La retraite à 60 ans, l'un des piliers du modèle social français édifié par la gauche il y a 28 ans, risque de s'écrouler à la faveur du débat sur la réforme des retraites qui va s'engager prochainement, grâce à une ouverture de l'opposition socialiste.

L'âge de départ légal à la retraite en France est de 60 ans depuis 1982. C'est un des acquis sociaux emblématiques datant du président socialiste François Mitterrand.

 

Et pourtant Martine Aubry, la première secrétaire du Parti socialiste (PS), vient de briser un tabou en se déclarant favorable à un départ légal après 60 ans.

«Je pense qu'on doit aller, qu'on va aller très certainement vers 61 ou 62 ans. Je n'imagine pas qu'on aille plus loin», a déclaré le 17 janvier celle qu'on présente désormais comme une «Merkel de gauche» en raison de points communs avec la chancelière allemande Angela Merkel.

En France, l'âge légal est celui qu'il faut atteindre pour percevoir sa pension. Mais des réformes successives ont parallèlement donné la possibilité aux aînés de travailler jusqu'à 70 ans.

Martine Aubry, ancienne ministre du Travail du premier ministre socialiste Lionel Jospin (1997-2002), connue pour avoir mis en place la loi sur la réduction du temps de travail à 35 heures par semaine, semble faciliter ainsi la réforme que veut engager le gouvernement du président Nicolas Sarkozy.

Pourtant, la fille de l'ancien président de la Commission européenne Jacques Delors s'était fait élire à la tête du PS en novembre 2008 sur une ligne plus à gauche, quand elle avait battu de quelques voix Ségolène Royal, candidate du parti à la présidentielle de 2007.

La déclaration de Martine Aubry a immédiatement été accueillie favorablement à droite, au centre et chez les Verts, tandis que certains socialistes l'approuvaient mais que d'autres rappelaient la position officielle du parti en faveur d'un départ à 60 ans.

En revanche les responsables des petits partis plus à gauche ont tiré à boulets rouges sur Mme Aubry.

La France a le dos au mur s'agissant de son très généreux système de retraites. Contrairement à beaucoup de pays européens qui ont déjà engagé des réformes difficiles, les gouvernements de droite comme de gauche ont continuellement repoussé l'échéance d'une profonde réforme, ne prenant que des mesures partielles, sans éviter pour autant d'ailleurs les mouvements sociaux.

Dans plusieurs pays en Europe, l'âge de départ à la retraite est de 65 ans, voire plus.

Tous les pays du Vieux Continent font face au même phénomène: l'espérance de vie des retraités ne cesse de s'accroître alors que la population active régresse, en raison de la chute de la natalité et la progression du chômage.

La France est d'autant plus exposée à cette tendance de fond que son régime de retraite ne repose pas sur des caisses de retraite, mais sur la «répartition», c'est-à-dire sur la solidarité entre les générations: les actifs paient des cotisations qui servent immédiatement au paiement des pensions des retraités.