Un troisième cycle de pourparlers de paix sur la Syrie s'est ouvert mardi à Astana, au Kazakhstan, en l'absence des rebelles, laissant peu d'espoir pour une avancée notable dans la résolution du conflit.

Les deux précédents rounds de négociations dans la capitale kazakhe, parrainés par la Russie et l'Iran, alliés du régime de Bachar al-Assad, et par la Turquie, soutien des rebelles, n'avaient permis aucune percée majeure permettant d'envisager une solution à ce conflit qui a fait plus de 320 000 morts en six ans.

Le chef de la délégation du régime syrien, Bachar al-Jaafari, a dénoncé la décision des rebelles de boycotter la rencontre tout en assurant que des progrès pouvaient être accomplis en leur absence.

«Nous sommes prêts à assurer le succès d'Astana (...) avec ou sans la participation des factions armées. Leur absence à Astana démontre l'indécence de leur politique», a déclaré M. al-Jaafari, cité par l'agence syrienne SANA, ajoutant que le régime souhaitait avant tout s'entretenir avec la Russie et l'Iran.

Un porte-parole des rebelles, Oussama Abou Zeid, a justifié lundi le boycottage des négociations d'Astana par «des promesses non tenues liées à la cessation des hostilités» en Syrie.

Pour le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, l'absence des rebelles est due à un «malentendu».

Le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a estimé pour sa part que ces négociations «sont rendues vraiment compliquées par les différences qui existent dans l'approche des différentes parties».

Les pourparlers d'Astana sont destinés à «faciliter» le travail de Staffan de Mistura, a affirmé l'envoyé spécial du président Vladimir Poutine pour la Syrie Alexandre Lavrentiev, cité par les agences de presse russes.

«Le processus de Genève peut en bénéficier», a-t-il ajouté alors que M. de Mistura a convié le gouvernement syrien et les groupes d'opposition à un cinquième round de négociations sous l'égide de l'ONU, à Genève le 23 mars.

Au cours de cette rencontre, les participants discuteront à nouveau de la «séparation entre l'opposition et les terroristes», une demande formulée à de nombreuses reprises par Damas auprès des rebelles, a annoncé le négociateur en chef du régime.

De son côté, l'envoyé spécial de l'ONU Staffan de Mistura a déclaré s'attendre à ce que la lutte antiterroriste et des possibilités concrètes d'échanges de prisonniers et de personnes enlevées soient abordées à Astana.

Les précédentes rencontres d'Astana s'étaient concentrées sur le renforcement d'une fragile trêve, instaurée en décembre entre forces de Bachar al-Assad et groupes rebelles, mais menacée par des flambées régulières de violences.

La Syrie dans son entier est une «chambre de torture», s'alarme l'ONU

La Syrie tout entière est devenue une «chambre de torture», s'est alarmé mardi le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, estimant que le conflit qui entre dans sa septième année est «la pire catastrophe provoquée par l'homme depuis la Seconde Guerre mondiale».

«Aujourd'hui, en quelque sens, l'ensemble du pays est devenu une chambre de torture: un lieu d'une horreur sauvage et d'une injustice absolue», a déclaré Zeid Ra'ad Al Hussein, lors d'un débat de haut niveau sur la Syrie devant le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU.

Le conflit, «cet immense raz-de-marée de sang et d'atrocités» qui entre dans sa septième année, est «la pire catastrophe provoquée par l'homme depuis la Seconde Guerre mondiale», a-t-il estimé.

Il «a commencé avec des cas de torture: la détention et la torture, par des responsables des services de sécurité, d'un groupe d'enfants à Deraa qui avaient peint des graffitis anti-gouvernement sur le mur d'une école», a-t-il dit.

«Alors que les manifestations se multipliaient, le gouvernement a attaqué et mené la guerre contre son propre peuple, engendrant des mouvements rebelles, alimentant des extrémistes violents et préparant le terrain pour une guerre régionale et par procuration», a poursuivi le Haut-Commissaire.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), au moins 60 000 personnes sont mortes en six ans sous la torture ou à cause des terribles conditions de détention dans les prisons du régime.

Des enquêteurs de l'ONU ont accusé en février 2016 le régime de Damas d'«extermination» de détenus, affirmant que les morts massives de prisonniers étaient le résultat d'une «politique d'État».

«Même les appels désespérés du peuple d'Alep l'an dernier n'ont pas eu d'impact sur les dirigeants mondiaux dont l'influence pourrait contribuer à mettre fin aux combats», a déploré M. Zeid.

«Les veto» au Conseil de sécurité «ont maintes fois repoussé l'espoir de mettre fin à ce carnage insensé et ont empêché de renvoyer» la situation en Syrie devant la Cour pénale internationale, qui dispose d'un pouvoir juridictionnel sur les crimes internationaux, a-t-il critiqué.

La guerre civile en Syrie a été déclenchée par la répression sanglante de manifestations prodémocratie. Le conflit s'est complexifié depuis avec l'implication et l'intervention de plusieurs forces locales et étrangères faisant plus de 320 000 morts, selon l'OSDH, et déplaçant plus de la moitié de la population.