(Washington) Une certaine pompe. Des circonstances très différentes. L’assermentation d’un nouveau président est censée être la reluisante vitrine d’un esprit démocratique inaliénable.

Mais celle de Joseph R. Biden fils, qui se déroulera mercredi, risque plutôt de donner la sensation d’un mariage forcé.

« C’est comme si on était dans un pays assiégé », décrit Brett Bruen, un consultant et un ancien diplomate américain qui a travaillé comme conseiller à la Maison-Blanche de Barack Obama.

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L’assermentation de 2021 n’allait pas être la plus somptueuse cérémonie des dernières années à cause de la pandémie de COVID-19, mais l’émeute du 6 janvier en Capitole n’a rien fait pour améliorer la situation.

Mais le déchaînement du 6 janvier à Capitol Hill n’a fait qu’empirer les choses.

Des centaines de partisans de Donald Trump, rendus furieux par les mensonges du président ont pris d’assaut le bâtiment pendant que le Congrès votait pour certifier la victoire de Biden. Cinq personnes, dont un agent de police du Capitole, ont perdu la vie au cours de ces évènements violents.

Les autorités se préparent en vue des nombreuses autres manifestations d’appui à Donald Trump qui pourraient se dérouler dimanche à Washington et les autres capitales d’État. Elles espèrent bien éviter les troubles du 6 janvier.

Un champ de drapeaux

Les retombées du 6 janvier sont bien visibles au centre-ville de Washington.

D’imposantes clôtures de fer ceinturent les endroits importants. La Garde nationale patrouille dans les rues de la capitale.

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Le Capitole, qui est normalement une toile de fond étincelante pour l’un des rituels les plus sacrés de la démocratie américaine, porte encore les cicatrices.

La foule qui envahit habituellement le National Mall, le parc entre le Capitole et le Lincoln Memorial, sera remplacée par un « champ de drapeaux ».

La mairesse Muriel Bowser exhorte les gens à ne pas se rendre à Washington pour assister à l’assermentation de M. Biden.

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La mairesse de Washington, Muriel Bowser

Les images de dizaines de milliers de soldats armés et de policiers gardant les barrières de deux mètres entourant le Capitole, seront gravées dans la conscience américaine pour les années à venir.

« Tout cela à cause de l’ego blessé d’un homme, déplore M. Bruen. C’est un moment triste et honteux pour notre pays. »

À l’ambassade du Canada

Au cours des dernières cérémonies de prestation de serment, une garde d’honneur composée d’agents de la GRC se tenait à l’extérieur du bâtiment, saluant le nouveau président lorsque son cortège passait. Le personnel diplomatique accueillait toutes sortes de dignitaires étrangers venus observer le déroulement de la journée.

« Avec le défilé, vous aviez les fanfares de tous les États — les 50 États et territoires, se souvient Gary Doer, qui était l’ambassadeur du Canada aux États-Unis pendant la présidence de Barack Obama. Ces fanfares remplacées par des soldats en marche. C’est tout simplement horrible, mais nécessaire. »

L’ambassade a beaucoup réduit son personnel depuis le début de la pandémie. Une porte-parole Diana Tam refuse de dire si de nouvelles mesures de sécurité ont été mises en place en vue de mercredi.

« La sûreté et la sécurité des employés travaillant dans nos missions à l’étranger demeurent une priorité clé pour le gouvernement du Canada, dit-elle. Nous ne fournissons pas de détails spécifiques concernant la sécurité de nos missions à l’étranger. »

Vendredi, les rues normalement animées de Washington étaient étrangement vides pendant que les Humvees et les transports de troupes, à usage militaire, bloquaient les principales intersections.

Le célèbre Willard Intercontinental Hotel, à côté de la Maison-Blanche, a tenté de raviver l’esprit de fête en plaçant des drapeaux devant ses fenêtres et une bannière accueillant la nouvelle administration. Le majestueux bâtiment du Trésor était décoré de banderoles.

Mais rien ne masquait un sentiment d’appréhension.

« Je suis tellement triste à propos de cette fortification de la capitale de notre pays, non seulement avec la police, mais avec l’armée, avec des armes en bandoulière sur la poitrine, dit Susan Saudek, une retraitée de Baltimore qui vit à seulement quatre pâtés de maisons du Capitole. Je suis vraiment triste pour les États-Unis que cela se soit produit. En même temps, je suis reconnaissante pour la protection. »

Le comité organisateur a fait de son mieux pour établir un programme intéressant.

Lady Gaga chantera l’hymne national. Jennifer Lopez sera à l’affiche. La cérémonie sera diffusée en direct par la plupart des grands réseaux, ainsi que par une multitude de services de streaming en ligne.

Les organisateurs disent que M. Biden se rendra à la Maison-Blanche, accompagnée d’une escorte présidentielle traditionnelle. « Cela fournira au peuple américain et au monde entier des images historiques d’un président désigné se rendant à la Maison-Blanche sans attirer de grandes foules et rassemblements. »

Et la journée se terminera par une célébration aux heures de grande écoute du thème inaugural « America United » (« Une Amérique unie »), animée par Tom Hanks et mettant en vedette des artistes comme Jon Bon Jovi, Demi Lovato et Justin Timberlake.