(New York) Assez peu visibles jusqu’ici dans les rues de New York, masques, écharpes et foulards se sont démultipliés vendredi après l’appel du maire à se couvrir le visage pour contenir la propagation du coronavirus.

Sur plusieurs centaines de personnes observées dans différents quartiers de Manhattan par des journalistes de l’AFP, un peu moins de la moitié avaient dissimulé bouche et nez.

« Je porte un masque pour la première fois aujourd’hui », témoigne Mitch Cassel, ophtalmologiste de 64 ans, également équipé de gants. « La santé, c’est notre patrimoine en ce moment ».

Près de 50 000 personnes ont été testées positives au coronavirus à New York (49 707), qui a déjà enregistré 1562 décès. La ville est plus que jamais l’épicentre de la pandémie aux États-Unis.

Au chômage technique depuis quelques jours, Nicole Knable porte elle aussi pour la première fois un masque dans Central Park, même si elle s’était déjà couvert le visage pour aller faire ses courses.

« C’était surtout parce que mes enfants m’ont demandé de le faire », explique cette employée dans la mode, dont les deux enfants sont rentrés de leur université le temps du confinement.

Voir de plus en plus de New-Yorkais dissimuler bouche et nez la rend « heureuse ». « J’ai le sentiment que nous faisons attention les uns aux autres. J’espère que c’est ce qui en ressortira, que les gens seront plus attentionnés envers autrui ».

PHOTO KATHY WILLENS, ASSOCIATED PRESS

Dans l’immeuble de Stacey Lewis, à Midtown, on rassemble du tissu, pour une voisine qui travaille dans le Garment District, le quartier de la confection, et s’est lancée dans la fabrication de masques.

Les habitants de l’immeuble ont décidé de donner à une autre voisine, infirmière, les masques industriels qu’ils avaient achetés et se contenteront désormais de ces créations d’un genre nouveau.

« On apprend à se connaître dans l’immeuble et avec les voisins de celui d’à côté », se félicite-t-elle en promenant son chien. Porter un masque, « ça ne peut pas faire de mal ».

« Messages contradictoires »

Dans Central Park, tous les joggeurs, nombreux, ont le visage découvert. Difficile de courir avec la bouche obstruée.

Livreur pour la plateforme de restaurants Relay, Vicente a aussi du mal. « Je m’étouffe », dit-il. « Je n’arrive pas à respirer ».

Il s’en passe, donc. « Je ne porte pas de masque parce que je crois en Dieu et que tout ira bien ».

Adam Alvaro, lui, refuse par principe, même s’il a bien entendu les consignes du maire jeudi.

« Je n’arrête pas d’entendre des messages contradictoires », dit-il. « Un jour, on me dit de ne pas en porter et de les laisser aux soignants, et le lendemain on me dit d’en mettre ».

Le maire de New York Bill de Blasio et plus largement les autorités, jusqu’à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ou les Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC), payent là le revirement brutal, après des semaines passées à dissuader le public de porter un masque.  

« Ils ont attendu parce qu’ils voulaient ramasser des masques pour le personnel de santé et éviter que les gens ne les accumulent », fait valoir Stacey Lewis.

« Il y a des gens qui amassent des masques », regrette Fazal Rehman, pharmacien dans le quartier d’Upper East Side.

Tous les jours, des inconnus l’appellent pour proposer des masques à son officine, Value Price Pharmacy, jusqu’à 10 dollars pièce.

Fazal Rehman ne veut pas « se faire de l’argent » grâce à la détresse des gens, assène-t-il, remonté. « C’est au-delà du maire. Dieu nous regarde ».

Il recevra lundi une livraison de 300 masques, achetés 2 dollars pièce. Il assure qu’il les distribuera gratuitement à ses clients.

Il a bien entendu le message du maire, qui suggère de fabriquer son propre masque, « mais tout le monde ne va pas se mettre à la couture ».