Le camp du Oui et du Non ont donné un dernier coup de fouet hier, à la veille du référendum sur l'indépendance de l'Écosse. Tandis que le leader indépendantiste Alex Salmond et son adversaire Gordon Brown prononçaient leurs ultimes discours, les partisans s'activaient sur le terrain pour gagner des votes.

Ce n'était pas vraiment le calme avant la tempête hier, en Écosse.

À la veille d'un vote historique qui pourrait mettre un terme à une union de plus de 300 ans entre l'Écosse et l'Angleterre, politiciens et militants des deux camps donnaient un dernier coup de fouet pour leur cause, alors que deux nouveaux sondages plaçaient le Non en avance par une faible marge.

À Glasgow, l'ancien premier ministre britannique Gordon Brown a prononcé un ultime plaidoyer pour la sauvegarde du Royaume-Uni, dans un discours passionné qui restera probablement dans les annales.

Sans notes ni télésouffleur, Brown a parlé avec émotion pendant près de 15 minutes, implorant la majorité silencieuse de se «lever» pour «ne pas laisser le nationalisme étroit nous diviser».

«Quel message envoyons-nous au monde, nous qui avons été les pionniers du partenariat entre nations, si demain nous rejetons le principe même du partage et de la solidarité?», a demandé Brown, lui-même écossais, en rappelant les multiples batailles menées de concert par l'Écosse et l'Angleterre.

Plus prosaïquement, il a rappelé que les risques de l'indépendance étaient énormes.

«La seule chose qui est claire avec les nationalistes, c'est qu'il n'y a pas de certitude. Si vous avez le moindre doute, votez Non», a-t-il déclaré.

Brown, qui a été premier ministre travailliste de 2007 à 2010, s'est fait plutôt discret pendant la campagne référendaire. Cette prestation tardive pourrait, selon certains, marquer son retour à l'avant-scène de la vie politique.

Culminer

Pas en reste, le premier ministre écossais Alex Salmond a déployé son plus bel enthousiasme, dans un discours donné à Perth plus tard en soirée.

Devant quelque 1500 militants, Salmond a déclaré que la campagne du Oui avait été «la meilleure de toute l'histoire politique de l'Écosse» en raison de son énorme engagement citoyen.

«Je n'ai jamais vu un tel degré d'implication, a dit le chef du SNP. Si nous gagnons demain, ce sera grâce aux milliers d'individus à travers l'Écosse qui sont devenus des leaders dans leurs collectivités.»

À ceux qui, comme son adversaire David Cameron, s'inquiètent d'un «divorce douloureux», le chef du Oui a par ailleurs promis qu'une Écosse indépendante serait «l'amie la plus proche, la conseillère la plus honnête et l'alliée la plus engagée» du reste du Royaume-Uni.

Pour le reste, «tout a été dit», a conclu Salmond, qui touchera ce soir au rêve d'une vie.

«À chacun maintenant de voter la tête et la conscience claires.»

Déchirés entre l'espoir et la peur

Sur le terrain, c'était aussi le sprint final. En matinée au centre-ville de Glasgow, une centaine de militants s'étaient rassemblés sous la statue de Donald Dewar (le tout premier premier ministre de l'histoire de l'Écosse) avec une abondance de ballons et de pancartes aux couleurs du «Oui pour l'Écosse».

Armé d'un mégaphone, le président de la campagne Yes Scotland, Denis Canavan, diffusait ses derniers mots d'encouragement, devant les caméras et les journalistes, ravis d'assister à cette mise en scène tonitruante.

«Les dernières promesses de Westminster sont un leurre. Mais les gens d'Écosse ne se laisseront pas berner. La seule garantie d'avoir plus de pouvoirs est de voter Oui. Portons ce message dans chaque maison d'Écosse», a lancé Canavan, avant que sa bande ne scande «Hope, not fear» (l'espoir, pas la peur) en réponse aux propos alarmistes du camp du Non.

«Le complexe de Braveheart»

Le kiosque de Better Together, situé à deux coins de rue de là, était beaucoup moins exubérant. Alors que les cris de ralliement du Oui se faisaient entendre au loin, une poignée de militants distribuaient leurs dépliants aux passants.

Il n'y avait ni journalistes ni caméras.

«Les gens nous aiment parce qu'on est discrets, a fait remarquer Elizabeth, en tenant une pancarte artisanale. C'est tout le contraire du Oui. Ils sont agressifs et bruyants.»

«Ne jamais faire confiance à un parti qui se dit nationaliste, a ajouté Paul, vêtu d'un K-way rouge au logo de la campagne Better Together. Avec eux, c'est toujours la faute de quelqu'un d'autre. Ils se présentent sans arrêt comme des victimes. C'est le complexe de Braveheart.»

Paul et Elizabeth feront aujourd'hui le tour des bureaux de scrutin pour convaincre des indécis. Ils craignent d'être intimidés par les gens du Oui. Ils sont inquiets, tout simplement. Si le Non l'emporte, ils ne savent pas comment le Oui va réagir. Et si le Oui l'emporte, eh bien, ce sera la fin des haricots.

«On n'en dort plus, lance Paul. Les gens ont peur de perdre leur boulot, leur maison.»

«Moi je vends la mienne si le Oui gagne, coupe Elizabeth. Et je vais vivre en Angleterre...»