Le guide suprême de l'Iran a rejeté jeudi les propositions de dialogue direct avec les États-Unis, réduisant à néant les espoirs de négociations bilatérales sur le dossier nucléaire et d'autres questions sensibles.

Il s'agit de la première réaction publique de l'ayatollah Ali Khamenei depuis que l'idée des discussions directes a été défendue par le vice-président américain Joe Biden lors d'un sommet sur la sécurité à Munich cette semaine, auquel participait le ministre iranien des Affaires étrangères.

La déclaration de l'ayatollah Khamenei, publiée sur son site Internet, pourrait avoir des répercussions sur les négociations qui doivent avoir lieu plus tard en février au Kazakhstan entre l'Iran et le «groupe des Six», soit les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU et l'Allemagne. Son apparente référence aux sanctions américaines laisse penser que les émissaires iraniens exigeront un relâchement des pressions économiques américaines avant d'envisager toute concession sur le dossier nucléaire.

Les États-Unis ont renforcé cette semaine leurs sanctions contre la République islamique, qui ont déjà eu pour effet de diminuer les revenus pétroliers de l'Iran de 45 pour cent. Les nouvelles mesures visent à nuire davantage à la capacité de l'Iran de tirer des revenus du pétrole. Elles appellent les pays qui achètent du brut iranien, principalement des pays asiatiques, dont la Chine et l'Inde, à exiger que l'Iran reçoive en échange des produits locaux plutôt que de l'argent comptant.

«Ils disent que la balle est dans la cour de l'Iran. Mais la balle est dans votre cour», a déclaré le guide suprême. «Vous devez rendre des comptes et expliquer ce que signifie de proposer des discussions tout en poursuivant simultanément les pressions et les menaces.»

Toutes les grandes décisions politiques prises en Iran doivent être approuvées par l'ayatollah Khamenei. Il s'est déjà opposé auparavant à des négociations directes avec les États-Unis, et rien n'indique qu'il soit enclin à changer de position.

«Les discussions ne résoudront aucun problème», a-t-il écrit dans sa déclaration mise en ligne jeudi, après une rencontre avec les commandants de la force aérienne. «Vous brandissez un pistolet sur l'Iran en disant: "des discussions ou on ouvre le feu". La nation iranienne ne sera pas effrayée par de telles menaces», a-t-il ajouté, dans une apparente référence aux sanctions américaines.

Les États-Unis et l'Iran ont coupé toutes leurs relations diplomatiques après la prise de l'ambassade américaine à Téhéran dans la foulée de la Révolution islamique de 1979. Des extrémistes iraniens avaient pris 52 Américains en otages pendant 444 jours.

«Je ne suis pas un diplomate. Je suis un révolutionnaire et je m'exprime honnêtement», a ajouté l'ayatollah Khamenei.

Le guide suprême a noté que certains courants politiques iraniens étaient favorables à des discussions directes avec les États-Unis à cause de leur «naïveté». Il n'a pas donné de détails, mais a déclaré qu'il fallait lutter contre les efforts des Américains pour rétablir leur «domination» sur l'Iran, en référence au chah pro-occidental renversé lors de la révolution.

«Les discussions sont significatives si elles sont fondées sur la bonne foi, l'égalité et quand les deux parties ne tentent pas de duper l'autre», a dit l'ayatollah Khamenei. «Des discussions en guise de tactique ou de geste d'une superpuissance ne peuvent être qu'un geste décevant.»