Le marathon des primaires et des caucus ne fait que commencer aux États-Unis. Mais les scrutins de samedi en Caroline-du-Sud et au Nevada pourraient s'avérer déterminants dans le choix des candidats républicain et démocrate pour la présidence. Retour sur les résultats et les leçons à en tirer.

LE PARTI DE TRUMP

Ils sont très majoritairement favorables à l'arrêt temporaire de l'immigration musulmane aux États-Unis. Près de la moitié d'entre eux sont également d'accord avec l'expulsion des émigrés clandestins. Et ils sont massivement insatisfaits ou en colère contre leur gouvernement. Ces électeurs, sondés après leur participation à la primaire républicaine de la Caroline-du-Sud, n'ont pas tous voté pour Donald Trump, qui a triomphé avec 32,5 % des voix. Mais ils expriment des opinions qui ont été à la fois façonnées et exploitées par le candidat milliardaire, qui finira peut-être par transformer le Parti républicain à son image. Chose certaine, Trump est désormais le meneur incontesté de la course à l'investiture du Grand Old Party. Non seulement il vient de remporter de façon décisive une deuxième primaire d'affilée après avoir attaqué le pape, George W. Bush et Apple, mais il domine également les sondages dans la plupart des États qui n'ont pas encore voté.

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Donald Trump domine les sondages dans la plupart des États qui n’ont pas encore voté.

L'ESPOIR DE L'ESTABLISHMENT

Il y a six mois, les membres de l'establishment républicain misaient sur Jeb Bush pour remporter l'investiture du parti. Hier soir, ils ont poussé un soupir de soulagement en entendant l'ancien gouverneur de la Floride annoncer son retrait de la course. Ne manque à leur bonheur que l'abandon de John Kasich, qui a récolté 7,6 % des voix en Caroline-du-Sud, contre 7,8 % pour Bush. Car pour remporter la course, le nouveau chouchou de l'establishment, Marco Rubio, deuxième avec 22,5 % des voix, doit faire le plein de votes auprès des électeurs qui ne veulent ni de Donald Trump ni de Ted Cruz. Malheureusement pour les donateurs, stratèges et autres bonzes républicains, le gouverneur de l'Ohio s'est engagé à poursuivre la lutte (Ben Carson, bon dernier avec 7,2 % des voix, a fait la même promesse). N'empêche : le sénateur de la Floride est peut-être le dernier et meilleur espoir de l'establishment républicain.

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Marco Rubio doit faire le plein de votes auprès des électeurs qui ne veulent ni de Donald Trump ni de Ted Cruz.

L'ÉPREUVE D'UN TEXAN

Ted Cruz n'est-il rien de plus qu'un autre Mike Huckabee ou Rick Santorum ? La question se pose après sa décevante troisième position en Caroline-du-Sud, où il a récolté 22,3 % des voix. Comme Huckabee en 2008 et Santorum en 2012, Cruz a remporté les caucus de l'Iowa en mobilisant les évangéliques de cet État. Mais il n'a pas encore prouvé sa capacité d'élargir ses appuis au-delà de cet électorat religieux, principale raison de l'échec des Huckabee et Santorum. En fait, en Caroline-du-Sud, Cruz n'a même pas réussi à battre Donald Trump chez les évangéliques, qui représentaient 72 % de l'électorat. Ses chances de remporter la course à l'investiture républicaine reposent désormais sur sa performance à l'occasion des primaires du «super mardi», le 1er mars. Il ne peut notamment pas se permettre de perdre le scrutin qui sera tenu ce jour-là au Texas, l'État qu'il représente au Sénat.

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Ted Cruz a décroché la troisième position en Caroline-du-Sud, où il a récolté 22,3 % des voix. 

LE SOULAGEMENT DE CLINTON

En remportant une victoire relativement courte au Nevada, Hillary Clinton n'a pas éliminé la menace que représente Bernie Sanders. Celui-ci a les appuis et les moyens financiers pour prolonger la course à l'investiture démocrate jusqu'en juin. Mais l'ancienne secrétaire d'État a rassuré ses partisans et fait un pas important vers la nomination. Elle a remporté samedi la majorité du vote des femmes et des cols bleus, deux groupes qui lui avaient fait faux bond au New Hampshire. Et elle a écrasé le sénateur du Vermont chez les Afro-Américains, qui représentaient 13 % de l'électorat démocrate. Ceux-ci formeront un bloc électoral encore plus important à l'occasion de la primaire de la Caroline-du-Sud, le 27 février, et de celles qui se dérouleront dans une dizaine d'États le 1er mars. Dans son discours de victoire, l'ancienne secrétaire d'État s'est également montrée plus empathique, délaissant le «je» pour le «nous».



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Hillary Clinton a rassuré ses partisans en remportant la victoire au Nevada.

LES LIMITES D'UNE RÉVOLUTION

Une donnée illustre peut-être les limites de la révolution politique annoncée par Bernie Sanders. Samedi, quelque 80 000 électeurs ont participé aux caucus démocrates du Nevada. En 2008, année de la course entre Barack Obama et Hillary Clinton, près de 120 000 s'étaient déplacés pour exprimer leur choix. Cette baisse importante n'est encourageante ni pour le sénateur du Vermont ni pour Clinton, car elle démontre un manque d'intérêt relatif pour la course actuelle. Sanders peut cependant se réjouir de la donnée suivante : il a remporté 53 % du vote latino, selon les sondages réalisés auprès d'électeurs samedi (certains ont mis en doute cette donnée, faisant valoir que Clinton avait enlevé les circonscriptions où sont concentrés les Latinos). Mais il n'y a pas de doute que le sénateur du Vermont ne peut aspirer à gagner l'investiture démocrate avec seulement 22 % du vote afro-américain, comme ce fut le cas au Nevada.

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Bernie Sanders a les appuis et les moyens financiers pour prolonger la course à l'investiture démocrate jusqu'en juin.