisé et les recherches sont en train de recommencer dans la partie supérieure» du paquebot, celle qui est émergée, une vingtaine de personnes étant toujours portées disparues, a annoncé à l'AFP Alessandro Busonero, porte-parole de la marine italienne.

La décision de reprendre l'exploration de l'épave, interrompue toute la journée, a été prise à l'issue d'une série de réunions qui ont permis de constater qu'elle s'était stabilisée.

«Nous avons vérifié que les oscillations qui ont eu lieu la nuit dernière n'étaient pas un mouvement continu», a indiqué aux journalistes sur place Cosimo Nicastro, porte-parole des garde-côtes.

Pour la partie sous l'eau, qui est «plus dangereuse» et dont sont chargés notamment les scaphandriers de la marine de guerre, «nous évaluerons demain (samedi) les données sur la position du bateau, et s'il est toujours stable, les plongeurs entreront pour inspecter le pont numéro trois et voir si nous y trouvons encore quelqu'un».

«Nous espérons qu'il y a encore des personnes vivantes, au moins dans la partie émergée du bateau. Si les recherches continuent, cela signifie que nous avons encore de l'espoir», a-t-il ajouté.

Dans l'après-midi, une émouvante cérémonie s'est déroulée sur l'île toscane, où des familles de quelques-unes des victimes se sont rendues en bateau près de l'épave pour y lancer des fleurs avant de se recueillir pour des prières dans la petite église locale.

Le bilan encore provisoire est de 11 morts, dont huit ont été identifiés (quatre Français, un Italien, un Espagnol, un Péruvien et un Hongrois), et 21 personnes sont portées disparues, dont une majorité d'Allemands, ainsi que des Italiens, des Français, des Américains, une Péruvienne et un Indien.

M. Nicastro a aussi évoqué le risque de pollution lié à la présence de plusieurs milliers de tonnes de mazout dans les réservoirs du navire. «La première phase a été d'entourer le navire de bouées flottantes, puis arrivera dans les prochains jours un bateau-citerne pour pomper le fioul», a-t-il dit.

Une troisième opération «encore à l'étude» pourrait consister en «un ancrage du navire pour éviter qu'il ne coule», a-t-il ajouté.

Des experts de Smit Salvage, la société néerlandaise qui devra procéder au pompage du carburant, se sont déclarés prêts à entamer l'opération.

«On était déjà prêt hier, mais on attend le feu vert des autorités. Nous sommes en train de procéder aux derniers réglages», a dit à l'AFP un de ses représentants, Rene Robben.

Cette opération est urgente, car si elles se déversaient dans la mer, les 2400 tonnes de carburant provoqueraient une marée noire dans l'archipel toscan, classé réserve naturelle pour la qualité de sa flore et de sa faune.

En début de soirée, le conseil des ministres réuni à Rome a décidé de décréter l'état de catastrophe naturelle dans la zone.

Le gouvernement, qui prévoit aussi un durcissement de la réglementation sur la circulation des navires aux abords des côtes, a nommé le chef de la Protection civile italienne, Franco Gabrielli, commissaire extraordinaire pour gérer la situation d'urgence liée au naufrage.

«Nous devons nous préparer au pire», a averti Leonardo Marras, le président de la province de Grosseto, dont dépend l'île du Giglio, qui envisage de se constituer partie civile dans la procédure judiciaire en cours.

Mais selon les spécialistes, il serait dangereux d'effectuer le pompage - une opération très compliquée - tout en réalisant les recherches.

En attendant, la société propriétaire du navire, Costa Crociere, a continué d'accabler son commandant, Francesco Schettino, accusé par la justice italienne d'homicides multiples par imprudence, naufrage et abandon de navire, pour lesquels il encourt jusqu'à 15 ans de prison.

Il a menti à ses responsables à terre en expliquant la situation, a estimé vendredi le patron de la société, Pier Luigi Foschi, qui a aussi annoncé la clôture d'une procédure d'embauche de 20 personnes.

Le commandant «ne nous a pas dit la vérité», a déclaré M. Foschi. «Malheureusement, l'équipage lui non plus n'a pas reçu les informations exactes de sa part sur la gravité de la situation», a-t-il déploré.

La justice et la société-mère du navire, qui lui a retiré toute protection juridique (ce qui signifie qu'il doit désormais payer lui-même son avocat), reprochent aussi à M. Schettino d'avoir énormément tardé à reconnaître la gravité de la situation.

Placé en détention peu après le naufrage, il a été assigné à résidence mardi, dans sa maison à Meta di Sorrento, au sud de Naples, sur la Côte amalfitaine. Son avocat a annoncé vendredi un recours contre cette décision.

Depuis leur retour au pays natal, des membres philippins de l'équipage ont multiplié les témoignages accablants pour le commandant, qui selon l'aumônier de bord, le père Taffaele Malena, a «pleuré comme un enfant» dans ses bras après la tragédie.

«Sa faute est d'avoir abandonné le bateau alors que l'équipage, dont nous les Philippins, s'efforçait de sauver les passagers», a déclaré Benigno Ignacio, un cuisinier du navire, au journal Philippine Daily Inquirer.

Des passagers rescapés ont raconté que nombre de chaloupes surchargées n'avaient pu être manoeuvrées qu'avec l'aide de serveurs ou de cuisiniers - des «anges philippins», disent certains survivants - transformés en marins improvisés.

Pour mieux comprendre le déroulement de la tragédie, la police a été chargée par le parquet de rechercher toutes les vidéos tournées à bord par des passagers avec leurs téléphones portables. Une dizaine ont déjà été récupérées.