Pour son retour à Washington, après avoir été diagnostiqué d'un cancer du cerveau, il avait été accueilli comme un héros, notamment par Donald Trump. Mais c'est bien John McCain, éternelle épine dans le pied de Donald Trump, qui a sauvé Obamacare en votant avec les démocrates.

Tard dans la soirée jeudi, alors que la chambre haute du Congrès était sur le point de voter sur une « abrogation a minima » d'Obamacare, le vice-président Mike Pence, également président du Sénat, s'est entretenu pendant 10 minutes avec l'octogénaire, pour essayer - une dernière fois - de le faire changer d'avis.

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Peine perdue. À 1 h 29 du matin, l'octogénaire s'est avancé et a tendu la main. Après avoir fait durer le suspense quelques secondes, comme un empereur romain qui a le choix d'épargner la vie d'un gladiateur dans l'arène, la sentence est tombée: pouce baissé. « Non ».

Un peu plus tôt, Lisa Murkowski et Susan Collins, deux sénatrices républicaines, avaient fait de même. Les jeux étaient faits.

Quelques démocrates ont applaudi l'ancien candidat à l'élection présidentielle de 2008, revenu à Washington deux jours auparavant, pareil à lui-même, si ce n'est pour une cicatrice au-dessus de son oeil gauche, seul témoin de son opération survenue il y a quelques jours à peine.

Avec une faible majorité des républicains au Sénat (52 sièges), chaque vote allait compter, et surtout celui de l'iconique sénateur républicain de l'Arizona. Le président Trump en était bien conscient.

« Trois républicains et 48 démocrates laissent tomber le peuple américain », a twitté le président Trump après le vote, « comme je l'ai dit depuis le début, laissez l'Obamacare imploser, puis négociez ».

Mardi, à peine arrivé au Congrès, John McCain avait sauvé son camp, en apportant une voie décisive pour permettre l'ouverture du débat sur l'abrogation de la réforme du système de santé de Barack Obama.

Mais jeudi, avant le vote, il avait prévenu qu'il voterait contre l'« abrogation a minima », malgré les encouragements répétés distillés par Donald Trump aux parlementaires sur Twitter.

L'ancien adversaire de Barack Obama n'est pas un grand défenseur de la réforme de santé passée par le président démocrate en 2010, loin s'en faut.

Mais les faiblesses criantes du plan républicain, bricolé à la va-vite et qui laisserait des millions d'Américains démunis sur le carreau, étaient impossibles à ignorer pour lui.

« Cette "abrogation a minima" ne proposait pas de solutions de remplacement pour réformer notre système de santé et offrir une assurance-santé de qualité à nos concitoyens », a-t-il écrit dans un communiqué après le vote.

Beaucoup d'analystes ont vu dans ce geste une nouvelle provocation envers le président, dont le sénateur McCain n'a jamais été un grand supporter.

Il faut dire qu'en 2015, le candidat Trump - qui n'a jamais effectué son service militaire - avait publiquement remis en cause l'honneur de ce vétéran du Vietnam, prisonnier de guerre pendant plus de cinq ans et torturé dans les geôles de Hanoï.

« J'aime les gens qui ne font pas capturer », avait déclaré le milliardaire.

De l'eau a passé sous les ponts depuis, mais John McCain n'a sûrement pas oublié.

« La réponse de John McCain à Trump - la vengeance est un plat qui se mange froid », a tweeté après le vote le représentant démocrate Steve Cohen.