La Russie a évacué le personnel de son ambassade à Tripoli jeudi, au lendemain d'une attaque contre la chancellerie qui a fait deux morts parmi les assaillants.

«La décision a été prise, compte tenu de la situation, d'évacuer immédiatement via la Tunisie l'ensemble des employés de nos représentations diplomatiques (en Libye) et leurs familles», a déclaré le porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères Alexandre Loukachevitch.

«Le ministre libyen des Affaires étrangères Mohamed Abdelaziz, qui s'est rendu à l'ambassade, a indiqué à l'ambassadeur de Russie que la partie libyenne n'était pas en mesure à ce stade de garantir la protection et la sécurité de l'ambassade, et a recommandé à ses employés de partir», a ajouté le porte-parole, dans un communiqué.

«Ce n'est pas vrai», a rétorqué M. Abdelaziz. «Nous ne pouvons pas faire ce genre de recommandations», a-t-il dit à l'AFP.

Le ministre a précisé avoir «demandé à l'ambassadeur russe de quitter l'ambassade et de passer la nuit dans un hôtel ou dans un autre lieu plus sûr», par crainte d'une nouvelle attaque après la mort de deux assaillants libyens.

«Deux Libyens sont morts dans l'assaut», a-t-il dit, sans donner de précisions sur les circonstances de leurs décès. «Nous avons craint que la situation ne dégénère», a-t-il dit.

«Après une longue discussion, l'ambassadeur a reçu l'ordre (de Moscou) de ne pas sortir des locaux de l'ambassade et de quitter le pays dans la matinée. Nous avons donc facilité leur départ», a ajouté le ministre.

De son côté, le porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères a indiqué que «dans la journée du 3 octobre, tous les employés de l'ambassade de Russie et les membres de leurs familles ont franchi sains et saufs la frontière tunisienne. Leur retour à Moscou par vol spécial est prévu le 4 octobre».

L'agence publique russe Ria Novosti, citant le ministère des Situations d'urgence, a précisé qu'un vol spécial décollait de Moscou jeudi soir à destination de Djerba, où se trouveraient donc les personnes évacuées.

Un responsable tunisien du poste frontalier tuniso-libyen de Ras Jdir a indiqué à l'AFP que «47 hommes femmes et enfants sont entrés en Tunisie entre 7 h 30 (2 h 30 à Montréal) et 8 h (3 h à Montréal)» jeudi.

«Ils ont été installés dans un hôtel de Djerba», a indiqué à l'AFP un responsable sécuritaire sur cette île touristique située à 300 km à l'ouest de Tripoli et à 130 km de la frontière tuniso-libyenne.

Il s'est refusé à donner plus d'informations sur leur lieu de résidence, invoquant des raisons de sécurité.

Selon lui, l'avion affrété par la Russie doit, selon le plan de vol, décoller vers minuit, heure locale (19 h à Montréal) de l'aéroport de Djerba-Zarzis.

L'attaque contre l'ambassade de Russie aurait été menée en représailles à l'assassinat dans la capitale libyenne d'un officier de l'armée par une femme russe, dans des circonstances encore non élucidées.

Certaines sources à Tripoli affirment qu'une femme russe a assassiné cet officier pour son rôle dans la révolte contre le régime de Mouammar Kadhafi, tandis que d'autres soutiennent qu'il s'agit de l'épouse de la victime qui l'aurait tué pour des motifs personnels.

«Selon les informations disponibles, l'agression à l'encontre de notre représentation diplomatique a été déclenchée par le meurtre le 1er octobre d'un officier libyen par la citoyenne russe Ekaterina Oustioujaninova, et des coups de couteau portés à sa mère», a indiqué de son côté le porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères.

«Ces événements ont poussé les proches et les amis du Libyen tué à décider de "venger" sa mort», a-t-il encore indiqué.

Cette attaque s'ajoute à plusieurs autres ciblant des ambassades et diplomates étrangers en Libye, illustrant l'incapacité des nouvelles autorités libyennes à rétablir l'ordre dans le pays depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi.

Le 11 septembre 2012, des islamistes avaient lancé une attaque contre le consulat américain à Benghazi au cours de laquelle l'ambassadeur des États-Unis, Chris Stevens, et trois autres Américains avaient été tués.

Plus récemment, un attentat à la voiture piégée contre l'ambassade de France à Tripoli a fait deux blessés parmi les gendarmes français le 23 avril.