Donald Trump a stupéfait nombre d'alliés républicains en annonçant un nouvel assaut contre le système d'assurance santé Obamacare puisque cette promesse, potentiellement explosive à l'orée de la présidentielle 2020, a galvanisé les démocrates ravis de placer ce sujet porteur au coeur de leur campagne.

Après avoir empoisonné les deux premières années de son mandat, l'enquête russe du procureur Mueller venait à peine de se conclure lorsque le président républicain a soudainement ouvert un nouveau front.

La Maison-Blanche a juré mardi de parvenir au démantèlement d'Obamacare, un système de santé mêlant couvertures publique et privée qui a permis à des dizaines de millions d'Américains d'obtenir une assurance.   

Un «désastre» trop cher pour les usagers, selon Donald Trump.  

Après avoir échoué à faire passer au Congrès l'abrogation de cette loi honnie des républicains, la Maison-Blanche privilégie cette fois la voie judiciaire, en soutenant la position d'un magistrat du Texas qui remet totalement en cause ce système imposé de haute lutte par l'ex-président démocrate Barack Obama.

Optimiste, M. Trump a proclamé mercredi que si, au final, «la Cour suprême décide de mettre fin à Obamacare, nous aurons un plan bien meilleur». Sans le détailler.  

«Le parti républicain va devenir le parti de la santé», martèle-t-il depuis le début de semaine.

Avant-goût de l'un des grands slogans de campagne pour sa réélection?

«Guerre contre» Obamacare

En face, les démocrates se sont emparés avec enthousiasme du sujet.  

Ils ont présenté mardi un projet de loi qui renforcerait l'Obamacare, ou «Affordable Care Act» (ACA), de son vrai nom.  

«Dans un contraste saisissant, l'administration Trump a radicalement étendu sa guerre contre le système de santé américain cette semaine», a souligné jeudi la présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi.  

Dans un Congrès divisé entre Chambre démocrate et Sénat républicain, il semble peu probable qu'une réforme républicaine soit adoptée d'ici les élections présidentielle et parlementaires de novembre 2020.

Et face à l'opinion publique, les démocrates partent avec un avantage que peu auraient imaginé en 2010, lorsqu'Obamacare avait été approuvé malgré les foudres des républicains.

Depuis, le système a largement gagné en popularité.  

Les républicains s'en sont douloureusement rendu compte en novembre 2018, lorsqu'ils ont perdu la Chambre après que de nombreux candidats démocrates ont centré leur campagne sur les «attaques» menées depuis la Maison-Blanche contre Obamacare.  

Ils brandissaient notamment la menace pesant sur l'un des principes les plus populaires de l'ACA : l'obligation pour les compagnies d'assurance d'accepter tous les clients.

S'il venait à disparaître, des millions d'Américains souffrant de pathologies chroniques ou ayant eu une maladie grave pourraient se retrouver sans couverture médicale. Comme avant Obamacare.

Sur ce point désormais extrêmement sensible, Donald Trump promet que ces patients resteront couverts dans le plan républicain, qui reste à élaborer.  

Candidats poussés vers «l'extrême gauche»

«Consterné», «surpris» : certains élus républicains ont affiché leur déception après la décision du président.  

Mais d'autres se sont montrés heureux que Donald Trump fasse pression sur ses troupes pour qu'elles présentent une alternative libérale aux plans «socialistes» des démocrates.  

L'assurance maladie figure en effet déjà en tête des thèmes développés par les candidats démocrates à la présidentielle de 2020, beaucoup prônant un système universel - ou «Medicare for All» - qui passerait par une extension du système public Medicare bénéficiant déjà aux plus âgés.

La plupart des prétendants démocrates à la Maison-Blanche ont d'ailleurs réagi avec indignation à l'annonce de la Maison-Blanche.  

Pour Patrick Hynes, stratège républicain, la tactique de Donald Trump «pourrait être brillante».  

«En lançant une bombe puante dans le débat public, le président va pousser tous les candidats et la plupart des responsables démocrates vers l'extrême gauche» en se ralliant à cette proposition d'un Medicare for All, veut-il croire.  

Le politologue Larry Sabato donne plutôt l'avantage à l'opposition. «Les Américains font confiance aux démocrates et non aux républicains pour livrer le type de réforme de la santé dont on a besoin».  

Mais «Trump a une seule priorité depuis qu'il est entré en campagne», poursuit M. Sabato : «Plaire à sa base la plus fidèle. Et ceci en est le dernier exemple. Ses fervents supporteurs détestent Obamacare».