(Austin) La colère d’étudiants américains pro-palestiniens contre la guerre que mène Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza a grossi mercredi aux États-Unis, avec des face-à-face tendus avec la police au Texas, à New York, en Nouvelle-Angleterre et en Californie.

En visite à l’université Columbia à Manhattan – d’où est parti cette dernière vague de manifestations étudiantes commencées en octobre – le président républicain de la Chambre des représentants du Congrès, Mike Johnson, a menacé : « si la situation n’est pas maîtrisée rapidement et si les menaces et intimidations ne cessent pas, il sera alors temps de faire appel à la Garde nationale ».

PHOTO JEENAH MOON, REUTERS

En visite à l’université Columbia, le président républicain de la Chambre des représentants du Congrès, Mike Johnson, a menacé : « si la situation n’est pas maîtrisée rapidement [...], il sera alors temps de faire appel à la Garde nationale ».

Pour « rétablir l’ordre sur ces campus », a martelé le dirigeant conservateur.

Un avertissement qui résonne douloureusement aux États-Unis : le 4 mai 1970, la Garde nationale de l’Ohio avait ouvert le feu à l’université d’État de Kent sur des manifestants étudiants pacifiques, dont quatre avaient été tués.

M. Johnson, proche de l’ex-président républicain Donald Trump candidat à sa réélection, a averti qu’il exigerait du président démocrate Joe Biden d’« agir » et jugé que les manifestations pro-palestiniennes « mettaient une cible sur le dos d’étudiants juifs aux États-Unis », qui comptent le plus de juifs au monde (quelque six millions) après Israël.

« Liberté d’expression »

Depuis le début du conflit à Gaza en octobre, les universités américaines sont secouées par des débats parfois violents sur la liberté d’expression et des accusations d’antisémitisme et d’antisionisme qui ont coûté leurs postes cet hiver aux présidentes de Harvard et de l’université de Pennsylvanie.

« Profitez de votre liberté d’expression », a lancé, provocateur, M. Johnson, hué par des centaines d’étudiants de Columbia vent debout contre la guerre d’Israël contre le Hamas qui a tué quelque 34 200 personnes, la plupart des civils, selon le ministère de la Santé du mouvement islamiste palestinien.  

L’attaque sans précédent du 7 octobre 2023 menée par le Hamas a fait 1170 morts, essentiellement civils, selon un bilan de l’AFP établi à partir de données officielles.

Mercredi, la Maison-Blanche a réaffirmé que le président Biden, qui espère être réélu en novembre, « soutenait la liberté d’expression, le débat et la non-discrimination » dans les universités.

Depuis le regain de tensions la semaine dernière à Columbia, le mouvement s’est étendu à d’autres campus.  

Alliance États-Unis/Israël

Notamment dans les États de la Nouvelle-Angleterre, dans le nord-est, où des prestigieuses universités ont demandé à la police d’interpeller des manifestants étudiants qui dénoncent l’alliance militaire, diplomatique et économique des États-Unis avec Israël et critiquent les conditions actuelles des Palestiniens.

« En tant que Palestinien, est-ce de ma responsabilité d’être là et de montrer ma solidarité avec la population de Gaza ? Absolument ! », a répondu Yazen, un Américain de 23 ans d’origine palestinienne qui campe depuis quelques jours dans des tentes montées sur le campus de Columbia.  

PHOTO STEFAN JEREMIAH, ASSOCIATED PRESS

Des pancartes sont affichées sur les tentes du campement de la manifestation pro-palestinienne à l’Université de Columbia à New York.

La présidence de l’université a salué « des progrès importants » dans les discussions avec des étudiants pour évacuer ce campement d’ici vendredi.

Dans la nuit de lundi à mardi, 120 personnes avaient été brièvement interpellées devant l’université de New York, au cœur de Manhattan. À Yale, dans le Connecticut, une cinquantaine de manifestants ont aussi été interpellés.

Sa concurrente Harvard, la plus ancienne des États-Unis, en banlieue de la cité historique de Boston, a vu aussi mercredi se monter sur son campus arboré un campement.

Police anti-émeute

À l’autre bout du pays, l’université du Texas à Austin a été le théâtre d’un face-à-face entre des centaines d’étudiants pro-palestiniens et la police, dont nombre d’officiers à cheval et en tenue anti-émeute.  

Certains brandissaient des drapeaux palestiniens et portaient le keffieh, d’autres, encadrés par des policiers, s’étaient enveloppés dans des drapeaux d’Israël.

PHOTO NURI VALLBONA, REUTERS

Les forces de l’ordre font face à des manifestants pro-palestiniens à l’université du Texas.

Et à l’université de Californie du Sud (USC), plusieurs centaines d’étudiants ont manifesté aux cris de « libérez la Palestine », « révolution par l’intifada ».

Dans la foule très diverse, certains agitaient des drapeaux palestiniens, d’autres portaient des keffiehs et des pancartes appelant à « arrêter le génocide » et à un « cessez-le-feu ».

Des centaines de manifestants s’étaient rassemblés mardi soir à Brooklyn, le plus grand arrondissement de New York, à l’appel de Jewish Voice for Peace, un groupe d’Américains juifs de gauche pro-palestiniens, à l’occasion du séder, le rituel de la Pâque juive. Nombre d’entre eux ont été interpellés.

« Nous sommes (les Américains) les instigateurs d’une telle violence, d’une telle haine, c’est terrible », a tonné sur place Rebecca Lurie.