La Grande-Bretagne vit un «effondrement moral au ralenti», a estimé le premier ministre conservateur David Cameron lundi, après les récentes émeutes qui se sont soldées par cinq morts, des milliers de mises en accusation et au moins 200 millions de livres (322 millions $ CAN) de dégâts selon les assureurs nationaux.

M. Cameron a ajouté que son gouvernement de coalition présenterait des mesures censées s'attaquer à la culture de la paresse, de l'irresponsabilité et de l'égoïsme qui auraient alimenté les quatre jours d'émeutes, parties le 6 août de Tottenham, quartier défavorisé du nord de Londres, après la mort d'un père de famille tué par la police.

Il a aussi promis que les ministres et autres responsables allaient durcir le ton après avoir, selon lui, trop peu mis en avant des valeurs morales fortes. Le gouvernement n'hésitera plus, a-t-il dit, à parler de l'éclatement de la famille, des mauvais parents, ou à critiquer ceux qui ne donnent pas le bon exemple à leur communauté.

Les émeutes «ont appelé notre pays à se réveiller. Les problèmes sociaux qui couvaient depuis des dizaines d'années nous ont explosé au visage», a lancé David Cameron lors d'une visite dans un centre de jeunesse à Witney, sa circonscription, dans le sud de l'Angleterre. «Tout comme les gens voulaient que l'on s'attaque de front aux criminels dans nos rues la semaine dernière, ils veulent que l'on s'attaque et que l'on surmonte ces problèmes sociaux», a-t-il ajouté.

Le premier ministre a assuré que les tensions raciales, la pauvreté et le programme d'austérité du gouvernement n'étaient pas à l'origine des émeutes qui ont frappé Londres et plusieurs autres grandes villes comme Birmingham, Manchester et Liverpool.

Pour lui, les racines du mal se trouvent dans la criminalité et le manque de responsabilité personnelle. M. Cameron a promis que le gouvernement aiderait les 120 000 familles les plus vulnérables du pays avant les élections nationales de 2015.

Mais la réponse du gouvernement britannique aux émeutes suscite les critiques de la principale formation de l'opposition. Le chef de file des travaillistes, Ed Miliband l'a jugée trop simpliste et demandé que les parlementaires fixent leur attention sur de meilleures propositions pour la jeunesse en révolte.

«L'instinct habituel des politiques» qui tient notamment dans de nouvelles législations ou la nomination de nouveaux conseillers «ne répondra pas à la demande du public», a lancé M. Miliband dans son ancienne école de Camden, dans le nord de Londres, non loin du théâtre de violentes émeutes qui avaient éclaté le 8 août dans le quartier.

Il a mis en avant le souci d'éducation, de services pour les jeunes, moyens «importants» selon lui pour les détourner du «mauvais chemin» et de la criminalité.

Après le scandale des notes de frais impliquant des parlementaires ou encore celui des écoutes illégales du tabloïd News of the World, David Cameron et Ed Miliband se rejoignent cependant sur un point: tous les secteurs de la société portent une part de responsabilité. «Le déclin moral et les mauvais comportements ne sont pas limités à quelques-uns (des éléments) les plus pauvres de notre société», a observé David Cameron en insistant sur la culture par l'«exemple».

Ses projets et ses commentaires n'ont pas semblé faire mouche dans les rangs des jeunes. «S'il faisait son travail correctement, cela ne se serait pas produit», commentait Jake Parkinson, 17 ans.

À travers tout le pays, quelque 1400 personnes ont été appréhendées pour des infractions liées aux émeutes et des milliers d'autres interpellées. Plusieurs tribunaux ont ouvert dimanche, pour la première fois de l'histoire contemporaine, pour traiter des dossiers en cours.

Lundi, la police interrogeait deux hommes après la mort d'un homme de 26 ans tué par balle lors des violences à Croydon, dans le sud de Londres. Un adolescent de 16 ans était également interrogé dimanche soir, les enquêteurs le soupçonnant d'avoir mortellement frappé un homme de 68 ans qui tentait d'éteindre un incendie allumé par des émeutiers à Ealing, dans l'ouest de Londres.

Les violences de la semaine passée ont aussi été marquées par trois décès à Birmingham, à 190 kilomètres au nord-ouest de Londres: trois Pakistanais âgés de 20 à 31 ans, dont deux frères, sont décédés mercredi après avoir été percutés par une voiture qui roulait à vive allure alors qu'ils gardaient des magasins pour les protéger des pillages. Lundi, deux hommes et un adolescent, accusés de meurtre, ont comparu devant un tribunal.