La France a annoncé vendredi le début imminent de la bataille de Raqqa mais la principale force sur le terrain, l'alliance kurdo-arabe, est encore loin de la capitale de facto des djihadistes du groupe État islamique (EI) en Syrie.

Soutenues par la coalition internationale menée par les États-Unis, les Forces démocratiques syriennes (FDS), fer-de-lance de la bataille antidjihadistes dans le nord du pays en guerre, doivent encore surmonter plusieurs obstacles, notamment le barrage et l'aéroport de Tabqa, une ville située à 50 km au sud-ouest de Raqqa, selon une source au sein des FDS.

« Aujourd'hui, on peut dire que Raqqa est encerclée et que la bataille de Raqqa commencera dans les jours qui viennent », a dit le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian.

Mais le porte-parole des FDS s'est montré prudent. « L'opération pour assiéger Raqqa prendra plusieurs semaines et cela conduira ensuite à lancer officiellement l'opération » pour libérer la ville, a déclaré à l'AFP Talal Sello.

En fait, sur le terrain, selon Rami Abdel Rahmane, directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), la position des FDS la plus proche de Raqqa se trouve à 8 km au nord-est de la ville sinon ces forces sont positionnées entre 18 et 30 km de Raqqa.

Toutes les routes de ravitaillement sont coupées pour l'EI sauf celles du sud et la bataille la plus intense se déroule actuellement à al-Karamé à 18 km à l'est de la « capitale » du califat autoproclamé. Des combats se déroulent aussi à quelques kilomètres de Tabqa, un secteur stratégique pour l'EI.

Des semaines, des mois

« Pour protéger leurs lignes arrière et empêcher l'EI de les prendre en revers, les FDS doivent prendre le contrôle ou assiéger totalement Tabqa et pour le moment cette bataille n'a pas encore commencé », a souligné le porte-parole des FDS.

À cela, selon une source au sein des FDS, il faut éviter à tout prix que l'EI, acculé, fasse sauter le barrage de Tabqa ce qui entraînerait une « catastrophe humanitaire », car cela inonderait toute la région.

« Le premier objectif des FDS est de contrôler totalement la ville de Tabqa ou de l'encercler totalement avant de lancer la bataille même de Raqqa », a dit M. Abdel Rahmane.

Mercredi, le Pentagone a annoncé que les États-Unis avaient utilisé des hélicoptères d'attaque et de transports de troupes et de l'artillerie pour soutenir une offensive des FDS sur le barrage de Tabqa qui ferme le lac Assad.

« Prendre Tabqa donnera aux FDS un avantage stratégique et une base de lancement nécessaire pour la libération » de la ville, selon le colonel Joseph E. Scrocca, un porte-parole militaire américain.

Il a souligné cette semaine qu'il faudrait probablement « plusieurs semaines avant que le barrage, le terrain d'aviation et la ville ne soient libérés ».

Pour la porte-parole de la bataille de Raqqa, Jihan Cheikh Ahmad, « l'opération se déroule comme prévu sur deux fronts, l'est et l'ouest, mais la libération de Raqqa devrait prendre plusieurs mois ».

Négociations à Genève

La ville de Raqqa a été la première capitale provinciale à tomber en mars 2013 aux mains des rebelles avant que l'EI ne les chasse en janvier 2014.

Selon une source diplomatique européenne, « les Américains sont toujours dans le ''review process''. Trump n'a pas pris de décision (sur qui va reprendre Raqqa), mais on voit bien que sur le terrain c'est l'option FDS qui se développe ».

La coalition estime que de 3000 à 4000 djihadistes sont retranchés dans cette ville de 300 000 habitants, et s'attend à des combats très difficiles pour la reprendre.

C'est le 5 novembre 2016 que les FDS ont lancé une grande offensive, baptisée « Colère de l'Euphrate », pour reprendre Raqqa à l'EI.

Sur le front diplomatique, l'émissaire de l'ONU pour la Syrie Staffan de Mistura doit avoir vendredi des entretiens avec la délégation gouvernementale et celle de l'opposition dans le cadre du cinquième round de pourparlers à Genève.

Jeudi, son adjoint Ramzy Ezzeldine Ramzy, avait eu des entretiens préliminaires séparés avec les deux délégations. Mais l'espoir est mince de trouver une solution politique au conflit très complexe qui a déjà fait plus de 320 000 morts et des millions de déplacés et de réfugiés depuis six ans.