Le ministère américain de la Justice a annoncé lundi l'ouverture d'une vaste enquête sur la police de San Francisco, dans le sillage d'un retentissant scandale causé par la mort dans la ville californienne d'un Noir de 26 ans abattu par des policiers.

Cette enquête fédérale intervient deux mois après l'ouverture d'investigations similaires visant la police de Chicago et neuf mois après le début d'une enquête sur la police de Baltimore.

Ces trois métropoles ont été agitées par des protestations déclenchées par la mort de jeunes noirs tués par des policiers.

L'enquête «indépendante et complète» est lancée à Washington alors que des centaines de manifestants ont marché samedi à San Francisco pour exiger le limogeage du chef de la police, Greg Suhr.

«Dans les jours et les mois qui viennent, nous allons examiner les protocoles opérationnels actuels de la police de San Francisco, ses modes de formation, ses mécanismes de responsabilité, afin de déterminer les domaines clés d'amélioration future», a déclaré la ministre américaine de la Justice, Loretta Lynch.

Cette entrée en jeu des autorités fédérales, souhaitée par des responsables associatifs et une partie des habitants de San Francisco, intervient dans un contexte de profonde défiance communautaire dans diverses villes américaines où des brutalités policières ont coûté la vie à des Noirs et déclenché des manifestations, voire des émeutes.

Le ministère n'a pas mentionné explicitement lundi l'affaire Mario Woods, dont la mort à San Francisco le 2 décembre dernier suscite depuis une vive controverse. La scène avait été saisie par des smartphones.

Les circonstances du décès brutal de ce Noir de 26 ans ont en effet été comparées à celles d'un peloton d'exécution: au moment où il a été fauché par les balles des policiers, l'homme de petite taille était debout et en partie recroquevillé contre un mur, tenu en joue par au moins six agents des forces de l'ordre.

Vidéo très perturbante

Selon les policiers, Mario Woods refusait de lâcher un couteau qu'il tenait en main.

Le maire de San Francisco Edwin Lee avait qualifié de «très perturbante» la vidéo de l'incident et promis une enquête transparente.

Un porte-parole de la police de San Francisco, Gordon Shyy, a pour sa part assuré à l'AFP que le San Francisco Police Department (SFPD) «coopérait avec l'enquête sur les pratiques et formations suivies par notre police, pour s'assurer qu'elle fait toujours des progrès afin de devenir une meilleure organisation».

M. Shyy a aussi indiqué qu'il y avait «trois enquêtes (internes) en cours dans l'affaire Mario Woods» et que «les officiers impliqués sont actuellement en congé administratif payé».

Cette affaire évoque l'homicide choquant d'un adolescent noir par un policier blanc à Chicago, dont les images rendues publiques le 24 novembre ont entraîné une onde de choc aux effets durables dans la troisième ville des États-Unis.

Jason Van Dyke, un policier blanc, avait ouvert froidement le feu en octobre 2014 sur Laquan McDonald, 17 ans, le criblant de 16 balles alors qu'il ne présentait pas de danger immédiat pour les forces de l'ordre.

Après avoir entraîné le renvoi de Garry McCarthy, le chef de la police de Chicago, cette bavure a déclenché une retentissante enquête fédérale et placé en difficulté le maire de Chicago lui-même, Rahm Emanuel.

Ces 18 derniers mois, les autorités fédérales ont lancé des enquêtes visant d'autres villes des États-Unis où les policiers ont été accusés de racisme ou d'abus de pouvoir, comme à Baltimore, dans l'est des États-Unis, ou à Ferguson dans le centre du pays.

Dans la première ville, de violents incidents ont éclaté au printemps 2015 après la blessure fatale subie par Freddie Gray, un Noir de 25 ans, dans un fourgon de la police. La deuxième ville a été le théâtre de manifestations et d'émeutes à l'été 2014 après la mort de Michael Brown, un Noir de 18 ans abattu par un policier.