Des armes chimiques ont été utilisées selon l'ONU à cinq reprises en Syrie, où les États-Unis s'inquiétaient des récents revers subis par les combattants rebelles face aux djihadistes.

Alors que les combats se poursuivent sans répit sur le terrain, la vague de froid continuait à sévir dans la région, aggravant la situation des quelque trois millions de réfugiés installés dans les pays voisins, dans des conditions souvent précaires.

Dans leur rapport final transmis jeudi au secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon, les inspecteurs ayant enquêté en Syrie citent des «preuves» ou des «informations crédibles» sur une utilisation d'armes chimiques dans la Ghouta, à Jobar et Achrafié Sahnaya (près de Damas), ainsi qu'à Khan al-Assal (près d'Alep, nord) et à Saraqeb (nord-ouest).

Le rapport, qui doit être examiné lundi par le Conseil de sécurité, ne désigne pas les responsables de ces attaques probables à l'arme chimique, car cela n'entrait pas dans le cadre du mandat des inspecteurs.

La mission «a recueilli des preuves flagrantes et convaincantes de l'utilisation d'armes chimiques contre des civils, dont des enfants, à une échelle relativement large dans la région de la Ghouta de Damas le 21 août», explique le rapport, confirmant les premières conclusions des inspecteurs en septembre.

Après cette attaque ayant fait selon eux près de 1500 morts, les États-Unis ont menacé le régime de frappes punitives, avant d'y renoncer à la suite d'un accord sur la destruction de l'arsenal chimique syrien, au grand dam des rebelles qui espéraient un changement dans l'équilibre de forces.

Depuis, les rebelles ont subi revers après revers et les forces fidèles à Bachar al-Assad ont repris un grand nombre de leurs bastions.

Leur situation s'est en outre aggravée en raison de dissensions au sein de la rébellion - plusieurs groupes islamistes ont quitté en novembre l'Armée syrienne libre (ASL, combattants modérés) - et de la montée en puissance de groupes djihadistes qui, tout en combattant le régime, se sont engagés dans des luttes et règlements de compte avec les autres groupes rebelles.

Dernier exemple en date : des combattants islamistes se sont emparés en début de semaine d'un passage clé à la frontière turque, ainsi que des positions de l'ASL et de ses dépôts d'armes.

«Baisser la tête de honte»

Ces revers des combattants de «l'opposition modérée» posent un «gros problème», a convenu le secrétaire américain à la Défense, Chuck Hagel.

«Nous allons devoir voir comment le gérer avec le général (Sélim) Idriss et l'opposition modérée», a-t-il estimé, en référence au chef d'état-major de l'ASL.

Selon un responsable américain s'exprimant sous couvert de l'anonymat, cette prise de bâtiments de l'ASL par des islamistes a eu un «effet d'entraînement» dans d'autres centres de l'ASL, dont les responsables ont pris la fuite par peur d'être à leur tour attaqués.

Dans ce contexte, un ancien directeur de la CIA, Michael Hayden, a estimé qu'une victoire de M. Assad en Syrie pourrait être «le meilleur de trois très, très horribles scénarios», dont aucun ne prévoit la victoire de la rébellion.

L'issue actuellement la plus probable restait la «dissolution» du pays entre factions rivales, a-t-il ajouté, en estimant que le monde assistait en ce moment à «la prise de contrôle par des fondamentalistes sunnites d'une partie significative de la géographie du Moyen-Orient».

Sur le terrain, les autorités de Damas ont décidé de libérer «pour des raisons humanitaires» plus de 360 détenus de la prison d'Alep (nord), assiégée depuis huit mois par les rebelles, selon l'agence officielle Sana.

Aucune issue ne semble en vue pour ce conflit qui a fait selon une ONG syrienne plus de 126 000 morts depuis mars 2011. Une conférence de paix est prévue en janvier à Genève, mais régime et opposition ont des points de vue antagonistes sur le sort du président Assad dans une période d'une transition.

Le conflit a fait des millions de déplacés et réfugiés, dont le sort inquiète de plus en plus les ONG.

Le Programme alimentaire mondial (PAM) a ainsi annoncé avoir prévu de nourrir en décembre quatre millions de personnes en Syrie et souligné que «les besoins humanitaires et l'insécurité alimentaire ne (cessaient) de croître».

Amnistie Internationale a pour sa part accusé les pays européens d'ériger une «forteresse» pour se protéger des réfugiés syriens, qu'ils ne sont prêts à accueillir qu'en «nombre pitoyablement bas». «Les dirigeants européens devraient baisser la tête de honte», a martelé l'organisation.