Les autorités fédérales ont lancé une enquête de droits civiques relativement au geste d'un automobiliste qui a foncé sur une foule qui manifestait contre un rassemblement de suprémacistes, à Charlottesville, en Virginie, tuant une femme de 32 ans et en en blessant près d'une vingtaine d'autres.

Le procureur général Jeff Sessions en a fait l'annonce tard samedi. La violence et les morts à Charlottesville «frappent au coeur de la justice et du droit aux États-Unis», a écrit M. Sessions. «Quand de telles actions émanent du sectarisme racial et de la haine, cela trahit nos valeurs profondes et ne peut pas être toléré», a-t-il affirmé.

Le FBI a indiqué par communiqué qu'il rassemblait les faits et recueillait les éléments de preuve.

Un homme de 20 ans originaire de l'Ohio, James Alex Fields, a été arrêté et accusé sous plusieurs chefs dont un de meurtre au deuxième degré puisqu'il aurait foncé samedi avec son véhicule sur une foule de contre-manifestants. Il pourrait aussi faire face à des accusations fédérales, dépendant des conclusions de l'enquête.

L'automobiliste accusé avait été pris en photo quelques heures auparavant arborant l'emblème de l'un des groupes d'extrême-droite ayant organisé la campagne «take America back». Vanguard America a nié dimanche tout lien avec le suspect, disant que des objets associés au groupe avaient été distribués à diverses personnes lors de l'événement.

Un organisateur du rassemblement à Charlottesville la veille a tenté dimanche de tenir une conférence de presse, mais une foule de plusieurs centaines de personnes l'a chahuté et forcé à s'éloigner de la tribune.

Le blogueur Jason Kessler a été entouré de caméras et de personnes lorsqu'il s'apprêtait à parler près de l'hôtel de ville. Certaines personnes ont crié et fait du bruit avec des instruments, scandant notamment qu'il portait «le mauvais couvre-chef», en référence au Ku Klux Klan.

Jason Kessler a fait semblant de regarder sa montre et a indiqué qu'il attendrait avant de prendre la parole.

Un homme l'a poussé, et le blogueur a demandé l'aide de policiers. Ils l'ont éventuellement escorté hors du secteur. Aucune arrestation n'a été effectuée.

Le maire de Charlottesville, Mike Signer, a parlé en entrevue dimanche à NBC d'une «attaque terroriste» ayant utilisé une voiture comme arme.

M. Signer a soutenu que les affrontements violents entre des suprémacistes blancs et des contremanifestants résultent des divisions politiques croissantes aux États-Unis, décriant «une grossièreté triste et regrettable» dans le milieu politique.

Trois personnes sont mortes et des dizaines d'autres blessées dans le cadre de ce qui aurait constitué le plus grand rassemblement de suprémacistes blancs en au moins dix ans pour s'opposer à la décision de la Ville de retirer une statue de Robert E. Lee, le commandant en chef de l'armée sudiste pendant la Guerre civile américaine. Les autres personnes décédées sont deux membres de la police de l'État de Virginie dont l'hélicoptère dans lequel ils prenaient place s'est écrasé.

La réaction du président Trump suscite de nombreuses critiques

La réaction du président américain Donald Trump à ces violences a provoqué de nombreuses critiques, car M. Trump a déclaré que «plusieurs camps» en étaient responsables.

En conférence de presse, le président des États-Unis a condamné «en les termes les plus forts» ce qu'il a qualifié de «démonstration odieuse de haine, de sectarisme et de violence». Il a prôné un retour à la loi et à l'ordre.

Dimanche, la Maison-Blanche a publié un communiqué cherchant à élargir la portée des propos de M. Trump.

«Le président a affirmé de manière très forte (samedi) qu'il condamne toutes les formes de violence, de sectarisme et de haine, et bien sûr, cela inclut les suprémacistes blancs, le KKK, les néo-nazis et tous les groupes extrémistes. Il a appelé à l'unité nationale et au rassemblement de tous les Américains», selon un porte-parole de la Maison-Blanche.

La Maison-Blanche n'a pas voulu identifier le nom d'un membre du personnel dans le communiqué.

M. Trump n'a pas répondu aux questions des journalistes samedi demandant s'il rejetait le soutien de suprémacistes blancs à son endroit ou s'il estimait que le véhicule ayant foncé dans la foule était un exemple de terrorisme intérieur. Des membres de l'équipe de M. Trump ont affirmé sur les ondes d'émissions d'information, dimanche, que la Maison-Blanche condamnait les suprémacistes blancs, mais plusieurs républicains ont demandé de l'entendre de M. Trump.

Le démocrate Adam Shiff a écrit que le président doit se prononcer «contre le retour en force des suprémacistes et qu'il n'y a pas plusieurs camps, juste le bien et le mal».

Le sénateur républicain Orrin Hatch a dit: «Nous devons appeler le mal par son nom. Mon frère ne s'est pas sacrifié en combattant Hitler pour que les idées nazies ne soient pas défiées.»

Le sénateur Marco Rubio a écrit qu'il n'y a «rien de patriotique chez les  Nazis,  KKK ou  WhiteSupremacists», disant que ces groupes sont «tout à fait contraires» à ce que souhaitent représenter les États-Unis.

La seule manifestation publique du président, tôt dimanche, a été le relais d'un gazouilli saluant la mémoire de deux policiers tués dans l'écrasement de hélicoptère surveillant les affrontements à Charlottesville.

AP

James Alex Fields (deuxième à partir de la gauche) lors d'un rallye à Charlottesville.