Nicolas Sarkozy et Gordon Brown ont décidé de tirer un trait sur la polémique suscitée par la nomination du Français Michel Barnier au poste de commissaire européen au marché intérieur et aux services financiers, en réclamant jeudi une taxation mondiale des bonus.

Quelques heures avant un rendez-vous annoncé à Bruxelles en ouverture d'un sommet européen, le président français et le premier ministre britannique ont pris la plume pour célébrer leur réconciliation sur la question sensible de la régulation financière dans les colonnes du Wall Street Journal.

Dans une tribune publiée par le quotidien américain des affaires, les deux dirigeants font assaut de convergences et plaident, au nom de l'Europe et de son «rôle pionnier» depuis le début de la crise, pour un «pacte mondial à long terme» de régulation bancaire.

Le président français, encore accusé la semaine dernière à Londres de vouloir tordre le cou à la City, et le dirigeant britannique y proclament leur volonté de conserver en Europe des «places financières de rang mondial, comme Londres et Paris».

Mais, jugeant «inacceptable» que le contribuable risque d'assumer une nouvelle fois les pertes de marchés financiers restés selon eux «opaques» et d'un «court-termisme excessif», MM. Sarkozy et Brown souhaitent renforcer et étendre au monde entier leur contrôle et leur surveillance.

Au lendemain de la décision inédite de Londres de taxer de 50% le montant des primes versées à leurs employés par toutes les banques qui opèrent sur le territoire britannique, les deux dirigeants suggèrent rien moins qu'un «impôt exceptionnel» mondial sur les bonus versés en 2009. Et l'examen de propositions telles qu'un prélèvement sur les transactions financières.

Ce texte marque clairement la volonté de Paris et de Londres de tourner la page des échanges aigres-doux qui ont accompagné la nomination fin novembre de Michel Barnier à la Commission européenne.

Nicolas Sarkozy n'avait pu s'empêcher de plastronner, y voyant le «triomphe» des idées françaises de régulation sur le «modèle anglo-saxon. «Gordon Brown n'en voulait pas, ça a été une rude bataille», s'était-il réjoui.

Jamais en retard d'une pique anti-française, la presse britannique, mais aussi l'association des banquiers et même le ministre des Finances Alistair Darling, avaient fermement réagi contre des propos vécus comme une attaque en règle contre la City.

À la veille de la rencontre de Nicolas Sarkozy et Gordon Brown, Paris a tenu mercredi à siffler la fin des hostilités en parlant de «tempête dans un verre d'eau». «Le verre est désormais vide, la tempête est passée», a-t-on indiqué à l'Elysée en déplorant les commentaires acides de la presse britannique.

Fort de la toute nouvelle législation britannique anti-bonus, l'entourage du président a souligné leur proximité en matière de régulation bancaire. «S'il y a deux chefs d'État et de gouvernement qui sont exactement sur la même ligne», a-t-on insisté, «c'est Gordon Brown et Nicolas Sarkozy, peut-être même plus que Nicolas Sarkozy et Angela Merkel».

Même reformée sur la finance, l'entente franco-britannique vantée de part et d'autre de la Manche souffre encore d'exceptions. La Grande-Bretagne était ainsi la grande absente d'une réunion jeudi à Paris des pays européens favorables à un maintien de la Politique agricole commune (PAC).