Les scientifiques impliqués dans la recherche sur l'Ebola se retrouvent aujourd'hui dans une véritable course contre la montre. Objectif: tester leurs vaccins et leurs médicaments contre le virus avant que l'épidémie ne s'éteigne.

La baisse importante du nombre de nouveaux cas d'Ebola en Afrique de l'Ouest est évidemment une excellente nouvelle. Mais elle augmente la pression sur les chercheurs qui testent des traitements dans l'espoir qu'une épidémie comme celle qui a mis la planète en alerte l'an dernier ne se reproduise plus.

«Il y a une espèce de course pour utiliser les derniers cas et démontrer si les médicaments et les vaccins sont vraiment efficaces, explique Marie-Paule Kieny, sous-directrice générale, systèmes de santé et innovation, à l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). On sent véritablement une urgence - même si, évidemment, tout le monde est rassuré de penser que cette immense épidémie pourrait bientôt être maîtrisée.»

Pour la semaine qui s'est terminée le 12 avril dernier, l'OMS a recensé 37 nouveaux cas en Guinée et 21 en Sierra Leone. Au Liberia, où l'épidémie semblait hors de contrôle l'automne dernier, aucun cas n'a été recensé.

Au plus fort de la crise, on enregistrait plusieurs centaines de nouveaux cas chaque semaine dans chacun des trois pays.

Au Liberia, le National Institutes of Health (NIH) américain s'apprêtait à vacciner près de 30 000 volontaires afin de tester simultanément les deux vaccins les plus prometteurs contre l'Ebola, dont l'un a été développé au Canada. Or, le projet est aujourd'hui sur la glace.

«Nous discutons avec le NIH de la possibilité de transférer l'étude en Guinée. S'il n'y a plus de cas au Liberia, on ne pourra pas vérifier l'efficacité d'un vaccin», explique Mme Kieny, de l'OMS.

Il faudra cependant évaluer le risque d'interférer avec les nombreuses études déjà en cours en Guinée et en Sierra Leone, d'autant plus que le nombre de cas y est aussi en baisse.

Une lutte en deux volets

Les chercheurs travaillent simultanément sur deux fronts. D'un côté, ils testent des vaccins afin d'immuniser les individus sains contre le virus. De l'autre, ils cherchent des médicaments capables de guérir les malades.

«Il faut les deux outils, dit Mme Kieny. Il est difficile de penser qu'on pourra vacciner des pays entiers. Le vaccin pourrait servir à protéger le personnel médical et éteindre une épidémie naissante en vaccinant les gens en lien avec les gens infectés. Mais il faut aussi des médicaments. Avec un taux de mortalité de 80%, l'Ebola fait peur, et il serait important de pouvoir rassurer et traiter les patients.»

Vaccins mis à l'épreuve

Deux vaccins ont actuellement une longueur d'avance parce qu'on a déjà démontré qu'ils sont efficaces sur les singes et sans danger pour l'être humain. Le premier est le VSV-EBOV, développé par l'Agence de santé publique du Canada et la multinationale Merck. Il est actuellement testé dans trois études distinctes au Liberia, en Sierra Leone et en Guinée.

L'autre porte le nom de code cAd3-EBO-Z et a été développé par le National Institute of Allergy and Infectious Diseases américain et la multinationale pharmaceutique GlaxoSmithKline. Il est testé au Liberia.

Plusieurs autres vaccins, à des stades moins avancés, sont aussi dans le collimateur de diverses entreprises et agences de santé.

Du côté des médicaments, quatre produits sont actuellement testés en Afrique. Selon Marie-Paule Kieny, de l'OMS, la priorité est cependant donnée au ZMapp, de l'entreprise MappBio, et au TKM-100 802, de Tekmira, une entreprise de la Colombie-Britannique, parce que les données sur les animaux sont les plus prometteuses.

«Il y a là aussi une course pour essayer d'inclure le plus de patients possible dans les essais pendant qu'il y a encore des cas», dit Mme Kieny.