Présent depuis longtemps en Haïti et sans nouvelles d'une partie de son personnel local, l'organisme Médecins sans frontières (MSF) réussit tout de même à garder la tête hors de l'eau. Ses membres concentrent toute leur énergie sur les interventions chirurgicales.

«Elles constituent notre priorité, a déclaré Stefano Zannini, chef de mission de MSF, qui se trouvait à Port-au-Prince au moment du tremblement de terre. Hier (jeudi) soir, nous avons réussi avec succès notre première opération, une césarienne complexe. La mère et l'enfant ont été sauvés. Durant la nuit, nous avons réalisé une dizaine d'interventions chirurgicales.»À l'occasion d'une conférence téléphonique avec des médias du monde entier, vendredi matin, M. Zannini a rappelé que des milliers d'Haïtiens attendent des opérations qualifiées d'urgentes. La majorité sont des interventions orthopédiques, car les fractures sont nombreuses.

Mais voilà, on ne peut opérer tout le monde en même temps. D'autant plus que plusieurs membres du personnel de MSF manquent à l'appel depuis le séisme. Présent en Haïti depuis des années, l'organisme gère en temps normal deux hôpitaux, dont un spécialisé en obstétrique, et a quelque 800 employés. De ce nombre, une trentaine viennent de l'étranger. Les autres sont des travailleurs haïtiens embauchés à contrat. Or, un certain nombre d'entre eux sont portés disparus. «C'est notre grande inquiétude en ce moment, a déclaré Gregory Van Den Daelen, attaché de presse de MSF Canada. Beaucoup de nos collègues manquent à l'appel. Avec l'état des communications, cela va prendre du temps avant de retrouver chacun d'eux.»

Le fait que MSF ait des bases solides à Port-au-Prince lui a permis de se relever rapidement à la suite du séisme. Ainsi, l'organisme possédait, à proximité de l'un de ses hôpitaux, une importante réserve de matériel tant logistique que médical destinée uniquement aux extrêmes urgences. C'était le moment de l'utiliser.

Il y a toutes sortes de choses dans cette réserve: des tentes, des bâches en plastique, des pompes, des produits pour le traitement de l'eau, des génératrices, du carburant, des pansements, des antibiotiques, du matériel de désinfection, etc.

De plus, en récupérant le matériel médical dans ses propres installations et d'autres hôpitaux effondrés, MSF est en mesure de bien fonctionner. L'organisme attend aussi des tonnes de matériel envoyé à bord d'avions nolisés.

M. Zannini a expliqué que, une fois le choc passé, l'équipe de MSF a pris les mesures nécessaires pour retrouver les quelque 300 patients de ses installations et a érigé des centres d'urgence de fortune afin de procurer les premiers soins aux blessés.

Un bloc opératoire a pu être érigé sur le site de l'hôpital Choscal, dans le bidonville de Cité-Soleil. Un autre serait sur le point de l'être dans la banlieue de Pétionville. Pour le moment, MSF a le matériel médical qu'il lui faut. Et des avions cargos, chargés de tonnes de matériel médical en provenance du Panama et de Bordeaux, étaient en route pour l'île d'Hispaniola.

Depuis le tremblement de terre, MSF a pu traiter environ 2000 personnes souffrant de blessures de toutes sortes: fractures ouvertes, blessures à la tête, etc. Les 300 patients hospitalisés dans ses établissements au moment du séisme ont pu être replacés dans les campements temporaires. Enfin, du personnel médical en provenance de l'étranger est en route pour remplacer, du moins en partie, les disparus.

Moins inquiet des épidémies

Par ailleurs, M. Zannini a profité de sa conversation avec les médias pour dire qu'il ne s'inquiète pas trop du déclenchement d'une épidémie. «Nous sommes intervenus dans plusieurs autres catastrophes dans le monde dans le passé et n'avons jamais eu à faire face à de grandes épidémies», a-t-il dit.

Le prochain défi de MSF sera d'aller porter secours à la population du sud du pays. «Nous allons essayer de nous y rendre dans les prochains jours», a dit le chef de mission avant de reprendre sa (longue) journée de travail.