Les Haïtiens se recueillaient vendredi dans les églises, la rue ou les camps de sans-abri, lors de cérémonies poignantes rendant hommage aux 217 000 personnes tuées par le séisme qui a dévasté Port-au-prince et sa région il y a tout juste un mois.

Pour cette journée nationale de deuil, la population haïtienne était invitée par le gouvernement à revêtir des vêtements blancs et à se rendre dès 6H00 du matin aux multiples cérémonies organisées dans les églises, les campements et même au milieu des rues barrées pour l'occasion.

Fait rare depuis le séisme, le président haïtien René Préval est apparu en public. Entouré de son épouse Elizabeth et du premier ministre Jean-Max Bellerive, il a assisté à une cérémonie religieuse à l'université Notre Dame de la capitale. L'évènement était retransmis à la télévision.

Portant une chemise blanche avec un brassard noir au bras gauche, le chef de l'État haïtien, le visage fermé, a écouté les propos des intervenants comme le journaliste Marcus Garcia dont l'épouse a été tuée lors du séisme.

«La terre a tremblé et Haïti a basculé dans le vide..., mais nous sommes un peuple fier et fort dans l'adversité, qui a montré un grand sens de solidarité souvent avec peu de moyens», s'est souvenu le directeur de Radio Mélodie FM.

Au Champ-de-Mars, le plus grand camp de sans-abri au coeur de Port-au-Prince, des dizaines de milliers de personnes revêtues d'au moins un élément d'un blanc impeccable malgré les pénibles conditions de survie, ont assisté en pleurant à une autre cérémonie.

La plupart des femmes portaient un foulard immaculé noué autour de la tête.

«Toutes les religions d'Haïti, les vaudous, les catholiques, les baptistes, les protestants, on est tous réunis ici pour prier», Haïti n'ayant plus pour «richesse» que «l'esprit de l'Eternel», déclamait un prêcheur sur une scène.

«Le peuple haïtien sera pauvre» d'un point de vue matériel, «mais le plus riche du monde en grâce et spirituellement», a-t-il ajouté.

Des militaires américains organisaient la sécurité autour de la cérémonie.

Dans les rues de la capitale haïtienne dévastée par le séisme, des gens de tous âges affluaient par centaines, à pied, en bus ou en taxis collectifs, vers les points de rendez-vous, la mine grave, au milieu des clameurs ininterrompues.

Dans cette atmosphère de recueillement, la seule activité visible restait les distributions de nourriture. Des maris habillés de frais attendaient que leurs femmes rapportent des sacs de riz. Un mois après «la catastrophe», les besoins étaient encore criants: «nous n'avons même pas d'eau», a dit Carline Nazaire, 27 ans.

Une délégation de parlementaires américains menée par Nancy Pelosi, la présidente démocrate de la Chambre des représentants, devait arriver vendredi à Port-au-Prince pour évaluer l'avancée de la reconstruction avant que le Congrès ne se penche sur une aide à long terme.

En matière de sécurité, la Mission de stabilisation des Nations unies en Haïti (Minustah) a annoncé qu'elle devait «reprendre à zéro le travail qu'elle avait accompli ces trois dernières années pour faire face aux gangs en Haïti», en raison de l'évasion de prisonniers dangereux après le séisme.

Quelque 5 000 détenus sur les 8 000 que comptait l'établissement pénitentiaire de Port-au-Prince avaient réussi à prendre la fuite après le séisme. Environ 200 ont été repris.

En France, le Quai d'Orsay a défendu vendredi son action dans le domaine des adoptions de petits Haïtiens, effectuée «dans l'intérêt supérieur des enfants» et afin «de ne pas faire n'importe quoi», à la veille d'une nouvelle manifestation à Paris de parents critiquant sa lenteur.