Le système créé par l'administration Bush pour enfermer et juger les suspects de terrorisme a subi une énième remise en cause mardi, mais c'est au prochain président qu'il appartiendra de fermer le camp de Guantanamo, a dit la Maison Blanche.

Et cela ne se fera pas d'un «claquement de doigts», a prévenu la porte-parole du président George W. Bush, Dana Perino.

Le même jour pourtant, le dispositif inédit monté après les attentats du 11 septembre 2001 a reçu un nouveau coup avec l'abandon des charges contre cinq détenus du camp devenu, selon ses détracteurs, l'un des symboles des abus de la «guerre contre le terrorisme». Tous risquaient la prison à vie.

Le Pentagone n'a pas expliqué cette décision. Il s'est contenté de laisser la porte ouverte à de nouvelles mises en accusation.

Cependant, cette décision suit de peu la démission du procureur qui était chargé de leur dossier, le lieutenant-colonel Darrel Vandeveld. Celui-ci a démissionné en affirmant que l'armée soustrayait à la défense des éléments à décharge.

Ces accusations se sont ajoutées aux critiques déjà innombrables portées contre un système dans lequel des détenus sont enfermés pendant des années sans mise en cause formelle avant d'être peut-être jugés par des tribunaux militaires, un système qui, selon ses détracteurs, rompt avec les principes historiques de la Justice américaine.

Clive Stafford Smith, avocat d'un des cinq détenus, a estimé que l'abandon des charges contre son client, Binyam Mohamed, était tout sauf une victoire, mais plutôt «la même farce qu'est Guantanamo» puisque l'armée américaine a signifié qu'elle allait rapidement l'inculper à nouveau après avoir pallié les carences dénoncées par le lieutenant-colonel Vandeveld.

Selon plusieurs avocats, le gouvernement américain tenterait d'éviter d'avoir à produire des documents prouvant que les détenus ont subi des interrogatoires musclés et de voir les procédures entachées de nullité.

Le camp de Guantanamo, base de la marine américaine au sud-est de Cuba, et le jugement des suspects par des tribunaux d'exception restent un casse-tête pour une administration à laquelle ils ont valu des désaveux jusqu'à la Cour suprême ainsi que la réprobation internationale.

Les deux candidats à la succession de M. Bush, le républicain John McCain et le démocrate Barack Obama, ont appelé à la fermeture de Guantanamo et fait voeu de restaurer l'image des Etats-Unis à l'étranger.

M. Bush essaie depuis un moment de fermer Guantanamo, a dit sa porte-parole. Mais «c'est très complexe, c'est compliqué, c'est difficile».

«Il y a longtemps que nous disons qu'il ne sera pas fermé avant la fin du mandat du président», a dit Mme Perino.

Elle s'est dite persuadée que celui qui s'installera dans le Bureau ovale le 20 janvier «se rendra compte combien la question est compliquée».

Elle a invoqué les complications causées par la décision de la Cour suprême de reconnaître aux prisonniers de Guantanamo le droit de contester leur détention devant la justice civile. Elle a parlé de la difficulté de faire reprendre des prisonniers par leur pays d'origine ou un pays tiers. Elle a souligné l'inquiétude de l'administration de voir apparaître un nouveau type d'étrangers aux Etats-Unis (d'anciens suspects de terrorisme qui auraient été libérés sur le sol américain) et la nécessité de nouvelles lois.

Depuis l'ouverture du camp en 2002, un seul procès est allé à son terme à Guantanamo.

Selon Mme Perino, il y a actuellement 272 détenus à Guantanamo.