Elle pue. Elle boucane. Elle est bruyante. Elle est minuscule. Elle est le symbole d'une époque d'austérité et de privations, tant des biens que des libertés. Mais près de 20 ans après la fin de sa fabrication, des nostalgiques un peu fous veulent la faire renaître: la Trabant, voiture emblématique de l'Allemagne communiste, pourrait revivre en version écolo-branchée dès 2012.

Martin Simek ne passe pas inaperçu quand il se balade en ville. Sa minuscule voiture fait tourner bien des têtes. Mais si les Nord-Américains ignorent quel modèle de tacot il conduit, les Européens, surtout ceux de l'ancien bloc de l'Est, l'ont bien reconnu: une vraie de vraie Trabant originale, sortie en 1988 de l'usine de Zwickau en RDA (Allemagne de l'Est)!

 

«Elle sent mauvais, elle n'est pas écolo, elle fait rire les gens», raconte Martin Simek. Ce Tchèque d'origine, amateur de voitures anciennes, a acheté sa Trabi sur eBay et l'a fait livrer à Montréal par bateau. Il préfère ne pas dire combien il l'a payée. «Mais le transport a coûté quatre fois plus cher que la voiture...»

Tout ça pour une voiture à la carrosserie de plastique qui atteint péniblement 90 km/h «avec un vent de dos et une petite pente», ironise M. Simek. N'empêche, elle attire le regard. «Beaucoup de gens qui viennent m'en parler ont vécu dans des pays communistes, dit M. Simek. Ils me disent que leurs parents en avaient une, qu'ils ont grandi dedans...»

Attendre 15 ans

Lancée en 1957 en même temps que le premier satellite russe Spoutnik - Trabant signifie «satellite» en allemand -, la voiture du peuple de la RDA a été vendue à plus de trois millions d'exemplaires jusqu'en 1991. «Il y avait cinq ou six marques de voitures qu'on pouvait acheter, se souvient Silva Mader, originaire de Potsdam et arrivée à Montréal en 1994. La Trabant était la moins chère. Mais il fallait attendre 15 ans avant de l'avoir!»

Et elle était très chère: à titre de professeur, Silva Mader gagnait environ 9600 ostmarks (la monnaie est-allemande). Une Trabant pouvait coûter 17 000 ostmarks...

Quelque 50 000 Trabant roulent encore en Allemagne même si elles ont été bannies de plusieurs routes à cause de leurs relents polluants. Mais la voiture emblématique pourrait peut-être connaître une nouvelle vie: la semaine dernière, au Salon de l'auto de Francfort, un concepteur a présenté une version tout électrique de la voiture, la Trabant nT.

Le châssis carré est le même, mais le légendaire moteur deux temps bruyant et polluant a disparu. À la place, les concepteurs ont intégré une pile rechargeable lithium-ion. L'«Elektro-Trabi» a une autonomie de 160 km et peut atteindre 130 km/h. Mais avant de la commercialiser, il faudra qu'un investisseur y mette 47 millions de dollars... Et trouve des clients prêts à l'acheter 30 000$.

Engin cool

La Trabi est devenue un engin cool, surtout auprès des jeunes qui n'ont pas connu le régime communiste. Mais personne ne reste indifférent face à cette voiture témoin d'une autre époque.

Heidi Wagner, qui a quitté la RDA en 1983, garde de beaux souvenirs de vacances familiales en Hongrie ou en Bulgarie en Trabant. Mais de là à s'acheter une Trabant pour se souvenir du bon vieux temps... «Beaucoup de gens ont souffert du régime communiste dès qu'ils touchaient les limites du système. Ici, au Canada, personne ne peut s'imaginer ça.»

 

QUELQUES BLAGUES SUR LA TRABANT

Voiture à la fois célébrée et ridiculisée, la Trabant fait partie de la culture populaire allemande et a engendré son lot de blagues.

Comment dit-on Trabant en chinois?

La «Zu Eng», ce qui signifie « trop étroit « en allemand.

Comment fait-on pour doubler la valeur d'une Trabant ?

On fait le plein d'essence.

Pourquoi la Trabant est-elle équipée de rétroviseurs chauffants ?

Pour ne pas se geler les mains quand on la pousse en plein hiver.