(McAllen) À McAllen, ville du Texas à la frontière avec le Mexique, l’inflation est, comme ailleurs aux États-Unis, un sujet majeur en ce mardi d’élections, mais la question migratoire reste un sujet de préoccupation, dans l’une des portes d’entrée des migrants provenant d’Amérique latine.

« Je pense que le principal problème actuellement, qui nous touche tous, c’est le coût élevé de l’inflation, qui est présente partout dans le monde », estime ainsi Tony Jalomo, retraité de 57 ans qui se rend au bureau de vote installé dans le bâtiment de soins infirmiers de la ville, mais « l’immigration est un problème américain et on a besoin que les deux partis discutent pour trouver une solution ».

Dans cette ville, dont 80 % de la population est d’origine hispanique, la principale préoccupation lors de ces élections de mi-mandat qui concernent tant le Congrès que de nombreuses fonctions locales, reste en effet de savoir ce que les autorités feront face à la hausse de la pression migratoire sur la frontière.

Car McAllen est l’une porte d’entrée aux États-Unis privilégiée des migrants, avec un pont enjambant le Rio Grande traversé par des centaines de voitures chaque jour, et un mur construit sous l’administration Trump qui fait désormais partie du paysage.

Malgré tout, des milliers de migrants, d’Amérique centrale, de Cuba, du Venezuela ou de Haïti tentent de traverser le fleuve par tous les moyens pour pénétrer sur le sol américain.

Bastion démocrate

Signe de cette pression qui ne faiblit pas, plus de 2,5 millions de personnes ont été détenues en centre de rétention entre le 1er octobre 2021 et le 31 août 2022, selon la police aux frontières.

La plupart quittent leur pays poussés par la pauvreté, la violence et l’absence de perspective, des raisons qui ne trouvent pas beaucoup d’écho favorable au nord de la frontière.

« Ils ont cassé le système d’immigration […]. Les ambassades, les consulats, les guérites ou les ponts internationaux ne servent à rien. Des tas de gens traversent le Rio Bravo. Les États-Unis sont victimes d’une invasion silencieuse par 11 millions de migrants irréguliers », dénonce ainsi Francisco Cabral, 71 ans, en utilisant le nom donné par les Mexicains au fleuve séparant les deux pays.

Cet ouvrier d’ascendance mexicaine, qui est né et a toujours vécu aux États-Unis, fait ainsi allusion à la volonté du président Joe Biden de régulariser 11 millions de migrants sans papiers vivant sur le sol américain, une initiative qui pourrait se compliquer si le parti républicain obtient la majorité aux deux chambres du Congrès.

McAllen est historiquement un bastion démocrate, mais, ces dernières années, les conservateurs ont gagné du terrain et une candidate républicaine, Monica De La Cruz, a aujourd’hui la possibilité de l’emporter et d’entrer à la Chambre des représentants.

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Monica De La Cruz

Ouvertement républicain lui-même, M. Cabral considère que le président Biden conduit le pays « au désastre » et ne veut pas voir ses impôts financer des programmes sociaux à destination des migrants.

Peur et division

Pour Juanita Gonzales, une retraitée de 60 ans, il est essentiel que ce territoire reste aux mains des démocrates.

« Mais c’est quelque chose de complexe car on ne voit pas clairement quelles sont les intentions des uns ou des autres », regrette-t-elle.

Carlos Fantini, vendeur de voitures, pense lui que « le principal problème est le trafic humain ici, à la frontière ».

S’il se sent « triste pour ces gens qui doivent immigrer », il insiste aussi sur ce que les migrants apportent en arrivant : « Ils vont travailler, payer leurs impôts, ils vont faire des choses positives ».

Une vision opposée à celle des républicains, pour qui l’immigration provoque de l’insécurité contre laquelle il faut lutter en accordant des moyens supplémentaires à la police aux frontières, afin de protéger les familles de McAllen.

Conscient du risque de voir la ville basculer, l’ancien président démocrate Bill Clinton s’est rendu sur place afin de soutenir la candidate démocrate, elle-même hispanique, Michelle Vallejo.

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Michelle Vallejo

Commerçante de son état, Mme Vallejo assure que McAllen peut apporter de nombreuses opportunités, pour peu qu’il y ait des investissements. Bill Clinton, de son côté, pense que les républicains nourrissent la haine envers les migrants.

« Ils ne veulent pas que vous réfléchissiez. Ils veulent que vous ayez peur, vous diviser, ils veulent que vous regardiez vers d’autres personnes et que vous pensiez que les différences sont plus importantes que notre humanité commune », a ainsi lancé l’ancien président démocrate lors d’un rassemblement.

Romelia Hinojosa, une Mexicaine de 64 ans qui réside depuis plus de vingt ans à McAllen, estime qu’« en tant qu’humains, nous avons tous des opportunités, et si se présente celle de venir pour améliorer sa qualité de vie parce que c’est impossible dans son propre pays, alors bienvenue ».

« Tant qu’ils font les choses correctement », ajoute-t-elle.